Médiathèque baha'ie

Baha'u'llah et les soufis Naqsbandi en Iraq
(1854-56)

Etudes dans l'histoire babie et baha'ie - Momen - vol 2
par Juan Ricardo Cole

(traduction de courtoisie par Frédéric Autret)


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Préface

Le mouvement babi, commencé à Chiraz en 1844 par Siyyid Ali Muhammad, le Bab, fut salué par beaucoup de musulmans iraniens comme la réponse de leurs espoirs pour la venue du Promis messianique (Mahdi) et l'avènement du Christ. E n partie à cause de la répression du mouvement (1848-1853) par le gouvernement iranien et les ulémas, et en partie à cause de l'activisme de certains babis, la propagation originelle de la religion fut accompagnée par un soulèvement social et dans plusieurs occasions, des engagements militaires. Une seconde phase commença dans les années 1860 lorsque Mirza Husayn-Ali, Baha'u'llah, renouvela avec succès les revendications d'être le retour spirituel du Bab, celui que ce dernier avait prédit comme Celui que Dieu rendra manifeste. Presque tous les babis devinrent rapidement baha'is, et de nouveaux croyants d'autres milieux religieux furent aussi bien attirés par le charisme de Baha'u'llah.

Baha'u'llah, de ses lieux d'exils en Turquie et en Palestine, prêcha une nouvelle doctrine sociale centrée sur l'unité de toute l'humanité, l'unité des grandes religions mondiales, et des approches pacifiques à la résolution de conflit social. Dans le Moyen Orient autocratique, il recommanda le constitutionnalisme et le gouvernement parlementaire, et dans une société peu éloignée de la féodalité, il proposa une distribution plus équitable de la richesse. Ces idées sociales furent néanmoins proclamées comme une partie d'un message religieux spécifique. Le successeur de Baha'u'llah et son fils aîné, Abdu'l-Baha Abbas, développa les aspects universalistes et libéraux du message de son père même plus en avant, prêchant la paix, l'amour universel, et le gouvernement mondial dans ses voyages en Europe et en Amérique du Nord (1910-1913).

Les premières phases à la fois du mouvement babi et de son successeur, la Foi Baha'ie, provoqua une érudition excitante et prodigieuse dans l'Europe du 19ème siècle, engageant les talents brillants de Gobineau, Browne, Goldziher, Huart, von Rosen et d'autres au premier rang des études orientalistes. Il faut reconnaître qu'ils étaient parfois entravés par les inconvénients de la tradition orientaliste, avec sa supériorité présomptueuse de l'Européen et de ses préoccupations avec les idées et les textes, presque à l'exclusion de la réalité sociale. Néanmoins, ils produisirent un recueil d'érudition sur les babis et les premiers baha'is qui est seulement en train d'être dépassé de nos jours.

De manière ironique, les premiers intérêts érudits dans la religion s'éteignirent dans les années 1920 et pendant presque 50 ans, aucun érudit académique européen de l'Amérique du Nord ne publia pratiquement quelque ouvrage significatif sur celle-ci. Pourtant, de 1920 jusqu'à maintenant, la foi baha'ie a subi d'importants changements et s'étendit grandement - devenant plus importante qu'elle ne l'était lorsque Browne dédia tant d'études à elle. En Iran la foi grossissait en étant plus organisée et sa culture intellectuelle commença à prendre de plus grande sophistication. Elle restait la minorité religieuse non musulmane la plus grande, surpassant en nombre surtout les chrétiens arméniens, les juifs et les zoroastriens. La communauté baha'ie américaine, fondée dans les années 1890, continua à montrer de la vigueur, s'impliquant elle-même dans des activités visant à amener les noirs et les blancs ensemble comme égaux dans l'Amérique raciste. Des communautés baha'ies furent fondées à travers le monde, et à la fin des années 1950 et des années 1960, le mouvement engloba soudainement les masses en Ouganda, en Inde et partout ailleurs.

Depuis 1970, des ouvrages académiques sur les religions babies et baha'ies a commencé une fois de plus à voir être imprimés. La rapide expansion des études du Moyen Orient comme une discipline académique en Europe et en Amérique du Nord dans les années 60 et 70 fut un facteur. Des anthropologistes et d'autres personnes qui allèrent en Iran rencontrèrent des baha'is et écrivirent sur eux. La montée de la croissance que la religion expérimenta aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne (1968-1975) provoqua aussi l'intérêt de beaucoup de jeunes occidentaux, certains d'entre eux convertis. Des érudits iraniens immigrants, qu'ils soient eux-mêmes baha'is ou qu'ils furent simplement intéressés à l'histoire du mouvement, ont aussi été importants dans la reprise de l'érudition de la langue européenne sur (it). Depuis 1979, la persécution des baha'is par le gouvernement d'Iran a soulevé un intérêt supplémentaire dans la minorité en péril.

A l'intérieur de la communauté, la Grande-Bretagne a été le centre et l'avant-garde de la nouvelle histoire babie-baha'ie. Hasan Balyuzi, un distingué baha'i iranien, diplômé à l'origine à l'université américaine de Beyrouth, plus tard à l'école de l'Economie de Londres, et résident de longue durée en Angleterre, produisit des traités sur la vie du Bab, de Baha'u'llah et d'Abdu'l-Baha dans les années 70. De jeunes érudits baha'is en Europe participèrent dans les séminaires de fond de Lancaster organisés par le sociologue Peter Smith. Des dissertations importantes ont récemment été produites sur les religions babies et baha'ies par Smith à Lancaster, Denis MacEoin à Cambridge et Abbas Amanant à Oxford.

Moojan Momen, diplomé à Cambridge, commença non seulement cette série de volumes sur l'histoire de la foi babie et baha'ie mais publia une compilation de documents d'archives européen portant sur l'histoire babie et baha'ie. Ce fut seulement naturellement que le premier volume de ces séries figurera des contributions du groupe de Lancaster.

Bien que les études académiques sur la foi baha'ie en Amérique du Nord trainent encore derrière celles en Europe, une nouvelle énergie est aussi bien apparente du côté occidental de l'Atlantique. La première conférence d'histoire baha'ie tenue en Amérique eût lieu à Los Angeles en août 1983. Il est de l'intention du présent volume de dresser ensemble certains de ces ouvrages académiques sur le sujet en Amérique (ou, dans le cas de Peter Smith, travaillant sur la communauté baha'ie américaine). Aucune tentative n'a été faite en étant exhaustive, et beaucoup de talents existent qui ne sont pas représentés ici. Tous les contributeurs au présent volume furent présents à la conférence de Los Angeles. Bien que des efforts furent faits d'attirer des contributions d'en dehors du cercle, ils ont rencontré peu de succès sur ce point - bien qu'il est l'espoir des éditeurs que ces séries publieront des articles croissants d'auteurs de beaucoup de milieux sociaux différents.

Dans ce volume se trouve un thème, cela pourrait être l'impact historique de la foi baha'ie en dehors du cercle des chiites iraniens parlant le persan à l'intérieur de qui le mouvement originel babi démarra. Dans mon texte sur Baha'u'llah et les kurdes soufis de l'Iraq, je discute de la réaction des thèmes babis de l'avènement messianique et l'insistance mystique des soufis sur le renouveau spirituel interne. Le texte analyse pour la première fois un important mais jusqu'à présent peu connu poème précoce écrit par Baha'u'llah en arabe, qui contient des allusions puissantes que même dans les années 50, il sentait qu'il avait une mission privée de réforme à exécuter dans la communauté babie. Margaret Caton de U.C.L.A. traite des influences baha'ies du musicien de la cour iranienne, Mirza Abdu'llah. Le milieu mystique des musiciens traditionnels et de l'approbation de la foi baha'ie de la musique (par opposition à l'Islam légaliste des ayatu'llahs, qui l'interdise) rendit la religion séduisante à l'un des plus grands compilateurs du répertoire persan. La Foi Baha'ie toucha un autre sous-groupe de manière significative - les zoroastriens, une ancienne communauté religieuse iranienne. Susan Stiles de l'université de l'Arizona rend intéressant l'utilisation de la documentation biographique jusqu'ici non étudiée pour délimiter le processus graduel de conversion parmi certains zoroastriens de la Foi Baha'ie.

Richard Hollinger de U.C.L.A. nous donne une étude d'Ibrahim Khayru'llah, le baha'i libanais qui tout d'abord propagea la religion aux Etats-Unis mais qui plus tard renonça à son obéissance au successeur désigné de Baha'u'llah, Abdu'l-Baha. Hollinger utilise une masse de documentations de première main qu'il a déterrée dans les archives publiques et privées. Peter Smith, de l'université de Lancaster, trace le sort d'un périodique baha'i publié à New York dans les années 20, éclairant d'importantes facettes dans l'histoire intellectuelle et sociale de la communauté baha'ie américaine dans cette période formative. William Garlington, issu de l'université nationale australienne, discute en perspective comparée la question de la récente conversion à la Foi Baha'ie par des villageois hindous en Inde du centre, comprenant que les thèmes universalistes dans le mouvement lui permettaient d'agir comme un pont culturel en exprimant les aspirations spirituelles de ceux qui l'embrassait.

Les contributions dans ce volume enjambent l'histoire entière de la Foi Baha'ie, de sa naissance originelle en Iran et en Iraq à travers ses communautés non musulmanes et à d'autres pays et d'autres cultures en Amérique du Nord. La riche source documentaire à laquelle les contributeurs ont porté attention, et les conclusions excitantes qu'ils ont été capables de dresser d'elles, devrait encourager un plus grand intérêt académique dans l'histoire de la Foi Baha'ie. Il est à espérer que ces séries serviront tous ceux souhaitant gagner une meilleure appréciation de l'avancement de l'histoire baha'ie.

Juan Cole
27 juin 1984, Sterling Virginie

Baha'u'llah et les soufis Naqsbandi en Iraq (1854-56)

Beaucoup d'érudits ont remarqué la transformation du mouvement babi du 19ème siècle en la Foi Bahai'e, mais peu ont essayé une analyse rapprochée de ce processus. L'histoire intellectuelle et sociale de la religion babie dans la décennie de 1850 reste largement inconnue. Cela en dépit du fait que ces années servirent comme une période de transition cruciale entre un babisme primitif et le développement de celui-ci, des mouvements azalis et baha'is. Des érudits pionniers comme E.G. Browne avait peu ou rien à dire au sujet de ces années du à la pénurie des sources primaires datant de cette époque lui étant disponibles. Comme nous le verrons plus loin, certaines des choses qu'à dite Browne sont fausses, et ses vues auront besoin d'être révisées à la lumière de nouvelles preuves.

Durant les deux décennies passées, les baha'is en Iran publièrent des ouvrages de grand intérêt par Mirza Husayn Ali de Nur, Baha'u'llah (1817-92) (1). L'un de ceux-ci est un poème en arabe par la fondateur de la Foi Baha'ie intitulé Al-Qasidah al-Warqa'iyyah (ode de la colombe) qu'il écrivit durant son séjour de deux ans (1854-56) dans le Kurdistan irakien. L'ouvrage synthétise les thèmes babis et baha'is, et il représente l'une des déclarations les plus précoce de la théologie mystique de Baha'u'llah. L'analyse suivante vise à contribuer à une meilleur compréhension de la phase première de la métamorphose du babisme en la Foi Baha'ie.

Mirza Husayn Ali, Baha'u'llah, le fils de Mirza Abbas, était né à Téhéran le 12 novembre 1817. (2) Son père, connu comme Mirza Buzurg-i-Nuri, était natif de Nur dans le Mazindaran et ministre à la cour royale. Le jeune Mirza Husayn Ali reçut une éducation privée qui insistait sur le Coran et la poésie persane et dont le but était de le préparer pour une carrière de courtisan. Il refusa cependant de suivre son père dans une carrière à la cour. Comme l'érudit britannique Denis MacEoin l'a souligné, la sensibilité et la disposition pacifique de Baha'u'llah se manifestèrent elles-mêmes dans sa détresse en tant qu'adolescent en lisant l'exécution musulmane du Banu Qurazyah du temps de Muhammad. (3)

En 1844, un jeune marchand de Chiraz nommé Siyyid Ali Muhammad se déclara lui-même être le Bab, une figure dans l'islam chiite dont le 12ème Imam parle. Le premier disciple du Bab, Mulla Husayn Bushru'i, visita Téhéran plus tard dans l'année et envoya à Mirza Husayn Ali un messager pour l'informer des revendications du Bab. Cette mission réussit, et le jeune Mirza entra dans les rangs des babis. Pourquoi Mulla Husayn, ou peut-être même le Bab, choisir Mirza Husayn Ali pour cette attention spéciale reste obscur. Peut-être la figure presque tolstoïenne de ce jeune noble qui rejetaient les ambitions terrestres et s'engagea dans des activités philanthropiques posait un défi irrésistible pour le nouveau mouvement religieux. Le mouvement babi se développa en dehors d'une école du 12ème Imam connu comme le shaykhisme, ainsi appelé après que son fondateur Shaykh Ahmad al-Ahsa'i (mort en 1826), qui contenait des insistances millénaristes. Beaucoup d'importants babis furent convertis du shaykhisme qui vint sous la direction de Siyyid Kazim Rashti, le successeur de al-Ahsa'i, mais ne semble pas avoir été le cas avec la famille de Nur.

Mirza Husayn Ali devint rapidement une figure importante dans le mouvement babi, et il joua de manière croissante un rôle directeur modéré après l'incarcération du Bab en Azerbaïdjan en 1847. Lorsque le Bab se déclara lui-même le Qa'im, le retour messiannique du 12ème Imam, Baha'u'llah organisa une conférence des chefs babis dans le hameau de Badasht pour faire de la publicité de cette revendication et obtenir un consensus à ce sujet. (4) Là-bas, la disciple et poétesse babie, tarihah Qurratu'l-Ayn, scandalisa certains des fidèles en rejetant son voile pour symboliser l'avènement d'une nouvelle dispensation. A cette conférence, Mirza Husayn Ali prit comme son titre babi le nom divin Baha (Gloire). Vers la fin des années 40, des combats éclatèrent entre les babis et les chiites dans le Mazindaran, à Zanjan et à Nayriz. Baha'u'llah n'était pas présent lorsque les troupes du gouvernement assiégèrent le tombeau de Shaykh Tabarsi dans le Mazindaran, où des centaines de babis s'étaient réunis, car les adversaires chiites l'emprisonnèrent dans la ville d'Amul. Ils le libérèrent à la fin, mais ils le dépouillèrent d'au moins certains de ses biens.

La propagation rapide du mouvement babi avec son accent millénariste et l'opposition des établissements de la religion iranienne et du gouvernement que cela provoqua, mena à la perturbation temporaire de parties de l'Iran et le versement de beaucoup de sang - spécialement celui des babis, qui comme civils mal entraînés se retrouvaient face à des hommes combattants professionnels du gouvernement. Dans un décret désespéré de réprimer ces troubles, le gouvernement iranien tua le Bab le 9 juillet 1850. En vengeance de cet acte, un petit groupe éclaté de babis radicaux complota l'assassinat de Nasiri'd-Din Shah. Un babi nommé Sadiq Tabrizi et deux complices perpétrèrent l'attaque le 15 août 1852, mais cela alla de travers lorsque le fusil de Tabrizi eût des ratés. Les soi-disant assassins furent immédiatement arrêtés ou dispersés, mais cet incident amena toute la communauté babie sous la suspicion. Beaucoup furent brutalement exécutés.

Baha'u'llah, retourné récemment de Najf et de Karbila en iraq, était à Afcha près de Téhéran lorsque la tentative d'assassinat eût lieu. Il réalisa qu'il tomberait sous la suspicion en tant que chef babi et se rendit lui-même aux autorités. Ils l'emprisonnèrent pendant 4 mois, mais à la fin le trouvèrent innocent de toute implication avec le complot. ils l'informèrent néanmoins qu'il serait exilé. (5) Tandis qu'en prison, une expérience mystique convainquit Baha'u'llah qu'il était destiné à assumer la direction du mouvement babi. Il choisit par conséquent d'aller en exil en Iraq, qui était, bien que sous la suzeraineté ottomane, un centre important de pèlerinage chiite duquel il pourrait garder le contact avec les événements en Iran avec une relative facilité. Le gouvernement le libéra de son emprisonnement de 4 mois dans le cachot du Siyal-Chal en décembre 1852, et il partit pour l'Iraq le 12 janvier 1853. Le voyage d'hiver fut difficile et son groupe n'arriva à Bagdad que le 8 avril.

Nombre de babis choisirent de suivre Baha'u'llah en exil, comprenant son demi-frère Mirza Yahya, Subh-i-Azal, que le Bab avait désigné comme chef nominal de la communauté babie. Lorsque Mirza Yahya arriva plus tard dans l'année, la petite communauté babie à Bagdad devint rapidement polarisée, et un combat puissant se développa entre Baha'u'llah et son jeune frère. La mort du Bab, le gouvernement défait des forces babies à Zanjan, Mazindaran et Nayriz, et les persécutions d'août-septembre 1852 au réveil de la tentative d'assassinat - tout cela laissa les babis démoralisés, divisés et privée de la plupart de leurs chefs. Mirza Yahya se tenait lui-même à distance de la communauté, passant son temps déguisé et traitant d'affaires par procuration, y compris avec Baha'u'llah. IL y eût une profonde insatisfaction avec le leadership de Mirza Yahya qu'apparemment certains prirent au sérieux. Dans les deux années entre l'exécution du Bab et les persécutions au cours de l'été 1852, beaucoup de demandeurs à la direction du mouvement babi émergea. Mirza Yahya refusa tout d'abord de dénoncer ces revendications sur le coup et ainsi manqua d'endiguer le schisme. (6) Alors que sa position se détériorait, il devint plus désespéré cependant et autour de 1856 il avait assassiné un tel demandeur, Mirza Asadu'llah Khui Dayyan.

Pendant ce temps, dans la période 1853-54, Baha'u'llah fut apparemment en train de conseiller certaines réformes en vue des désastres des 4 années précédentes, contractant ainsi le courroux de babis content avec le statu quo. Découragé par la chamaillerie parmi les babis en Iraq et souhaitant éviter de provoquer encore un autre schisme, il se retira au printemps 1854 dans les montagnes sauvages de Sar Galu, autour de Sulaymaniyyah dans le Kurdistan irakien. (7) Baha'u'llah emmena avec lui à Sar Galu un seul serviteur, Abu'l-Qasim Hamadani, que des voleurs tueront plus tard. Dans les montagnes sauvages, Baha'u'llah vécut la vie d'un homme saint ascète, évitant la société humaine, jusqu'à ce que sa réputation de piété fit qu'un ordre sufi local rentra en contact avec lui. Shaykh Isma'il de l'ordre Nasqbandiyyah Khalidiyyah réussit à implorer Baha'u'llah à venir et à résider dans leur takyah (séminaire) à Sulaymaniyyah, à ce moment-là une ville principalement kurde d'environ 6000 habitants.

Les babis et les naqshbandis représentèrent deux tissus réformistes différents dans la société du Moyen-Orient du 19ème siècle. Ils avaient en commun le désir de se détacher des (accrétions) des siècles passés à la pure foi. Mais tandis que les naqshbandis se contentaient de réformes théologiques et rituelles d'un strict type sunnite de l'Islam, les babis étaient convaincus que rien de moins que l'avènement messianique du Mahdi promis en la personne du Bab ne pourrait remédier aux maux assaillant l'humanité. Le Naqshbandiyyah a souvent été décrit (parfois plutôt de manière romantique et non historique) comme le plus important précurseur de tendances du 20ème siècle envers une plus grande insistance sur l'observance stricte de la loi rituelle dans l'Islam. L'insistance sur un retour aux sources, une adhésion précautionneuse aux diktats de la loi révélée et une solidarité commune contre les non musulmans qui caractérise de tels mouvements modernistes comme les Salafiyyah furent présents à une certaine étendue dans le soufisme naqshbandi bien avant la période moderne.

L'ordre original, fondé par Baha'ud-Din Muhammad Naqshband (1317-1389 ah.d.) en Asie centrale, ne nous concerne pas ici autant que les deux dernières branches de celle-ci. la première de celle-ci se cristallisa autour du penseur indien Ahmad Sirhindi (1564-1624 a.d.) et fut connu comme le Mujaddidiyyah. L'autre dérivait de Abu'l-Baha Diya'u'd-Din Khalid Shahrizuri (mort en 1827) dans le Kurdistan irakien et fut appelé le Khalidiyyah.

Sirhindi, un membre de la cité, une littéraire musulmane, réagit contre le syncrétisme et le laxisme religieux des convertis de la classe populaire à l'Islam de l'hindouisme. Il attaquait aussi l'atmosphère nouvellement syncrétique à la cour d'Akbar et insista sur une plus grande conformité avec la loi islamique. (8) Il écrivit non seulement des polémiques contre le chiisme et l'hindouisme, mais il rejetait la doctrine du monisme existentialisme (wahdat al-wujud) promulguée par l'école mystique de Ibn Arabi. Des musulmans indiens utilisaient l'idée du monisme existentielle pour venir en accord avec l'école védanta de l'hindouisme, Sirhindi, suivant la mystique médiéval de Ala'u'd-Dawlah Simnani, revendiqua que l'unité du cosmos avec Dieu n'est pas un fait objectif avec son lieu d'existence, mais une expérience subjective avec son lieu de perception. Il s'efforça de replacer l'unité de l'existence avec l'unité de perception (wahdat ash-shudud).

Le penseur naqsbandi du 18ème siècle Shah Waliyu'llah de Delhi se dévoua aussi lui-même à la réforme. Tandis qu'il n'opposait pas la doctrine du monisme existentielle, il recommandait une étude plus proche des traditions orales attribuées au prophète. Il discuta pour plus de liberté pour les juges musulmans de pratiquer l'interprétation individuelle (ijtihad) en arrivant à des jugements légaux islamiques, attaquant l'imitation aveugle (taqlid). (9)

Toutes les idées naqsbandis en Inde ne plaisaient pas aux réformateurs musulmans du 20ème siècle de l'école salafie. Sirhindi revendiqua de manière grandiloquente être le renouveau de l'Islam pour le second millénium musulman. Il annonça par la suite qu'il était le Qayyum, l'Homme Parfait à travers qui la grace de Dieu était diffusée. Il sous-estima également l'importance de certains saints soufis du passé. Cela lui causa d'être haï par des sufis de galon moins iconoclaste.

Le réformisme d'idées renaissantes des naqshbandis en Inde eût un impact sur le reste du monde musulman. (10) En particulier, Albert Hourani a démontré de manière perspicace l'influence que le mujaddidiyyah indien avait sur le shahrizuri Shaykh Salid du Kurdistan irakien. (11) Shaykh Salid voyagea en Syrie en tant que jeune homme, mais il retourna bientôt dans le Kurdistan autour du début du 19ème siècle. Un indien sufi résidant là-bas, Mirza Rahimu'llah "Darvish Muhammad" lui conseilla de rechercher la connaissance en Inde. Shaykh Salid prit acte et tandis qu'il rejoignit en Inde plusieurs ordres soufis, comprenant les naqshbandiyyah mujaddidiyyah. A Delhi, il étudia avec le fils de Shah Waliyu'llah, Abdu'l-Aziz Dihlawi. Il voyagea à travers l'Iran sur le voyage retour au Kurdistan, s'engageant dans des débats passionnés avec les chiites qui parfois se terminaient presque par de la violence.

En 1811-1812, Shaykh Salid était en train d'enseigner à Sulaymaniyyah. Il devint embrouillé avec d'autres chefs soufis locaux, certains d'entre eux étaient des shaykhs Qadiris de la puissante famille Barzinji. En dehors de la rivalité entre les Qadiri et les ordres naqshbandis, Hourani suggère deux raisons pour une certaine hostilité montrée à Shaykh Salid. L'une pourrait avoir été son insistance sans compromission de l'application stricte de la loi religieuse face aux pratiques parmi les kurdes. L'autre était la grande suite qu'il gagna et les revendications extravagantes qu'il fit de posséder des pouvoirs mystiques. (12) Le combat atteint son point culminant en 1820 lorsque Shaykh Salid fuit à Damas après avoir perdu une lutte pour le pouvoir avec un chef qadiri. Il vécut à Damas les 7 dernières années de sa vie et mourut là-bas de la peste en 1827.

L'influence de Shaykh Salid survécut à Damas, Sulaymaniyyah et Bagdad. Les soufis naqshbandis dans le Kurdistan se référèrent de manière croissante à eux-mêmes simplement comme le khalidiyyah, et appelèrent Shaykh Salid Mawlana (notre Seigneur). Les membres de plusieurs importantes familles dans le Kurdistan devinrent des naqsbandis khalidi. Les shaykhs soufis dans le Kurdistan semblent avoir augmenté en pouvoir alors que les institutions civiles locales devinrent perturbées de manière croissante. En 1842, Mahmud Pasha, le chef dynastique local de la famille Baban, se soumis aux forces envahissantes de l'Iran Qajar. En 1847, L'Iran abandonna ses revendications à Sulaymaniyyah et la région autour d'elle en faveur des turcs ottomans. En 1850, les turcs déposèrent le dernier des gouverneurs baban, Abdu'lla Pasha, préférant gouverner le Kurdistan de manière plus directe. (13) Au milieu de cette instabilité politique, les ordres soufis pourraient bien avoir fournit des moyens primaires d'intégration sociale. (14)

Le même mélange paradoxal de revendications réformistes et messianiques qui caractérisai et de tels mouvements néo-orthodoxe soufi comme les Naqshbandis caractérisèrent également le shaykhisme et le début du babisme. Les babis, par exemple, tendèrent à attaquer la tradition aveugle (taqlid), comme le fit Shah Waliyu'llah. (15) Denis Mac Eoin a montré dans les premières années, le babisme agit comme un appel au retour à des pratiques plus strictes de la loi musulmane (shari'ah) parmi les chiites du 12ème Imam de l'Iran. (16) Ce fut naturellement avant 1848-50, lorsque le Bab revendiqua publiquement être le Mahdi et révéla une nouvelle shari'ah. (17) La tradition shaykhie-babie critiquait beaucoup d'aspects du soufisme populaire, et comme Sirhindi, rejetait la doctrine du monisme existentielle (wahdat al-wujud). Bien que les naqshbandis eurent tendance à montrer de l'hostilité aux chiites, ils eurent souvent une attitude positive envers les 12 Imams, de telle sorte que souvent la diction très chiite de Baha'u'llah à cet égard ne les auraient pas nécessairement offensés. (18)

Les soufis khalidis connaissaient Baha'u'llah, leur hôte, seulement en tant que le derviche Muhammad-i-Irani et croyait que c'était un reclus. Peut-être pensaient-ils que sa présence parmi eux leur apporterait des barakah (bénédictions). Progressivement cependant, la culture et l'attitude aristocratique commencèrent à le trahir comme quelque chose de plus qu'un ermite de la montagne. Lorsque les soufis attrapèrent la vue de sa superbe calligraphie un jour, ils devinrent convaincus que leur hôte était un homme de raffinement et d'érudition. Ils lui demandèrent de commenter les textes qu'ils étaient en train d'étudier dans leurs réunions de groupes.

Les sources baha'ies que les Khalidis furent alors en train d'étudier Ibn Arabi's Al-Futuhat al-Makkiyyah (les victoires de La Mecque) et que non seulement Baha'u'llah donna un commentaire sur certaines pages, mais il corrigea certaines des vues mystiques du grand andalou. Cela pourrait bien être qu'il objecta sur les idées de Ibn Arabi sur le monisme existentiel. Les sufis naqshbandis pourraient avoir accepté de tels doutes à ce titre, comme cet ordre tenait souvent son unité liée dans l'expérience et la perception, pas dans l'existence. Dans un traité écrit 3 ou 4 ans plus tard pour Shaykh Muhy'd-Din, le magistrat (qadi) de Khaniqayn dans l'Iraq du nord, Baha'u'llah déclara que dans la 7ème vallée, à l'intérieur de laquelle le chercheur atteint l'extinction de la base de l'égo (fana), celui-ci trancende les étapes à la fois de wahdat al-wujud et de wahdat ash-shuhud, les deux un monisme existentielle et expérimental. (19) C'est une preuve que Baha'u'llah connaissait la doctrine Simnani-Sirhindi et il sentit que c'était aussi finalement inapproprié en décrivant la relation entre Dieu et les dévots. En tout cas, la critique de Baha'u'llah du monisme existentiel de la tradition shaykhie-babie était juste un niveau sur lequel le réformisme shaykhi-babi pourrait se retrouvé et se trouver une sympathie les uns des autres.

Shaykh Isma'il, alors chef de l'ordre khalidiyyah à Sulaymaniyyah, fut assez impressionné par les commentaires de Baha'u'llah sur le livre de Ibn Arabi pour demander qu'il compose une ode (qasidah) en pieds et en rime du Poem of the Way d'Ibnu'l Farid (Nazimu's-suluk). (20) Baha'u'llah accèda à sa requête et produisit un long poème de quelques 200 versets. De ceux-ci, il en choisit 127 qui devinrent connus comme Al-Qasidah al-Warqa'iyyah. Baha'u'llah pourrait avoir jeté autant de versets car ils exprimaient trop ouvertement et avec trop de force les sentiments messianiques qu'il avait eu de puis son emprisonnement dans le cachot du Shah. En tout cas, tandis que le poème de Baha'u'llah a beaucoup de similitudes avec l'opus mystique de Ibnu'l-Farid, les insistances millénaristes de la doctrine babie y domine clairement. La fusion du mysticisme soufi avec les enseignements théologiques et eschatologiques babis constitue l'un des traits les plus fascinants de cet ouvrage.

Malheureusement, aucune édition érudite du Qasidah de Baha'u'llah n'existe. Il a été imprimé deux fois à Téhéran, bien que (comme les variantes le montre) de deux manuscrits différents. Aucune information au sujet des manuscrits ne fut fournit par les éditeurs. Cet écrivain a en sa possession en plus une photocopie d'un encore autre manuscrit du poème de la main du secrétaire de Baha'u'llah Zaynu'l-Muqarabbin. Cependant, il n'a aucun chiffrage et il est probablement d'une date plus lointaine. (21) Il semble cependant être supérieur aux autres versions imprimées. Les variantes entre ces versions du poème ne sont pas si nombreuses ou si importantes pour nous empêcher de saisir avec une certaine certitude les contours principaux de l'ouvrage. (22)

Le pied du poème est un tawil (catalectique) irrégulier. Dans certains cas, les traits grammaticaux persans sont transférés en arabe. Mais une autre source des irrégularités pourrait se situer dans la non-observation babie et soufie pour le labyrinthe élaboré de la grammaire classique arabe, qu'ils rejettent en tant qu'obstacle (dry) à l'expression spontanée de la signification mystique. Dans ses 4 vallées (Chahar vadi), écrit seulement quelques années plus tard à Abdu'r-Rahman al-Kirkuki, le chef de l'ordre qadiriyyah à Sulaymaniyyah, Baha'u'llah raconta l'histoire d'un mystique qui part en voyage avec un grammairien. Lorsqu'ils arrivent à la mer de grandeur, le mystique plongea immédiatement dans l'eau alors que le grammairien se sent confus et hésita. Lorsque conseillé par le mystique, le grammairien confessa qu'il ne pourrait l'amener lui-même à avancer. "Puis le savant cria "Oublie ce que tu as lu dans les livres de Sibavayh et de Qawlayyah, de Ibn Hajib et Ibn Malik, et plonge dans l'eau!". (23) Cette sorte de croyance, combinée avec la méfiance babie des hauts ulémas et de leurs outils intellectuels, semble avoir mené Baha'u'llah à aller bien au-delà des limites normales des conventions poétiques. (24)

Al-Qasidah al-Warqa'iyyah est seulement le troisième ou 4ème ouvrage le plus précoce existant de Baha'u'llah d'une telle longueur et d'une telle importance doctrinale, et il se révèlera utile pour discuter des deux premiers morceaux qu'il écrivit comme toile de fond à ce poème. Le premier était aussi un poème Rash-i Ama, qu'il composa dans le cachot du Siyal-Chal à Téhéran où il était emprisonné à la fin de l'année 1852. (25) Là-bas, il entreprit une série d'expériences mystiques très puissantes. Il écrivit beaucoup plus tard :

"Pendant les jours où j'étais confiné dans la prison de Tihran, quoique le poids irritant des chaînes et l'air empesté m'ait laissé peu de sommeil, il me semblait que, dans ces rares moments d'assoupissement, quelque chose s'écoulait du sommet de ma tête sur ma poitrine, ainsi qu'un torrent puissant se précipite sur la terre du sommet d'une montagne élevée. Alors, tous mes membres prenaient feu, et à ces moments-là ma langue prononçait des paroles qu'aucun homme ne pourrait supporter d'entendre". (26)

Dans le poème Rashh-i Ama, Baha'u'llah décrit comment son ravissement (jadhbah) l'a inondé de l'essence inconnaissable de Dieu (ama). C'est un jeu complexe sur les mots, utilisant la terminologie technique soufie. Le mot ama signifie littéralement en arabe nuage, et sa signification théologique dérive d'un rapport oral attribué au prophète Muhammad. Abu Razin al-Uqayli est dit avoir demandé au prophète :

"Où était notre Seigneur avant qu'Il crée les cieux et la terre?"

Muhammad répondit :
"Dans un nuage, au-dessus duquel était l'air et au-dessous duquel était l'air". (27)

Du temps de Abdu'l-Karim al-Jili (1365-1428 a.d.), le mot avait des associations philosophiques importantes et mystiques pour l'école de ibn Arabi. Dans son Al-Insan al-Kamil (l'Homme parfait), al-Jili décrit ama comme le niveau le plus élevé de l'essence divine qui est au-delà à la fois de la réalité absolue (al-Haqq) et de la création (al-Khalq). (28)Le système al-Jili était un système moniste dans lequel l'existence de Dieu était la seule existence. Cet être ou essence avait crée des modes et des modes réels absolument qui correspondent à l'univers de Dieu comme conçu dans les systèmes dualistes Le plus élevé des modes réels (haqqi) était l'unicité (ahadiyyah), à l'intérieur desquels tous les noms et tous les attributs divins disparurent et furent non manifestés. Néanmoins, l'étape de l'unicité reste le pénultième dans laquelle Dieu se manifeste encore lui-même (tajalli, zuhur) comme exaltation (ta'alli). Le nuage ou ama, cependant est l'essence absolue - ni la réalité ni la création, ni l'exaltation ni la dénégation - à l'intérieur duquel Dieu est caché à tout jamais.

Ainsi, bien que Baha'u'llah rejetait le monisme existentielle des soufis comme al-Jili, il employa le terme ama pour indiquer les profondeurs complètement inconnaissables de l'essence de Dieu. Depuis que le mot signifie nuage, il se réfère à l'arrosage (rashh) du nuage de l'essence divine que son propre état d'extase mystique précipita tandis qu'il languissait dans la Fosse noire (ligne 1). Ce même ravissement attira le regard du bien-aimé divin et l'amena en la présence de Dieu (ligne 4). Cela sert comme un signal pour le souffle de la trompette qui indique l'avènement du Jour de la Résurrection (ligne 6) ou le Jour de Dieu (ligne 9), amené par le Promis ou la "nouvelle Beauté" dans Ta (la désignation babie pour Téhéran).

Il semble clair que dans ce poème, lorsqu'il se trouvait enchaîné dans la Fosse Noire, Baha'u'llah fit allusion à son prémonition qu'il avait un rôle spécial à jouer en revigorant le mouvement babi. Cette allusion était cependant plus dans la nature d'une vague indication qu'une revendication franche. Que Baha'u'llah eût une indication en 1852 de son futur rôle de chef est confirmé dans ses derniers écrits. Il écrivit que ce fut à la fin de 1852 qu'il se détermina à réformer la religion babie et instiller une nouvelle vitalité dans la communauté démoralisée". (29)

Dans son poème également, Baha'u'llah mentionne pour la première fois sa houri (huri), une des figures angéliques féminine dite habiter dans le paradis par le Qu'ran. (30) Il vit ce visage en visions, et il l'identifia plus tard comme le transporteur de la révélation divine. (31)

Il adressa apparemment aussi sa Al-Qasidah al-Warqa'iyyah à elle. Des mystiques musulmans s'adressent souvent à Dieu comme une bien-aimé féminine, suivant les conventions de la poésie d'amour, mais cela semble être un rare cas où le principe de la révélation lui-même est décrit comme féminin. Pour Muhammad, l'ange de la révélation avait été la figure male, Gabriel. La houri de Baha'u'llah rappelle ici la Béatrice de Dante.

Dans son second ouvrage exista nt, Lawh-i-Kull at-Ta'am (la Tablette de toutes les nourritures), Baha'u'llah explora une série de royaumes métaphysiques. Cet extrait est un commentaire du verset coranique :

"Toute la nourriture était légale aux enfants d'Israël sauf ce que Israël lui interdit avant que la Torah fut révélée". (3:93).

Mirza Kamal'ud-Din Naraqi, un babi qui avait rencontré le Bab à Kashan, demanda ce commentaire de Baha'u'llah au cours de 1853, lorsqu'il était à Bagdad. Naraqi avait anciennement cherché un commentaire du verset de Mirza Yahya, Subh-i-Azal, mais il fut si déçu de la réponse qu'il se tourna vers Baha'u'llah pour une réponse plus satisfaisante.

Cet épisode pourrait avoir été une partie dans lequel les croyants se serraient montrés mécontents de manière croissante avec la direction de Mirza Yahya. L'intensité mystique de Baha'u'llah et sa personnalité charismatique lui rendait l'alternative évidente, malgré le chagrin de son plus jeune demi-frère, dont la propre extrême réserve, la prudence et les méthodes conspiratrices furent à blâmer pour la désaffection de nombre de ses disciples. Après l'indication de Baha'u'llah en prison de son appel messianique, il pourrait avoir été tenté d'affirmer ses propres revendications à la direction. Cependant, il semble avoir été craintif de provoquer un schisme important. En tout cas, il différa une proclamation publique de ses revendications d'être le "retour" spirituel du Bab jusqu'en 1864 à Edirne, bien qu'il fit connaître ses revendications à un petit groupe de proches disciples en avril 1863 à Bagdad. (32)

Dans la Tablette de toutes les nourritures, Baha'u'llah écrit une exégèse figurative expliquant la signification mystique du mot nourriture dans le verset du Qu'ran cité ci-dessus. (33) Il dit que tout d'abord elle se réfère au trône de hahut. Ce terme indique une station (maqam) d'unité divine inaccessible à la compréhension humaine. Il dit que les aspects ésotériques et exotériques de cette station sont identiques. Hahut est formée selon le même modèle syriaque comme des mots plus familiers tels que nasut (humanité) et il dérive probablement de la lettre Ha, qui représente huwiyyah, ou la propre identité de Dieu. Dans la station suivante, lahut (divinité), la phrase "Il est Dieu, il n'y a pas d'autre Dieu que Lui, s'applique. Cela se réfère à l'unité et à l'unicité de Dieu, et seuls les adorateurs les plus purifiés et les plus saints peuvent comprendre cette station. Dans la station suivante la plus basse, jabarut (le royaume de l'autorité divine), la phrase "Vous êtes et Il est". Sur ce plan, les prophètes pourraient utiliser un langage théopathique, s'identifiant eux-mêmes avec Dieu au niveau de Ses attributs. Puis arrive la station de malakut (le royaume du pouvoir divin) qui est habité par ces des serviteurs de Dieu qui sont détachés eux-mêmes des richesses du monde matériel. Au niveau le plus bas subsiste la station de nasut (humanité), Baha'u'llah décrit l'univers comme une hiérarchie de stations. La plus basse est celle de l'humanité pure, mais les êtres humains peuvent atteindre ou comprendre des plus hautes stations de saints ou prophètes, tandis que les plus hautes, hahut, restent impénétrables à tous sauf à Dieu. Cette sorte de schéma caractérisait souvent les ouvrages soufis. (34)

Les stations de Baha'u'llah différaient ainsi des graduations al-Jilies dans l'essence divine, depuis que Baha'u'llah rejetait le monisme existentiel. Il envisageait les stations ci-dessus hahut comme des niveaux de la création de Dieu, mais non comme des manifestations de l'essence divine elle-même. En fait, la tradition chaykhie-babie s'opposait aux théeories soufies de l'unité de l'être du temps du fondateur du mouvement lui-même. Shaykh Ahmad al-Ah'sai composa une attaque spirituelle sur cette idée comme développée par l'école de al-Jili intitulée Ayn al-Yaqin (les Yeux de la Certitude). (35) Baha'u'llah lui-même écrivit souvent que même les dévoués mystiques et les prophètes étaient incapables de contempler Dieu ou d'appréhender Son Essence. (36)

En se tournant vers la Al-Qasidah al-Warqa'iyyah, nous trouvons que se idées théologiques et métaphysiques, son millénarisme, et sa vision de la jeune fille céleste, la houri, ont tous profondément affecté le contenu et même la structure du poème. Comme Ibnu'l-Farid Nazmu's-Suluk, l'ode de Baha'u'llah consiste à la fois en un dialogue et un soliloque. Mais pour le premier, Ibnu'l-Farid minimise les éléments du dialogue, en particulier une fois que les revendications mystiques aient atteint l'union avec le Bien-Aimé. Dans l'ouvrage de Baha'u'llah, le dialogue continue pendant toute la durée de l'ode, et cela reflète partiellement une position théologique. Depuis que la théologie de Baha'u'llah exclut le (sort) de l'union essentielle entre le mystique et Dieu que des soufis à laquelle Ibnu'l-Farid et Ibn Arabi crurent, son poème conserve une structure plus dialoguiste.

Le "Poem of the Way" de Ibnu'l-Farid chute dans 3 sections. Dans la première, le poète délivre un panégyrique de son divin Bien-Aimé, avec beaucoup de vantardise de comment il a souffert pour elle, et se plaint de ses calomniateurs qui ont diffamé sur elle. Dans le second, elle répond brièvement du fait qu'il a oublié son propre amour par passion pour elle, et qu'il doit sacrifier sa vie même pour suivre son sentier. Dans la très longue troisième section, qui comprend le plus gros du poème, il déclare son volonté de mourir pour elle et même son côté indigne d'obtenir l'union avec elle à un tel prix dérisoire. Il se dépeint lui-même comme entièrement un avec sa bien-aimé, que lorsqu'elle parle, c'est lui qui parle. IL dit qu'il prie, seulement pour trouver que c'est à lui-même qu'il est en train de prier. Tandis que Ibnu'l-Farid rend clair qu'il ne jouit pas constamment d'un état d'union bienheureux, le poème de Baha'u'llah n'atteint jamais réellement cette apogée de tout. Dieu reste complètement transcendant; le plus qui peut être accomplit est d'arriver en la présence de Dieu (liqa'u'llah) qui est la présence de Ses attributs plutôt que Son essence totalement inconnaissable.

Cette ode babie a 5 parties. Elle commence avec la louange de Baha'u'llah du divin Bien-Aimé (lignes 1-16), qu'il décrit comme un être céleste féminin dont la beauté transcende la beauté elle-même. Une apostrophe d'elle suit (ligne 17-36), dans la quelle il parle de son amour, se plaint amèrement de sa séparation d'elle, et plaide pour l'union. Dans sa première réponse (lignes 37-61), elle lui fait des reproches pour sa présomption, insiste sur son exaltation, l'accuse de se méprendre aux attributs limités pour son essence illimitée, et l'appelle à rechercher le martyr dans son sentier. Dans sa seconde apostrophe à elle (lignes 62-97), Baha'u'llah se défend lui-même de ses accusations. Il déclare qu'il désire souffrir toutes les épreuves qu'elle énumérerait et se plaint en longueur des tribulations qu'il a déjà subi pour elle. Il revendique avoir atteint un point où son être lui-même fut annihilé et il atteignit sa présence. Dans sa réponse finale, qui finit le poème (lignes 98-127), elle lui conseille d'aller au-delà de la vérité limité qu'il a trouvé. Elle l'accuse de comparer ses propres imaginations avec la réalité et l'appelle en fin à déchirer les voiles obscurcissant sa vision.

Beaucoup de ces échos se trouvent dans l'ode de Ibnu'l-Farid, mais ces similitudes ne devraient pas obscurcir les différences réelles de point de vue et même de théologie entre elles. En dehors du fait que Baha'u'llah ne revendique jamais avoir accomplit plus qu'un regard à sa bien-aimée, quelque chose qui dans les revendications de Ibnu'l-Farid dans la première partie de son poème et qui va bien au-delà dans le troisième, il y a une insistance millénariste dans le premier auteur qui est complètement absente dans le second. Baha'u'llah se sent torturé, non simplement par son éloignement de son bien aimé, mais également à cause de son secret messianique. De plus, sa bien-aimée n'est pas simplement une vision mystique, mais c'est une figure eschatologique annonçant l'apocalypse.

Al-Qasidah al-Warqa'i'yyah commence par décrire le chemin d'une mine scintillante, dont la splendeur éclipse tous les soleils, serait l'auteur. D'elle, le parfum de l'essence transcendante de Dieu (ama) se diffusa et son exaltation elle-même exaltée et très haute. Elle est l'intermédiaire entre la divine essence inapprochable et le monde de l'humanité. Mais en plus, elle annonce le Jour de la Résurrection, sonnant la trompette que le Qu'ran prédit, signalera l'avènement du Jour de Dieu. (ligne 4).. L'auteur se lance ainsi dans une lamentation plus conventionnelle sur son éloignement de sa bien-aimée. Tous les yeux qui n'avaient jamais pleurés ont été les propres pleurs du poète pour sa réussite.

Elle a rencontré ses supplications avec un reproche brutal cependant, et lorsqu'il lève ses bras vers elle, elle répond avec une épée.

Le poète s'adresse maintenant à elle, l'engageant à se sacrifier lui-même entièrement pour l'amour d'atteindre sa présence et plaidant avec elle de ne pas publier au dehors le scandale de son amour obsessionnel pour elle (ligne 17). Il l'exalte comme celle à travers la théophanie (zuhur) de toutes les créatures vinrent à l'existence et à travers qui le poète lui-même fut ressuscité. Il l'appelle à finir son long exil, et se lamente en hyperbole de la férocité des flammes du désir qui ont consumé son coeur et le volume des pleurs qu'il a déversé (ligne 26).

Non seulement elle manque de récompenser son amour, mais des calomniateurs l'entoure et leur vanité jubilatoire le détruise presque. Il se plaint qu'il n'a plus depuis longtemps eu quelque soutien et qu'ils l'ont humilié à la dégradation la plus basse (lignes 28-33).

Ces commentaires, tandis que c'est un élément classique dans une telle poésie, sont aussi autobiographiques. Le sort d'attaques personnelles sur son intégrité et sa sincérité qu'il déplore dans ce poème à la fin précipita son retrait dramatique de la communauté babie à Bagdad. Les accusations d'incroyance (kufr) contre lui, qu'il ajoute à ses indignités, reflète les attaques musulmanes sur le babisme et peut-être les attaques sur lui par les partisans de Azal.

La houri répond à sa plainte avec une hautaineté froide. Elle lui ordonne d'être silencieux, lui rappelant qu'il n'est par aucun moyen le plus éminent de ses soupirants, et que nul d'entre eux n'a encore réussit à s'unir lui-même avec elle. L'arrière-plan chiite de l'auteur est apparent dans son choix de métaphore lorsqu'elle lui dit qu'il est juste un autre Husayn ou Ali et qu'il n'aura pas plus de chance avec elle qu'eux (ligne 38). Elle se vante que Moïse se pâma, abasourdi à son regard, qui égala aussi le Sinaï (voir Qu'ran 7:143). L'annonce de sa Cause (amr) provoqua la résurrection de toutes les âmes et la revivification des vieux os (ligne 47). Dans son discours, elle insiste sur les thèmes de l'absolue transcendance de la divinité et de l'apparition d'une théophanie apocalyptique qui provoque une résurrection spirituelle. L'idée que la résurrection serait spirituelle plutôt qu'un évènement physique une nouvelle fois ramènent aux enseignements de Shaykh Ahmad al-Ahsai. (37)

Sa bien-aimée réprimande maintenant Baha'u'llah, l'accusant de donner son coeur à un autre faux amoureux. Elle affirme qu'il a désiré ses relations, ses noms et ses attributs, ayant ainsi essayé de la décrire "elle-même (nafs). Mais elle rejette tous les autres attributs comme une limitation de son essence illimitée et en fait, comme un péché de sa part (ligne 54). En gardant l'idée que Dieu transcende tous les attributs et que le coeur humain et l'esprit humain ne peuvent l'atteindre, elle accuse le poète d'un attachement à ces seuls attributs. Comme beaucoup de théologiens chiites, Baha'u'llah suivit la tradition Mutazalite de nomalisme qui dénie la réalité indépendante des attributs essentiels de Dieu. (38) La bien-aimée lui ordonne de verser son sang avant qu'elle n'accepte son gage de fidélité (ligne 58), impliquant que seul par la mort de soi-même et atteignant le fana, il pourrait aller au-delà d'une concentration sur les qualités phénoménales. Cette réponse ressemble dans certains cas à celle de la bien-aimée dans le poème de Ibnu'l-Farid. Ele accuse aussi son prétendant de l'avoir trahie et lui conseille d'annihiler complètement son égo, atteignant ainsi fana. Mais le "péché" de Ibnu'l-Farid est décrit comme une répugnance à mourir lui-même avec elle, alors que la "faute" de Baha'u'llah tient du fait qu'il pense que sa bien-aimée pourrait être imaginée.

Baha'u'llah se défend maintenant lui-même contre les accusations d'infidélité portées par la houri. Il exprime son désir d'être sacrifié pour elle, de souffrir chaque oppression et chaque indignité. Il identifie son triste sort avec celle des figures saintes et celles des prophètes du passé (lignes 72-74), incluant le prophète non coranique Isaïe, une référence qui annonce la familiarité avec la Bible. Il ne confine pas sa liste à des figures masculines; il compare ses tristesses à celles de Eve comme à celles de Marie. Il étaye sa revendication mystique que toutes les adversités ont débordée de ses propres tribulations par une référence clairement autobiographique où il parle des cicatrices des fers sur son cou et sur ses genoux (ligne 81). Ceci était le résultat des mois qu'il passa enchaîner dans le cachot du Siyal-Chal.

Puis il arrive au vrai point culminant du poème dans lequel il dit que son esprit est parti, que son coeur a été fondu et que sa propre âme elle-même (sirr) s'est évaporée de par la sévérité de ses tribulations. Sans ces facultés vitales, il existait, dérouté de sa survie continue. Ayant atteint cet état d'auto effacement, il monta dans la solitude la plus complète, atteignant finalement l'essence de sa présence en son âme intérieure. Il affirme avec défi qu'il l'a vit en fait comme elle était réellement. Si cela était vrai, lorsqu'elle l'accusait qu'il a décrit ses attributs, ce fut seulement parce qu'il les voyait apparaître d'elle (ligne 89).

Baha'u'llah fixe le temps de son expérience mystique de la présence de Dieu et sa mort à lui-même durant son emprisonnement dans le Siyal-Chal à Téhéran. Son langage évoque de manière délibéré les expériences mystiques du prophète Muhammad. Il dit par exemple, qu'il monta (arajtu) pour rencontrer Dieu, faisant ainsi écho à l'ascension (mi'raj) de Muhammad de Jérusalem aux paradis les plus hauts. Il dit que cela ne fait rien qu'il soit à présent banni (signifiant probablement son exil de l'Iran à l'Iraq) car il a atteint la lumière la plus exaltée le jour où Dieu lui donna sa mission prophétique (bi'thah). Il revendique avoir répliqué spirituellement au voyage miraculeux de Muhammad à Jérusalem et dit que son hijrah, ou émigration, fut à Téhéran (lignes 87-92). En rétrospective, il semble clair que Baha'u'llah est ici en train de discuter des expériences qui l'amenèrent finalement à se proclamer lui-même une Manifestation de Dieu. De tels parallèles aux propres expériences mystiques de Muhammad abondent dans les ouvrages soufis. Mais, étant donné que beaucoup de chefs babis étaient en train de faire des revendications extravagantes dans les années 1850, l'utilisation de Baha'u'llah d'une telle terminologie pourrait en fait indiquer sa vue de sa propre station.

Le dénouement de l'ode arrive dans la seconde réponse de la bien-aimée. Dans celle-ci, elle conteste à nouveau ses protestations, lui conseillant d'oublier tout ce qu'il a connu et adoré. Le monothéisme et le polythéisme sont la même chose pour elle, dit-elle, indiquant qu'à la fois les théologies sont attribuées sur l'attribution à Dieu par les qualités d'êtres humains comme l'unité et la pluralité, alors que l'essence de Dieu reste sanctifiée au-delà de tout attribut. Elle admet avec condescendance que sa description de sa vision d'elle était vraie, mais la rejette come une vérité pour les enfants (fityah) ou pour ses sujets (ra'i'yyat). Elle affirme qu'elle continue à être purifiée au-delà de toute description. Elle lui conseille d'abandonner les attributs et lui rappelle que dans ses yeux, les être humains ne perçoivent même pas les attributs qu'ils voient, prenant la tyrannie pour la justice et la folie pour la sagesse. Elle répète son accusation qu'il est en train d'adorer sa propre fantaisie (wahm) et l'averti qu'en préférant son propre ouvrage, il doit perdre le sien. Il s'est détourné de son visage, bien qu'il fût en train d'avancer vers elle.

Les quelques dernières lignes de l'ode abandonnent soudainement ce ton chaste et insiste plutôt sur les potentialités impressionnantes du poète. Si seulement il pouvait, sans donner d'indication, déchirer les voiles de la "proximité", elle fait allusion qu'il deviendrait privé d'un secret secouant le monde. Elle implique que si il saisit qu'il n'était pas aussi près d'elle qu'il le pense, il serait capable de transcender sa compréhension normale et d'être témoin de la sainteté qui existait à l'intérieur de lui. Elle l'averti avec précaution de garder le secret qu'il n'avait ainsi pas découvert, car sa simple révélation pourrait annihiler l'univers du battement d'une paupière (lignes 118-24). Cela semble se référer à l'indication personnelle de Baha'u'llah de l'inspiration directe de Dieu.

L'ode se termine avec une série de béatitudes, dites par la figure de la bien-aimée. Elle appelle des bénédictions à ceux qui ont persévéré et qui ont atteint sa présence, ses amoureux qui ont versé leur sang dans son sentier (elle rappelle ici les milliers de babis qui moururent de 1848-1852) et les sincères qui se sont hâtés à l'ombre de sa divinité.

Ce poème déverse beaucoup de lumière sur le développement des idées religieuses de Baha'u'llah. Celui-ci, pris ensemble avec ses premiers ouvrages, démontrent de manière concluante qu'il avait des indications de sa mission en tant que réformateur du mouvement babi à une date très précoce. C'est important car il y a encore une controverse sur la relation de Baha'u'llah avec Mirza Yahya à cette période. Les disciples de ce dernier, appelés azalis, accusèrent plus tard Baha'u'llah qu'il n'ait considérer de faire une revendication de lui-même d'être le successeur du Bab jusqu'au début des années 1860, devant le nombre croissant de tels demandeurs. (39)

Il y a aussi une certaine controverse au sujet des circonstances du retour de Baha'u'llah de Bagdad à Sulaymaniyyih. Au tout début de 1856, les nouvelles de la mort de Abu'l-Qasim Hamadani étaient parvenues à Bagdad. Depuis que Hamadani avait disparu au même moment que son maître, sa mort dans les environs de Sar Galu donna à la petite communauté babie une indication où se trouvait Baha'u'llah lui-même. A ce moment également, des rapports avaient commencé à revenir d'un mystérieux ascète connu comme le derviche Muhammad-i-Irani qui fréquentait cette région. Les babis confluèrent avec justesse que ce devait être Baha'u'llah.

Durant l'absence de ce dernier, Mirza Yahya avait continué les politiques militantes échouées à la fin des années 1849 et au début de celles de 1850. Il envoya Mirza Aqa Jan, un babi dans le Mazindaran avec la mission de provoquer un autre attentat sur la vie de Nasiri'd-Din Shah et il avait avec lui des bandits qui passaient leurs vies à voler les riches pèlerins de Karbila. (40) Le frère de Baha'u'llah, Aqa Kalim, fut peiné de la situation de la communauté babie à Bagdad et sentit qu'il était impératif du retour de Baha'u'llah de son exil qu'il s'était imposé. Il envoya par conséquent son beau-père arabe, Shaykh Sultan, pour trouver Baha'u'llah et de le faire revenir.

A ce moment-là, même Mirza Yahya voulait que son demi-frère revienne, bien que les raisons restent obscures. Il était à une période face à plusieurs défections et des demandeurs rivaux à la direction, et peut-être il sentait que Baha'u'llah pourrait être persuadé de prêter une partie de son propre prestige à sa direction déclinante en le soutenant. Shaykh Sultan, par conséquent, apporta à Baha'u'llah des lettres de plusieurs des membres de sa famille, comprenant Mirza Yahya, plaidant pour son retour. Baha'u'llah, craignant que la communauté babie se désagrège complètement, s'accorda pour retourner avec Shaykh Sultan à Bagdad. Ils arrivèrent le 12 Rajab 1272/19 mars 1856. (41)

En 1862, Baha'u'llah lui-même fit allusion à l'épisode de Sulaymaniyyih. Il dit que peu de temps après son exil à Bagdad, il se retira dans le désert pendant 2 ans, où il demeura pour la plupart dans la solitude. Il ajoute :

"Nous ne savions pas cependant que les mailles de la destinée divine dépasse les plus grandes des conceptions mortelles, et la flèche de Son décret transcende les plus audacieux des desseins humains. Personne ne peut échapper aux pièges qu'Il met en place...Nôtre retrait n'envisageait aucun retour et nôtre séparation n'espérait aucune réunion. Le seul objet de notre retrait était d'éviter de devenir un sujet de discorde parmi les fidèles... et pourtant, chaque personne complotait après son propre désir et poursuivait sa propre fantaisie malade jusqu'à ce que l'heure arrive, de la [source du commandement] (masdar-i amr), arrivent alors les assignations nous ordonnant de retourner d'où nous venions.. Remettant notre volonté à celle de Dieu, nous nous soumîmes à Son injonction". (42)

Plus tard, des azalis comme Aqa Khan Kirmani insista que Baha'u'llah retourna de Sulaymaniyyih en 1856 sur l'ordre de Mirza Yahya, et qu'il se considérait lui-même sous l'autorité de ce dernier à ce moment-là. (43) Depuis qu'une lecture rapprochée de Al-Qasidah al-Warqa'i'yyah montre que Baha'u'llah était déjà convaincu de sa mission réformatrice lorsqu'il était à Sulaymaniyyih, il est peu probable qu'il se sentit quelque devoir particulier d'obéir à son plus jeune demi-frère. C'est plus probable qu'il était en train de répondre aux appréhensions de son fidèle frère Aqa Kalim au sujet de la communauté. Baha'u'llah lui-même semble avoir vu la mission de Shaykh Sultan comme une partie des "mailles de la destinée" - un signe que Dieu voulait qu'il revienne. Depuis que E; G. Browne accepta la version (tardive) azalie de ces évènements, son évaluation de la relation entre Baha'u'llah et Mirza Yahya aurait besoin d'être révisée à la lumière de cette nouvelle preuve.

Baha'u'llah continua à être respecté et révéré par beaucoup de soufis dans le Kurdistan après son retour à Bagdad, et il correspondait avec certains d'entre eux. Une tradition orale parvint à Balyuzi qui même reliait Baha'u'llah (le derviche Muhammad, ou Ishan) avec Shaykh Khalid lui-même, bien que cela soit chronologiquement impossible. (44) Des mémoires de lui semblent ainsi survivre même aujourd'hui.

La capacité de Baha'u'llah à adapter les idées babies et les (motifs) aux conventions soufies n'est pas remarquable en vue de l'influence profonde que les ouvrages soufis avaient sur la culture persane et la littérature en dépit de la suspicion chiite des ordres soufis. (45) Des iraniens aristocrates tels que Baha'u'llah étaient élevés dans les classiques soufis, comme le Mathnavi de Rumi et le Mantiq at- Tayr (le langage des oiseaux) de Attar. (46) De plus, le soufisme expérimentait une résurrection au début du 19ème siècle en Iran, dû spécialement aux efforts de chiites Ni'matu'llahis. (47) Le soufisme jouissait d'une grande faveur dans les cercles de la cour de Muhammad Shah (règne de 1834 à 1848), de laquelle la famille de Baha'u'llah formait une partie. (48) Baha'u'llah fut ainsi capable d'utiliser ces conventions en leur donnant un nouveau parfum avec le millénarisme et les insistances transcendalistes de la théologie babie.

Plus important, en exprimant les idées babies dans le contexte soufi, Baha'u'llah fut capable de comprendre sa conviction croissante que seule une nouvelle concentration de spiritualité interne pourrait revigorer le babisme. La période de Baha'u'llah parmi les Khalidiyyah coïncidait avec ce développement de la structure et de la diction d'une nouvelle idéologie. Il replaça le militantisme désastreux des babis auquel des chefs comme Mirza Yahya étaient encore engagés avec une insistance sur la transformation personnelle interne identique à l'éthique soufi et au mysticisme. A travers ses écrits grandement persans dans cette veine, il commença lentement à construire sa propre suite parmi les babis d retour en Iran.

Après son exil à Edirne en Roumélie vers la fin 1863, et 10 ans après son retrait à Sulaymaniyyih, il commença à envoyer des lettres en Iran annonçant qu'il était le retour spirituel (ra'jah) du Bab. En 1867, il brisa de manière décisive avec les azalis. Dans les années suivantes, la grande majorité de tous les babis donnèrent leur allégeance à Baha'u'llah, devenant baha'is. L'exil de Baha'u'llah à Edirne et ensuite en Palestine en 1868, le forcèrent à commencer à s'adresser sur les questions sociales et les thèmes réformistes qui étaient alors d'un grand intérêt pour les populations de la Méditerranée économiquement plus développées de l'Empire Ottoman. (49) Ces questions sociales - telles que le constitutionalisme, la course aux armements, et le triste sort des classes inférieures - complétèrent mais ne remplacèrent pas tout à fait les thèmes mystiques des premiers ouvrages de Baha'u'llah produits en Iraq. La religion fondée par Baha'u'llah avait sa genèse dans ce dernier pays dans les années 1850, et les insistances soufies de cette période précoce laissèrent une marque indélébile sur ses écrits.


* Notes:

1 Voir spécialement, volume IV del'anthologie de Abdu'l-Hamid Ishraq-Khavari Ma'idaht-i asmani (Téhéran : Baha'i Publishing Trust, 1963-4, 9 volumes) et Baha'u'llah Athar-i qalam-i a'la III (Téhéran : Baha'i Publishing Trust 129 b.e;/1972-73) pour des ouvrages composés dans les années 50 et début 60.

2 La source principale la plus importante pour la vie de Baha'u'llah est l'histoire par Muhammad-i Zarandi, Nabil-i-Azam, l'original de celle-ci n'a jamais été publié. Un manuscrit autographe existe aux Archives Internationales Baha'ies à Haïfa. De cela une traduction partielle fut faite : The Dawn-Breakers traduit par Shoghi Effendi (New York : Baha'i Publishing Commitee, 1932). Le fils de Baha'u'llah, Abdu'l-Baha Abbas, écrivit une histoire qui fut éditée et traduite par E.G. Browne A Traveller's Narrative (Cambridge : University Press, 1891). Populaires mais encore utilisées comme sources secondaires comprennent Adib Taherzadeh The Revelation of Baha'u'llah (Oxford : George Ronald, 2 volumes, 1974-76) et l'ouvrage le plus érudit par Monsieur H.M. Balyuzi Baha'u'llah : The King of Glory (Oxford : George Ronald, 1981).

3 Voir Denis MacEoin "The concept of Jihad in the Babi and Baha'i Movements", manuscrit non publié, 1979, pages 36-37, où il cite un passage dans le Isharaq-Khavari, éd., Ma'idahy- asmani VII, page 136.

4 Mirza Husayn Hamadani The Tarikh-i-Jadid traduite par E.G. Browne (Cambridge : University Press, 1893), pages 241-44. Pour le contexte de ces èvenements, voir l'analyse socio-historique d' Abbas Amanat, "The Early Years of the Babi Movement : Background Developpment", phD.Diss. (Oxford) 1981); et Denis MacEoin, "From Shaykhism to Babism : A Study in Charismastic Renewal in Shi'i Islam", ph.D.Diss. (Cambridge).

5 Kazem Kazemzadeh et Firuz Kazemzadeh, "Baha'u'llah's Prison Sentence : The official Account', World Order, 13 (Winter, 1978-79), pages 11-13.

6 Hamadani Tarikh-i-Jadid pages 384-96.

7 Pour la résistance babie aux réformes de Baha'u'llah, voir Hasht Bihisht cité dans A Traveller's Narrative II, pages 356-357. Pour la chronologie fausse de Algar de cette période, voir Hamid Algar Mirza Malkam Khan : A Study in the History of Iranian Modernism (Berkeley et Los Angeles : université de la presse californienne, 1973) , page 58, où il dit de manière erronée que Baha'u'llah était dans le Kurdistan.en 1859.

8 Voir Shaykh Ahmad Sirhindi Intikhab-i maktubat édition et introduction Fazlur Rahman (Karachi : Iqbal Academy, 1968) et badru'd-Din Sirhindi Hadarat al-quds (lahore : Panjab Awqaf department, 1971). Pour une analyse, voir Saiyid Athar Abbas Rizvi Muslim Revivalist Movements in North India in the Sixteen and Seventeenth Centuries (Agra : presse universitaire, 1965) pages 202-313 et K.A. Nizami "Naqshbandi Influence on Mughal Rulers and Politics", Islamic Culture 39 (1965), pages 41-52.

9 Voir Shah Waliyu'llah ad-Dihlawi Hujjatu'llah al-Balighah (Lahore : Al-Maktabah as-Salafiyyah, 1979, 2 volumes), I: 154-161 et Muhammad Daud Rahbar, "Shah Wali Ullah et Ijtihad", Muslim World 48 (1955) 346-358.

10 E.g., John Voll, "Muhammad Hayya al-Sindi et Muhammad ibn Abdu'l-Wahhab : An Analysis of an Intellectuel Group in Eighteenth Century Medina", Bulletin of the School of Oriental and African Studies 38 (1975), pages 32-39.

11 Albert Hourani "Shaykh Salid and the Naqshbandis order" Islamic Philosophy and the Classical Tradition : Essays presented to R. Walzer (Columbia : University of South Carolina Press, 1972), pages 89-103. Voir aussi Abdu'r-Razzaq al-Bitar Hilyat al-Bashar fi tarikh al-qarn ath-thalith ashar (Damas : Majma al-Lughah al- Arabiy-yah bi Dimashq, 1961)I : 570-587 et Abdu'l-Majid al-Khani al-Hada'iq al-wardiyyah fi haqa'iq ujala an Naqshbandiyyah (Le Caire : Dar at- Tiba'ah al-Amirah, 1308/1890, page 223ff.

12 Hourani "Shaykh Salid", page 96; al-Bitar Hilyat al-bashar, I:580.

13 V. Minorsky, "Sulayimaniya" Encyclopaedia of Islam première édition (Londres : Luzac and Co., 1934) 3: 537.

14 Hourani "Shaykh Salid", page 99. Voir Balyuzi Baha'u'llah page 124n pour les relations de Baha'u'llah avec Abdu'llah Pasha Baban à Bagdad. l'identification de Balyuzi d'un siyyid Da'udi avec le naqshbandi khalidi Da'ud al-Baghdadi est (tenuous). Pour al-Bagdadi, voir Umar Rida Kahhalah Mu'jam al-mu'alifin (Damas : Taraqi Press, 1957), 4: 136-137.

15 Voir e.g, Baha'u'llah Haft vadi Athar-i qalam-i a'la, III, page 96; anglais traduit par Ali Kuli Khan et Marzieh Gail The Seven Valleys and the Four Valleys (Wilmette, III, : Baha'i Publishing Trust, 1971), page 5..

16 Voir Denis MacEoin "From Shaykhisme to Babism", chapitre 5 et 6.

17 Pour les raisons importantes dans le mouvement babi-bahai', voir Peter Smith, "Motif Research: Peter Berger and the Baha'i Faith", Religion 8 (1979), pages 210-34.

18 Hamid Algar "Some Notes on the Naqshbandi Tariqat in Bosnia" Die Welt des Islams N.S. volume XIII (1971) page 194.

19 Baha'u'llah Haft vadi Athar III, page 133; Seven Valleys page 39.

20 Umar ibn Ali Ibnu'l-Farid (1181-1235 a.d.) était un mystique égyptien qui passa près de 20 ans dans le Hijaz. Pour son classique "Nazm as-Suluk", voir A.J. Arberry, éditeur., traduit The Mystical Poems of Ibn al-Farid (Londres : E.Walker, 1952); pour lapensée de Ibnu'l-Farid, voir R.A. Nicholson Studies in Islamic Mysticism (Cambridge at the University Press, 1921); Muhammad Mustafa Hilmi Ibnu'l-Farid wa'l-hubb al-ilahi (Le Caire : Dar al-Ma-Arif 1971); et Issa J. Boulatta "Verbal Arabesque and Mystical Union : A Study of Ibn al-Farid's Al-Ta'iyya al-Kubra", Arab Studies Quarterly 3 (Spring 1981), 152-69.

21 Pour cet épisode, voir Balyuzi Baha'u'llah page 118. Al-Qasidah al-Warqa'iyyah fut d'abord publié dans le volume IV de Ishraq-Khavari's Ma'idahy-i asmani. Une version plus complète se trouve dans Baha'u'llah Athar-i qalam-i a'la. III, pages 196-215. Le manuscrit de Zaynu'l- Muqarabbin fut généreusement fournit à l'auteur par le département de la recherche au centre baha'i mondial à Haïfa.

22 le pied de ce qasidah est un tawil (catalectic) irrégulier. Par exemple, la première ligne dans toutes les versions comme avec l'hémistiche "Ajdhabatani bawariqu anwqri tal'atin", qui ne se scande pas. La plupart de ces lignes sont régulières et semble indiquer que l'auteur était entièrement sans sentiment pour le pied arabe. Des irrégularités pourraient dériver de la corruption textuelle, une question que seule une édition scientifique du poème pourrait établir.

Le plan du poème, comme dans l'ouvrage de Ibnu'l-Farid, est que à l'intérieur de la syllabe finale de chaque ligne est ta, avec kasrah, précédé par fathah. Cependant, Baha'u'llah maintient parfois ce poème en faisant correctement des adjectifs masculins ou des verbes féminins. Il crée aussi des formes de verbe qui n'ont aucune réalité lexicographique Dans certains cas, les traits grammaticaux persans sont transférés en arabe. Par exemple, où un nom défini suivit par un adjectif défini serait utilisé par un arabe, Baha'u'llah tend à rendre le nom indéfini. Cela a l'effet de mettre le nom et sa modification dans un état construit (idafah) et en fait le persan idafah remplit à la fois des fonctions adjectives et construites. Lorsque les phrases arabes sont utilisées par les persans dans leur propre langue, c'est une transformation fréquente.

23 Baha'u'llah Chahar vadi Athar III, pages 143-44; traduit par Khan et Gail The Seven Valleys and the Four Valleys page 48. J'ai bénéficié de l'étude de John Walbridge des 4 Vallées.

24 Pour les critiques du Bab contre la philosophie; la logique et les principes de jurisprudence, voir Seyyed Ali Mohammed dit le Bab Le Bayan Persan traduit par A.L. M. Nicolas (Paris : Librairie Paul Geuthner, 1911, 2 volumes) I, page 131 (IV:10). Ces interdictions furent plus tard abrogées par Baha'u'llah.

25 Pour le "Rashh-i ama voir Ishraq-Khavari Ma'idahy-i asmani IV, pages 184-86.

26 Baha'u'llah Lawh-i mubarak khitab bih Shaykh Muhammad Taqiy-i Mujtahid- Isfahani ma'ruf bih Najafi (Téhéran : Bahai Publishing Trust, 1962), page 22.

27 Voir l'article pour ama dans Abu'd-Fadl ibn Manzur Lisan al-arab, XV (Beyrouth : Dar Beyrouth, 1956), page 99. Pour son hadith, voir A.J. Wensick et al., Concordance et indices de la tradition musulmane (Leiden: E.J.Brill, volume IV, 1962), article pour ama, où il est noté que la tradition est rapportée par Ahmad ibn Hanbal. Martin Lings semble être dans l'erreur lorsqu'il dit que ce mot signifie "aveugle" ou "secret" : voir son A Moslem Saint o the Twentieth Century (Londres : George Allen et Unwin, Limited, 1961), page 153, note 1.

28 Abdu'l-Karim al-Jili, al-Insan al-Kamil (Le Caire, non publiée, non datée., 2 volumes) I:35. Voir aussi H. Ritter "Abdu'l-Karim Kutbu'd-Din b. Ibrahim al-Djili" The Encyclopaedia of Islam, révision éditée (Londres : Luzac et Co., 1971).

29 Baha'u'llah Lawh-i-mubarak khitab bih Shaykh Muhammad Taqi page 16; Epistle to the Son of the Wolf page 21.

30 Qu'ran 44:54; 52:20.

31 Voir Baha'u'llah "Lawh al-huriyyah" dans Athar-i qalam -i a'la volume IV (Téhéran : Baha'i Publishing Trust, 125 b.e./1968-69), pages 379-91.

32 Algar (Mirza Malkum Khan pages 58-59) dépendait d'un ancien journal de voyage pour son erreur choronologique du départ de Baha'u'llah de Bagdad. Toutes les sources babies reconnaissent que Baha'u'llah fut ordonné d'être banni de Bagdad par le gouvernement ottoman au printemps 1279/1863, et qu'il quitta la ville en Dhu'l-Qa'dah 1279/mai 1863. Voir par exemple, le "Historical Epitome" par Mirza Javad Qazvini dans E.G.Browne, compris dans Materials for the Study of the Babi Religion (Cambridge : University Press, 1918), page 15. Qazvini était à Bagdad du temps du bannissement. La preuve la plus puissante pour la départ de Baha'u'llah sont les rapports des consuls étrangers, qui confirment les dates babies. Voir Moojan Momen The Babi and Baha'i religions: Some Contemporary Western Accounts, 1844-1944 (Oxford: George Ronald, 1981) page 183.
Cependant l'affirmation de Algar que les autorités pourraient avoir expulsé Baha'u'llah et Mirza Malkum Khan dans le même temps car il y avait des liens entre les deux, souffre d'une faible logique et un maque total de preuves. La simultanéité ne prouve pas une connexion causale. Algar semble avoir essayé ici d'étayer une fausse nouvelle dans un écrit musulman au sujet de la Foi Baha'ie - qu'elle avait des liens avec la Franc-Maçonnerie. En fait, Baha'u'llah fut banni de Bagdad à Istanbul en 1863 car le gouvernement iranien, à l'instigation des ulémas chiites, fit des pressions sur le gouvernement ottoman pour déplacer Baha'u'llah le plus loin de l'Iran. A Bagdad, Baha'u'llah avait encore accès aux pèlerins iraniens et aux villes saintes chiites. Les prêtres chiites comme Abdu'l-Husayn Tihrani furent alarmés de son influence grandissante.
Comme pour la déclaration ouverte de Baha'u'llah de sa mission à Edirne, voir son "Surat ad-Damm", Athar-i qalam-i a'la IV, pages 1-15.

33 "Lawh kull at-ta am" dans Ishraq-Khavari Ma'idah-yi asmani IV, pages 269-70.

34 Pour les mots jabarut et malakut voir Ali al-Jurjani, at-Ta'rifat (Le Caire : al-Khayriyyah Press, 1306/1888) page 119.

35 Ahmad al-Ahsa'i Ayn al-yaqin UCLA Special Collections, collections chaykhies, 1053/C, boite 1, manuscrit 3. Le Bab condamna la doctrine de wahdat al-wujud comme polythéiste (shirk) dans son Sahifay-i adliyyah voir MacEoin "Le Concept of Jihad" note 103.

36 Voir la "Lawh-i Salman dans Baha'u'llah Majmu'ahy-i mat-bu'ahy-i alvah-i mubarakah (le Caire : Sa'dah Press, 1920), pages 128-60).

37 Henry Corbin Spiritual Body and Celestial Earth: from Mazindaran Iran to Shi'ite Iran, traduit pa Nancy Pearson (Princeton, N.J.; Princeton University Press, 1977), pages 180-88, 197-210.

38 Baha'u'llah "Lawh madinat at-tawhid" dans Ishraq-Khavari, éditeur, Ma-idahy-i asmani IV, page 321.

39 Hasht Bihisht dans Browne éditeur, A Traveller's Narrative II, page 358.

40 Balyuzi Baha'u'llah page 121. Cette information au sujet de Mirza Yahya est de sources manuscrites baha'ies et pourraient ainsi être partiales. Cependant, comme Mirza Aqa Jan devint plus tard baha'i, ces sources baha'ies admettent sa part dans un plan d'assassinat est une preuve puissante de la solidité de ce morceau particulier d'information.

41 Ibidem page 122, citant les mémoires de Shaykh Sultan dans le manuscrit.

42 Baha'u'llah Kitab-I-Iqan (Le Caire : Mawsu'at Publishers, 1900) pages 210-11; traduit par Shoghi Effendi Rabbani comme The Kitab-i-Iqan : The Book of Certitude (Wilmette, III.: Baha'i Publishing Trust, troisième édition., 1970), page 251.

43 Hasht Bihisht dans Browne, éditeur., A Traveller's Narrative II, page 357; voir le récit de Abdu'l-Baha dans A Traveller's Narrative I, pages 82-83.

44 Balyuzi page 118.

45 Voir M.Molé "Les Kubrawiya entre sunnisme et chiisme aux 8ème et 9ème siècle de l'hégire", Revue des études islamiques (1961), pages 61-142; Alessandro Bausani "religion under the Mongols" The Cambridge History of Iran volume 5 : The Saljuq and Mongol Periods (Cambridge : University press, 1968), pages 545-49; Kamil Mustafa Shaybi As-Silah bayn at-tasawwuf wa't-tashayyyu' (Le Caire : Dar al-Ma'arif, 1969); S.H. Nasr "le chiisme et le soufisme ; leurs relations principales et historiques", dans le chiisme Imamite (paris : Presses Universitaires de France, 1970); pages 215-33; et A.H. Zarrinkoob, "Persian Sufism in its Historical Perspective", Iranian Studies 3 (1970), pages 141-210. Zarrinkoob note, de manière assez intéressé que le poète Dhahabi Siyyid Qutb Nayrizi (mort en 1759 ca.) écrivit une poésie arabe beaucoup influencée par Ibnu'l-Farid. The Dhahabiy-yah était un ordre soufi chiite. Zarrinkob, pages 166-67.

46 Baha'u'llah en fait écrivit plus tard un ouvrage dans la tradition du Mantiq at-Tayr, intitulé Haft vadi (Les 7 Vallées).

47 Voir William Ronald Royce "Mir Ma'sum Ali Shah and the Ni'mat Allahi Revival 1776-77 à 1796-97; non publié phD. Diss., Princeton, 1979.

48 Voir Hamid Algar Religion and State In Iran 1785-1906 : The Role of the Ulama in the Qajar period (Berkeley and Los Angeles : University of Californie Press, 1969), pges 103ff. En tant que jeune, baha'u'llah fut exposé au prêche soufi et à la littérature de l'ordre Ni'matu'llahi à la cour Qajare, bien qu'il n'y ait aucune preuve qu'il ne se soit considéré lui-même comme soufi. Voir Balyuzi Baha'u'llah pages 22-24.

49 Voir Nikki Keddie "is there à Middle East?" International Journal of Middle East Studies 3 (juillet 1973), page 267. Pour la pensée réformiste baha'ie dans la fin des années 1860 et au début des années 1870, voir Baha'u'llah Surat al-muluk in Alvah-i nazilah khitab bih muluk va ru'asay-i arq (Téhéran : baha'i Publishing Trust, 124 b.e./ 1967 a.d.), pages 3-90; et Abdu'l-Baha ar-Risalah al-Madaniyyah (Le Caire : Kurdistan Scientific Press, 1329/1911), traduit par Marzieh Gail comme The Secret of Divine Civilization (Wilmette, III : Baha'i Publishing Trust, 1956).

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