La
communauté mondiale baha'ie et son action
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6. Développement économique et social
6.1.
Introduction
Bien que limitée en nombre et en moyens si on la compare aux autres religions
beaucoup plus anciennes, la communauté mondiale baha'ie a déployé ces dernières
années, des efforts considérables pour essayer de résoudre les problèmes du
sous- développement et de la dégradation de l'environnement dans le monde. Ces
efforts sont significatifs non pas tant par leur ampleur que par leur aspect
novateur et l'espoir qu'ils apportent au monde. Selon le dernier recensement,
la communauté baha'ie gère plus de 1 300 projets de développement dans le monde.
Ces activités vont de simples centres d'alphabétisation à des travaux de reboisement,
de la gestion de dispensaires à celle de centres de recherche environnementale.
La plupart de ces projets sont entrepris dans des pays en voie de développement.
Ce qui distingue l'approche baha'ie, c'est l'intégration des principes spirituels,
sociaux et administratifs énoncés par Baha'u'llah il y a un siècle. Dans chaque
domaine particulier, qu'il s'agisse de spiritualité, d'idéal social ou de méthode
d'administration, les enseignements de Baha'u'llah offrent une approche et une
perspective nouvelles.
Vu globalement, l'impact est multiplié: les baha'is pensent que les enseignements
de Baha'u'llah offrent des instruments complets pour mener l'action sociale
collective dont l'humanité a besoin pour survivre et prospérer aujourd'hui.
Les enseignements spirituels de Baha'u'llah soulignent l'importance de l'autonomie
et de l'autosuffisance et font l'apologie d'une approche globale et holistique
pour comprendre les problèmes sociaux et leurs causes sous-jacentes. En particulier,
ils relient les éléments les plus profonds de la nature humaine - éléments spirituels
par essence - et font ainsi appel aux capacités de motivation de l'esprit humain.
Les enseignements sociaux de Baha'u'llah contiennent un ensemble de règles en
matière d'action sociale et de conduite morale qui sont non seulement conformes
aux idéaux les plus nobles de la société moderne mais aussi à ses aspirations
les plus profondes. Ils incarnent la justice et ont des conséquences directes
et pratiques sur la recherche de solutions aux problèmes sociaux.
Par exemple, on ne peut essayer d'éliminer la pauvreté sans mener en même temps
une action en faveur de l'égalité des femmes. La grande majorité des pauvres
dans le monde est constituée de femmes et d'enfants. Dans de nombreux pays en
voie de développement, en particulier en Afrique, ce sont les femmes qui cultivent
la terre. Les baha'is pensent que l'action menée pour garantir la sécurité alimentaire
dans ces pays dépend, pour une large part, de l'amélioration de la condition
féminine. Les problèmes de développement et de l'environnement sont également
liés aux problèmes de racisme, de l'analphabétisme et des conflits religieux.
L'Ordre administratif conçu par Baha'u'llah représente également une nouvelle
méthode d'action sociale. La structure du réseau mondial d'Assemblées baha'ies
locales, nationales et internationale, propose un nouveau modèle d'administration
décentralisée. C'est particulièrement vrai des Assemblées spirituelles locales
qui peuvent être considérées comme des organes de décision, à la base, capables
de comprendre les choix qui s'imposent en matière de développement et de faire
ces choix. Par ailleurs les procédures de consultation employées par les baha'is
sont applicables à de nombreux autres cadres pour stimuler la coopération et
le développement social.
Sur un plan historique, la religion a été l'un des moteurs les plus puissants
du changement d'attitude et de comportement de l'homme. Elle a toujours défini
la nature de nos objectifs et de nos relations. Et c'est sur ce point - celui
de la lutte pour changer les attitudes et le comportement humains - que l'approche
baha'ie des problèmes d'éducation, de développement et de conservation de la
nature offre peut-être les plus grands espoirs.
Étant donné que les ressources de la communauté baha'ie sont limitées, l'ampleur
de son action est souvent limitée à la localité immédiate. Néanmoins, la méthode
de conception et de mise en oeuvre de ces projets est typiquement baha'ie. Tous
renforcent, directement ou indirectement, l'unité de l'humanité. Nombre d'entre
eux mettent l'accent sur l'amélioration de la condition féminine ou cherchent
à servir les intérêts des populations minoritaires qui ont fait l'objet d'une
discrimination. Dans la plupart des cas, on fait largement appel à la consultation
pour impliquer ceux à qui les projets tentent d'apporter une aide. Il en découle,
globalement, un nouveau modèle de développement social et économique bien intégré
et complet.
(Les Baha'is, pp. 63-65)
6.2. Point de vue baha'i
6.2.1. PARTICIPATION "POPULAIRE"
Malgré des milliards de dollars d'aide, des centaines de milliers d'heures de
travail, et un océan de bonnes intentions, de nombreux pays sont dans une plus
mauvaise situation qu'il y a 30 ou 40 ans, avant le début des programmes de
développement intensifs de type occidental.
Les spécialistes du développement économique et social se sont donc tournés
vers d'autres solutions. Parmi les idées nouvelles les plus prometteuses, on
trouve celle de la participation des masses ou pour utiliser un terme largement
adopté aux Nations unies, la participation "populaire".
L'élan en faveur de la participation de la population locale vient du fait que
les programmes traditionnels de développement échouent fréquemment parce que
la population elle-même n'a pas été consultée ou invitée à participer. Sans
cette participation, les efforts se détachent de la réalité locale. Les gens
deviennent de simples objets du développement, n'ayant aucune influence sur
leur propre destin. Et donc ils ne perçoivent pas d'intérêt à poursuivre cet
effort.
La théorie naissante de la participation des populations locales indique que
si l'on encourage les masses à participer elles-mêmes, leurs besoins en matière
de développement seront mieux satisfaits. L'effort international sera donc davantage
appuyé par la population locale et sa réussite sera beaucoup plus probable.
L'élan de ce nouveau mode de pensée est lié au respect croissant des droits
universels de l'homme et à la reconnaissance du fait que chacun, quel que soit
son niveau d'éducation, de développement social ou de situation financière,
a droit, dans le cadre des lois, à un statut et à un traitement égal.
Mais, dans l'optique baha'ie, la vraie participation de la population viendra
lorsque les peuples du monde - à la fois ceux en voie de développement et ceux
qui sont développés matériellement - intègreront à leur réflexion plusieurs
notions qui dépassent le cadre actuel des droits de l'homme.
La première notion - clef permettant d'encourager une véritable participation
de la population implique que l'on reconnaisse l'unicité de l'humanité. Cette
reconnaissance exige un changement d'attitude de la part de tous les peuples
- à la fois de ceux qui sont aidés et de ceux qui souhaitent aider.
La deuxième notion est la reconnaissance que les êtres humains sont, de par
leur essence, des créatures spirituelles. En tant que tels, tous les hommes
et toutes les femmes sont créés avec une noblesse intrinsèque et possèdent des
capacités spirituelles, intellectuelles et physiques insoupçonnées. Le véritable
développement intervient lorsque ces capacités latentes sont mises en valeur.
En 1975, la Communauté internationale baha'ie a soumis à la Commission du développement
social des Nations unies une déclaration à ce sujet. En voici un extrait :
"... la participation de la population, si indispensable au développement économique
et social, exige une modification fondamentale des valeurs et des attitudes
de la part de chaque individu et de son groupe social, [modification] ayant
pour origine une conviction bien enracinée de l'unicité organique de l'humanité.
Pour réaliser un développement réussi, il faut admettre avant tout que chaque
personne est inséparable de l'ensemble de l'humanité..."
Au fur et à mesure que les spécialistes du développement examinent de plus en
plus près la notion de participation de la population, et qu'ils recherchent
des moyens pour mettre en oeuvre cet idéal, ils pourront trouver utile l'expérience
de la communauté baha'ie mondiale.
Malgré leur racine religieuse, les institutions baha'ies ont également comme
mission d'assumer le bien-être social et économique de l'humanité. Tant au niveau
local que national ou international, ces institutions fonctionnent suivant un
modèle comprenant des mécanismes visant à encourager la participation de toute
la population aux fins indiquées ci-dessus.
Plus que de la technologie ou des fonds, le véritable développement exige, du
point de vue baha'i, de nouvelles méthodes pour l'organisation des affaires
humaines, fondées sur ce type de "participation de la population", où l'on tient
compte de tous les points de vue et où tous les hommes sont traités avec le
même respect.
Les succès des peuples et des nations "développés" ne reposeront pas sur les
connaissances techniques, les ressources naturelles ou même l'accumulation de
capitaux. Le développement découlera du degré de respect dû à la personne humaine
et de l'évolution sociale qui en résultera.
(One Country n°4, pp.2-3)
6.2.2. LA PRISE DE DÉCISION EN GROUPE
La caractéristique la plus intéressante du système administratif baha'i, du
point de vue du développement économique et social, réside dans le processus
de consultation qui l'anime. Parmi les principes qui guident ce processus -
tous émanant des Écrits de Baha'u'llah - on trouve l'effort vers le consensus,
l'utilisation de la méditation et de la prière pour se préparer à la résolution
des problèmes, la responsabilité qu'a chaque individu d'exprimer sa propre opinion
selon sa conscience, la modération et la courtoisie dans l'expression, le détachement
par rapport à ses propres idées une fois qu'elles ont été proposées, et l'obligation
pour tous de travailler à la réussite des projets qui ont été adoptés lors de
la décision de l'assemblée.
Résultat important : au fur et à mesure que la Foi baha'ie s'établissait à travers
le monde, un grand nombre de personnes ont pris part à l'apprentissage pratique
de cette méthode de prise de décision. Du fait que le fonctionnement baha'i
comporte aussi une consultation régulière de l'assemblée locale avec l'ensemble
des membres de la communauté, il est exact de dire que la plupart des membres
de la Foi baha'ie sont, à un degré ou à un autre, des étudiants de ce processus
de consultation et de ses implications. C'est à ce phénomène, plus qu'à autre,
que les baha'is attribuent le caractère d'autonomie d'une grande part de leur
travail de développement.
(Développement économique et social, p.3)
6.3. Actions baha'ies
6.3.1. ÉCOLE ANIS ZUNUZI : UN MOTEUR DU DÉVELOPPEMENT - LILAVOIS, Haïti
|
Ces
enfants de l'école primaire viennent des régions semi-rurales qui entourent
le site de l'école Anis Zunuzi (nom d'un jeune babis martyrisé en 1850 en
compagnie du Bab, l'un des deux fondateur de la foi baha'ie. L'école Anis
Zunuzi met l'accent sur l'éducation morale et l'éducation. |
Desanges Exama a quitté l'école après la sixième année mais il en sait autant
sur le travail de développement - et pourquoi il n'a pas toujours abouti à Haïti
- que n'importe quel spécialiste occidental arrivé dans l'île dans le cadre de
programmes d'aide, disposant de budgets multimillionnaires en dollars.
A 53 ans, M. Exama travaille pour l'école baha'ie Anis Zunuzi.
Il est convaincu que le meilleur chemin vers le développement est l'éducation,
surtout lorsque celle-ci enseigne des valeurs morales et des méthodes de coopération.
"Si l'on apprend à travailler ensemble", dit-il, "tout devient possible".
Cette philosophie est partagée par tous ceux qui travaillent à l'école Anis
Zunuzi, un groupe de bâtiments blancs, propres et agréables, situés à environ
15 km de Port-au-Prince, la capitale d'Haïti.
L'école privée Anis Zunuzi est progressivement devenue un institut aux multiples
facettes, qui lance et soutient des projets de développement à la base dans
tout Haïti. Ces projets comprennent des écoles maternelles, des cours sur l'organisation
de la communauté et des efforts locaux de reboisement. Un fil conducteur relie
toutes ces activités entre elles : apprendre à coopérer et à décider en tant
que groupe est plus important pour un développement à long terme que l'aide
matérielle.
Ribentrop Louis, 23 ans, membre du comité de développement de la communauté
baha'ie haïtienne, rappelle: "A l'époque , on faisait subir aux esclaves des
choses absolument terribles. Pour forcer les gens à obéir, on les battait, on
leur coupait les bras, on les enterrait vivants. Cette mentalité de "oui-chef"
existe toujours chez beaucoup et on la retrouve à tous les niveaux de la société,
rendant de nombreuses personnes incapables d'agir par elles-mêmes."
M. Louis affirme que la conception baha'ie du développement est unique à Haïti
parce qu'elle tend à dépasser cet héritage en apprenant aux citoyens à coopérer
entre eux, plutôt que simplement se partager l'aide venue de l'extérieur. L'école
Anis Zunuzi contribue grandement à cette éducation, grâce à ses divers programmes
: primaire, secondaire, technique, classes d'adultes, instituts, le tout sous
la responsabilité de l'Assemblée nationale baha'ie.
a) Enseigner des valeurs morales
En dépit de l'interdiction officielle des châtiments corporels, dans la plupart
des écoles d'Haïti, assurer la discipline consiste à battre et à fouetter les
élèves : autre héritage d'un lourd passé. A l'école Anis Zunuzi, il est depuis
toujours interdit de frapper un élève. Pour un observateur extérieur ce détail
peut paraître insignifiant, mais il place cette école à part, la différencie
des autres écoles et donne aux élèves un sens rare de responsabilité pour leurs
propres actions.
Un autre détail caractéristique de cette école, c'est son usage du créole dans
l'apprentissage de la lecture. "Commencer à lire en créole permet aux élèves
d'apprendre à penser par eux-mêmes", déclare Hans-Jürgen Thimm, ancien proviseur
de l'école. "Si vous commencez par le français, ils n'apprennent qu'à répéter
comme des perroquets. C'est en fait une profonde réforme."
Mais la vraie différence de l'école c'est son effort pour insérer des valeurs
morales, ou dites "spirituelles", selon les baha'is, dans les programmes.
Les premiers livres, écrits en créole à l'école même, sont utilisés au début
de la scolarité. Ils contiennent de courtes histoires pour illustrer les différents
mots nouveaux et les sons. Dans le premier livre de lecture, la lettre "O" est
illustrée par l'histoire d'un garçon qui aide son père et apprend les vertus
du travail. Une autre histoire parle d'une femme qui raccommode laborieusement
une robe de mariée, bien qu'elle soit fatiguée et préfèrerait laisser le travail
inachevé.
b) Un moteur du développement
Les instituts pour adultes à Anis Zunuzi insistent aussi sur les valeurs morales
et, particulièrement, sur une méthode de décision de groupe sans perdants, que
les baha'is appellent la "consultation". Les individus, qui connaissent les
principes de la consultation et d'autres techniques de coopération communautaire,
organisent à leur tour, et encadrent l'administration de projets de développement
dans leurs propres régions.
Le programme extra-scolaire de l'école, établi en 1983, reçut à ses débuts une
somme de 60 000 dollars de l'Agence canadienne de développement international
(ACDI). Cependant, aujourd'hui, la communauté baha'ie haïtienne a pris sa part
de responsabilité financière, aidée par d'autres communautés baha'ies du monde.
A présent, quatre écoles maternelles ont été établies en plus de celle d'Anis
Zunuzi et elles sont supervisées par les conseils baha'is élus localement.
Trois autres écoles primaires, comprenant la maternelle et les quatre premières
années et comptant une centaine d'élèves, existent dans les villes de Liancourt,
Pont Benoît et Pitimi. Elles sont aussi supervisées par le conseil baha'i local
de chaque ville. Une petite pépinière a été aménagée à Liancourt, dans le cadre
d'un projet national de reboisement.
A l'école Anis Zunuzi, on trouve plusieurs autres projets extra-scolaires de
développement. On y voit une pépinière et un service de distribution de jeunes
arbres aux fermiers locaux.
c) Un processus évolutif
Bien que l'école Anis Zunuzi fut créée en 1980, grâce à un don extérieur de
250 000 dollars et d'abord supervisée par un conseil international, progressivement,
l'école évolua et devint une institution qui tire son soutien et sa direction
de la population locale.
Aujourd'hui, l'école est dirigée par un comité de membres du conseil local et
cette année, le proviseur, américain d'origine, a laissé la place à un éducateur
haïtien, M. François Lhorrisson-Fils.
"A Haïti, en général, nous manquons d'espoir, de rêves, et c'est le plus grand
obstacle à notre développement, dit M. Lhorrisson-Fils. Pour surmonter cet obstacle,
chaque enfant doit acquérir une vision de son propre avenir et en être conscient
à un degré tel que cela deviendra contagieux et affectera les autres. Voilà
ce que nous essayons de faire."
(One Country n°4, pp.1, 4-8)
6.3.2. PROTECTION DE LA FORÊT - LILAVOIS, Haïti
|
La pépinière de l'école Anis Zunuzi produit plus de 120000 plants par
an. Cette pépinière collabore au projet de reboisement de la Fondation pan-américaine
du développement. |
A la saison des pluies, l'on dit que d'immenses rivières de boue brune s'éloignent
des côtes de l'île pour se perdre dans les eaux céruléennes de la mer des Caraïbes.
La cause en est le déboisement massif du pays, un des pires de l'hémisphère Ouest,
qui laisse les pluies raviner le sol, entraînant le précieux humus à la mer.
"Les estimations oscillent entre 50 et 60 millions d'arbres coupés chaque année",
affirme Arlin Hunsberger, Directeur du projet de développement agro-forestier
d'Haïti de la Fondation pan-américaine de développement (FPAD) l'un des principaux
organismes de reboisement d'Haïti. "Malheureusement, on estime à seulement 6,7
millions le nombre d'arbres replantés l'an dernier par les fermiers."
La pauvreté d'Haïti en arbres remonte au début du 19e siècle, lorsqu'au cours
de révoltes d'esclaves, des régions entières furent brûlées. Une grande partie
de la population chercha refuge dans les montagnes, construisant des fermes
qui réduisirent d'autant la forêt. L'exploitation commerciale incontrôlée du
bois en accéléra le déclin qui fut entretenu par l'utilisation du charbon de
bois et le déboisement par les fermiers. Sur une île qui fut jadis verdoyante,
il ne reste que 5 % de forêt.
Pendant des dizaines d'années, les appels du gouvernement pour protéger la forêt
restèrent lettre morte. Malgré les efforts de nombreuses organisations d'aide
internationale pour remplacer les arbres dans l'une ou l'autre partie du pays,
la tendance ne put être renversée.
En dépit de cela, M. Hunsberger est optimiste quant au résultat du projet de
la FPAD, qui s'attaque au problème d'une manière originale. "Notre but, dit-il,
est de travailler avec les organisations volontaires privées, comme la communauté
baha'ie haïtienne et d'autres groupes religieux, pour changer la manière dont
les paysans perçoivent les arbres."
"Nous voulons que les fermiers fassent pousser leurs propres arbres et qu'ils
comprennent qu'on doit récolter le bois comme on récolte le maïs ou les haricots
: on ne peut récolter le maïs de quelqu'un d'autre, de même ne devrait-on pas
couper les arbres des autres."
La FPAD encourage aussi les fermiers à planter des arbres à croissance rapide
qui ont des usages utiles et pratiques : nourriture animale, amélioration de
la qualité du sol, bois de charpente ou production de charbon de bois.
Ce programme cadre bien avec le concept baha'i d'intégration entre environnement
et développement. L'école Anis Zunuzi participe à ce projet de la FPAD depuis
1985. Elle commença par construire une pépinière. Aujourd'hui, cette pépinière
produit environ 120 000 plants par an qui sont distribués aux fermiers de la
région. Une autre pépinière, installée au Nord du pays par le conseil baha'i
local de Liancourt, produit environ 80 000 arbres par an.
M. Hunsberger explique : "L'école Anis Zunuzi est un excellent exemple de la
manière dont agit la FPAD : nous ne travaillons qu'avec des organisations volontaires
privées (OVP) telles que l'école baha'ie, la mission baptiste et d'autres. Environ
70 organisations sont impliquées."
En travaillant avec ces groupes, la FPAD atteint les couches de la société haïtienne
où l'éducation sur le reboisement et la plantation d'arbres peut faire la différence.
"Les OVP ont tendance à avoir les pieds sur terre, affirme M. Hunsberger, et
il est probable qu'elles seront là bien plus longtemps que nous."
Victor Dumay est un des fermiers qui a bénéficié du programme. Il y a quatre
ans, il planta des arbres autour de chez lui. Aujourd'hui, ils ont déjà plus
de six mètres de haut, donnent de l'ombre et améliorent l'humidité du sol.
"Les arbres augmentent la valeur du terrain" dit M. Dumay dont les arbres furent
procurés par Desanges Exama, agent de développement du programme extra-scolaire
de l'école Anis Zunuzi. "Une fois que vous avez de bons arbres, vous êtes sûr
d'avoir de la pluie, parce que les arbres attirent la pluie."
(One Country n°4, pp.10-11)
6.3.3. LES ÉTABLISSEMENTS HUMAINS
Bien que la Conférence Habitat II semble, dans une certaine mesure, mettre l'accent
sur les problèmes techniques des cités et des villes comme la congestion urbaine,
le problème du logement et la pollution de l'environnement, les responsables
politiques sont de plus en plus convaincus que ces problèmes, tout comme ceux
liés à l'urbanisation, ne pourront être résolus qu'en puisant dans les valeurs
et les aspirations humaines -ce qui a toujours été la préoccupation première
des communautés religieuses.
Dernière née des grandes communautés religieuses, la Foi baha'ie est un système
de croyance orienté vers l'action qui propose des enseignements spécifiques
se rapportant aux problèmes de la vie moderne et aux thèmes figurant à l'ordre
du jour de la conférence Habitat II.
Sur le plan des idées, ces enseignements constituent la base du nouveau système
de valeurs qu'il faudra édifier pour que les communautés humaines puissent survivre
dans un monde interdépendant. C'est ainsi que depuis plus d'un siècle, les baha'is
ont défendu les concepts d'"unité de l'humanité" et d'"unité dans la diversité"
. Ces idées vont au delà de simples appels à la tolérance et à la coopération,
en tant que telles, et sont de plus en plus reconnues comme essentielles à l'édification
de communautés pacifiques et harmonieuses.
Sur le plan pratique, inspirées par les aspects progressistes de leur Foi, les
communautés baha'ies du monde entier ont mis sur pied plus de 1.300 projets
de développement économique et social qui, tout au moins sur une petite échelle,
proposent un grand nombre d'approches et de solutions nouvelles aux problèmes
que rencontrent les établissements humains contemporains.
Ces projets vont de la création de centres de formation professionnelle au lancement
de campagnes contre le racisme dans les grandes villes, en passant par de modestes
acitivités génératrices de revenus limitées au niveau des villages et des initiatives
de formation pédagogique qui s'adressent aux régions. Presque toutes ces activités
s'inspirent des principes d'unité et d'interdépendance de l'humanité, principes
qui sont au coeur des enseignements baha'is; nombre d'entre elles intègrent également
sciemment les principes de développement durable, de prise de décision collective
et d'entreprise individuelle.
a) Projets locaux et communautaires
L'approche des projets baha'is de développement économique et social s'inspire
en partie de leur adhésion à des principes sociaux progressistes, alliée à un
haut degré d'autonomie locale et de décentralisation. Qui plus est, la plupart
de ces projets mettent l'accent sur l'épanouissement moral et la prise de décision
collective, considérant que la meilleure façon de résoudre les problèmes sociaux
est de permettre aux individus de révéler leurs capacités latentes tout en les
préparant à travailler ensemble en groupes pour des buts communs.
Nombre de ces projets suggèrent d'adopter, au niveau local, selon l'expression
utilisée dans l'ordre du jour d'Habitat, les "pratiques les meilleures" susceptibles
d'être appliquées à plus grande échelle pour trouver des solutions nouvelles
aux problèmes des établissements humains.
- En Colombie, la Fondation pour l'enseignement
et l'application des sciences (FUNDEAC), créée à l'initiative des baha'is, a
mis au point un nouveau programme d'enseignement rural destiné à offrir de nouvelles
possibilités aux personnes qui cherchent un emploi ou veulent créer des entreprises
en milieu rural afin d'endiguer la migration urbaine. S'appuyant sur plus de
vingt années de recherches, la FUNDEAC a mis au point un programme d'enseignement
secondaire adapté aux besoins et aux préoccupations des ruraux et facile à enseigner
en dehors des cadres scolaires traditionnels par des enseignants ayant reçu
relativement peu de formation. Les manuels et les méthodes conçus par la FUNDEAC
ont été massivement adoptés par les gouvernements régionaux et d'autres ONG
en Colombie et plus de 15.000 élèves ont reçu un diplôme ou suivent les cours
de ce programme.
- En Inde, l'Institut professionnel baha'i
pour les femmes rurales organise une série de cours visant à former les femmes
rurales à diriger leurs communautés. Ouvert à Indore depuis 1983, l'Institut
enseigne la santé, la nutrition, la lecture, l'écriture et le calcul, le développement
de l'enfant et dispense un enseignement professionnel de base aux femmes rurales
des communautés périphériques. Le programme met l'accent sur l'éducation morale,
la protection de l'environnement et le concept d'"unité de l'humanité"; grâce
à ce programme, on a observé une diminution des tensions entre étudiants appartenant
à des castes différentes.
- A Macao, l'École des Nations, qui se situe
dans un environnement très urbanisé, dispense un enseignement général et professionnel
à tous les citoyens. Le programme est bilingue et met l'accent sur l'éducation
morale, la protection de l'environnement, et le concept de "citoyenneté du monde"
dans le but de former de futurs dirigeants et citoyens responsables.
- Au Brésil, les problèmes qui affligent
ceux que l'on nomme les "enfants de la rue" font l'objet d'un projet à Manaus,
ville en rapide expansion de la région amazonienne. Le Centre d'action sociale
dirigé par des baha'is cherche à faire de ces enfants des membres productifs,
conscientieux et en bonne santé de la société, en combinant l'école élémentaire
et un programme spécial de formation professionnelle et morale. Associée à une
campagne d'organisation communautaire à l'intention des femmes pauvres du voisinage,
cette méthode permet non seulement de fournir une assistance matérielle et scolaire
aux enfants, aux jeunes et aux mères à qui elle s'adresse, mais aussi à les
doter d'outils intellectuels et spirituels qui leur permettront de transformer
leurs vies et en dernière analyse, d'être à même d'aider les autres.
(Dossier de Presse du Bureau d'Information Publique de la Communauté Internationale
Baha'ie)
6.3.4. PROJETS LOCAUX ET COMMUNAUTAIRES
Malgré son petit nombre et ses ressources limitées, comparés à ceux de nombreuses
autres organisations religieuses, sans compter ceux des gouvernements et des
institutions internationales, la communauté mondiale baha'ie a lancé au fil
des ans un certain nombre de projets et de programmes à caractère économique
et social, qui se distinguent par leur approche inédite des problèmes sociaux
et une perspective holistique propre.
Les communautés baha'ies gèrent plus de 1300 projets locaux en matière de développement
économique et social de par le monde. Leurs efforts portent autant sur la gestion
de simples centres d'alphabétisation, l'organisation de campagnes anti-racistes
dans les villes, la mise en oeuvre de modestes projets villageois générateurs
de revenus que sur des initiatives de formation des enseignants à l'échelle
régionale.
Outre ces projets spécifiques, l'expérience d'ensemble de cette communauté qui
intègre et unit quelque 5 millions de membres de milieux extrêmement divers,
issus de presque toutes les nationalités, les groupes ethniques, les origines
religieuses et les classes sociales, est digne d'examen dans la mesure où elle
présente un palmarès unique des possibilités d'intégration sociale dans une
ère d'interdépendance planétaire.
L'approche des projets baha'is de développement économique et social s'inspire
en partie de leur adhésion à des principes sociaux progressistes, alliée à un
haut degré d'autonomie locale et de décentralisation. Qui plus est, la plupart
de ces projets mettent l'accent sur l'épanouissement moral et la prise de décision
collective, considérant que la meilleure façon de résoudre les problèmes sociaux
est de permettre aux individus de révéler leurs capacités latentes tout en les
préparant à travailler ensemble en groupes pour des buts communs.
L'institut de développement New Era à Panchgani, en Inde, à quelque 150 km au
sud-est de Bombay, sert de centre de formation au développement rural et de
centre d'expérimentation directe pour l'amélioration des techniques agricoles,
l'éducation à la santé et la viabilité économique des villages alentours. Au
travers de ses activités de formation, l'institut vise la création d'un corps
de "médiateurs du développement communautaire", soit des individus capables
d'aider leurs villages à organiser et à mettre en oeuvre par eux-mêmes des projets.
Des jeunes de tous les coins de l'Inde, filles et garçons, y viennent pour suivre
un programme d'un an, pendant lequel on leur enseigne non seulement des matières
techniques du type éducation des adultes, formation à l'alphabétisation, promotion
de la santé et développement agricole, mais aussi des valeurs et des principes
spirituels dont dépend le succès de tout effort de développement. En prônant
notamment l'égalité entre femmes et hommes et le besoin de se défaire de toute
forme de préjugés, l'institut cherche à relever les défis sociaux sous-jacents
en Inde, comme l'oppression des femmes et le système des castes. Il fournit
aussi une formation professionnelle en matière de "technologie agricole", savoir-faire
approprié et utile à la vie rurale en Inde, qui a donné lieu à la création d'un
certain nombre de petites entreprises.
Les problèmes qui affligent ceux que l'on nomme les "enfants de la rue" au Brésil
font l'objet d'un projet à Manaus, ville en rapide expansion de la région amazonienne.
Le Centre d'action sociale dirigé par des baha'is cherche à faire de ces enfants
des membres productifs, conscientieux et en bonne santé de la société, en combinant
l'école élémentaire et un programme spécial de formation professionnelle et
morale. Associée à une campagne d'organisation communautaire à l'intention des
femmes pauvres du voisinage, cette méthode permet non seulement de fournir une
assistance matérielle et scolaire aux enfants, aux jeunes et aux mères à qui
elle s'adresse, mais aussi à les doter d'outils intellectuels et spirituels
qui leur permettront de transformer leurs vies et en dernière analyse, d'être
à même d'aider les autres.
En Afrique, les baha'is gèrent un large éventail de projets de développement
allant de simples groupes de travail dirigés à des efforts de promotion de la
condition féminine à l'échelon régional. Parmi les projets les plus réussis,
il y a un effort de longue haleine pour former des éducateurs dans le domaine
de la santé des collectivités. Mené dans un certain nombre de pays, dont le
Tchad, le Kenya et la Zambie, ce projet se sert du système des Assemblées spirituelles
locales baha'ies comme réseau prêt à l'emploi pour soutenir et organiser les
éducateurs des villages des régions éloignées. Choisis par les communautés où
ils seront appelés à exercer leurs compétences, ceux-ci travaillent bénévolement,
consacrant une partie de leur temps toutes les semaines à promouvoir la vaccination,
l'allaitement maternel, l'hygiène et les techniques de premiers soins de secours
comme la réhydratation par voie orale.
Les communautés baha'ies des Etats-Unis, d'Afrique du Sud et d'autres pays multiraciaux
ont été à l'avant-garde des efforts dans le domaine de la lutte contre l'animosité
raciale. Aux Etats-Unis, les baha'is ont cherché à promouvoir une nouvelle vision
de l'unité en organisant de multiples séminaires, ateliers et colloques en faveur
de l'entente raciale. En Afrique du Sud, bien avant la fin de l'apartheid, la
communauté baha'ie de ce pays, composée de membres issus de tous les groupes
ethniques et raciaux, était pleinement engagée à faire la preuve de la réalité
de l'unité du genre humain. De fait, plus de 90% des 10 000 membres de cette
communauté est non-blanche - proportion qui correspond grosso modo à celle de
la population générale de ce pays.
a) Expériences d'intégration sociale de par le monde
D'un point de vue général, l'expérience des baha'is d'Afrique du Sud, bien qu'extrême,
permet de se faire une idée du genre de résultats obtenus par les communautés
baha'ies du monde pour montrer qu'il existe plusieurs voies possibles vers l'intégration
sociale.
Composée d'hommes et de femmes issus de presque toutes les origines nationales,
ethniques et religieuses, dont plus de 2100 groupes tribaux et raciaux différents,
la communauté mondiale baha'ie est néanmoins fermement unie par un engagement
commun à un programme planétaire de progrès social, spirituel et moral. Ce programme
se caractérise par le soutien aux principes suivants: l'abandon de toute forme
de préjugés; l'égalité pleine et entière entre femmes et hommes; la réduction
des extrêmes, de richesse, et de pauvreté; la reconnaissance de l'unité essentielle
des grandes religions mondiales et de la nature spirituelle de la personne humaine;
l'éducation pour tous; des critères élevés de comportement individuel; l'harmonie
entre science et religion; un équilibre entre protection de la nature et développement;
enfin l'établissement d'un système fédéral mondial fondé sur la sécurité collective
et la citoyenneté mondiale.
Dans l'ensemble, cette communauté incarne dans sa vie de tous les jours, par
son engagement à des principes communs, et ses activités d'aide à l'humanité
toute entière, une organisation planétaire unique en son genre, disposant d'un
vaste réservoir d'expériences en matière de cohésion sociale, souvent contre
toute attente. Son oeuvre s'appuie sur une certaine vision de l'unité de l'humanité
et la croyance dans la valeur authentique et la dignité spirituelle de tout
habitant de la planète.
(Dossier de presse du Bureau d'Information Publique de la Communauté Internationale
Baha'ie)
6.4. Coopération
6.4.1. REMPLACEMENT DU "JIKO" TRADITIONNEL - MOMBASA, Kenya
|
Dans sa nouvelle conception, le poêle "juko" offre une solution au
problème de déboisement en Afrique orientale. Vincent Wanagara, cordinateur
du projet de nouveau poêle à charbon (appelé "Jiko" en langue swahili) pour
la communauté baha'ie de Mombasa (Kenya), montre 3 modèles qui permettent
de consommer moins de combustible que les poêles traditionnels. |
A Mombasa comme dans les autres grandes villes du Kenya, chaque foyer ou presque
est équipé d'un simple brasero, le jiko, qui fonctionne au charbon de bois.
Malheureusement cette tradition, si elle n'est pas maîtrisée, va dénuder les
forêts du Kenya. Le combustible ligneux - charbon de bois et bois de chauffage
- représente environ 75% des besoins énergétiques de base du Kenya; c'est là
une donnée statistique qui a peu de chance de se modifier sensiblement dans
l'avenir, étant donné le coût de l'importation de combustibles fossiles. Or,
une grande part du charbon de bois qui rentre dans cette équation est utilisée
comme combustible dans les jikos.
Une association de groupements écologiques kenyans, connue sous le nom d'"Organisations
écologiques non-gouvernementales du Kenya" (KENGO), a lancé un programme national
visant à remplacer le jiko traditionnel par un modèle rénové, consommant peu
d'énergie. Bien que les jikos perfectionnés soient plus onéreux, ils permettent
à la ration journalière de charbon de bois de durer deux fois plus longtemps.
La chaleur étant concentrée au-dessous de la casserole, la nourriture cuit deux
fois plus vite, et l'on réalise ainsi une économie de temps et de combustible.
Depuis quelques années, la communauté baha'ie de Mombassa participe à ce programme.
"KENGO incite la population à utiliser le nouveau modèle de jiko et c'est ainsi
que nous avons commencé à le fabriquer dans le cadre d'un effort communautaire",
dit Vincent Wanjara, coordinateur baha'i du projet jiko. "Ils ont invité les
baha'is à participer à ce projet, et cela a été une expérience enrichissante
pour nous. "
"Bien qu'il s'agisse d'un projet à petite échelle réalisé depuis une arrière-salle
du centre baha'i de Mombassa, le projet jiko baha'i illustre cependant bien
le genre d'initiative adopté par des communautés locales baha'ies pour s'attaquer
aux problèmes de l'environnement et du développement", déclare M. Lawrence Arturo,
directeur du Bureau de l'environnement crée par la Communauté internationale
baha'ie.
Cet état d'esprit a impressionné bien des kenyans. "Lorsque je pense aux baha'is,
ce n'est pas la dimension de leurs entreprises qui compte, mais l'impact qu'ils
exercent", dit M. Jimoh Omo-Fadakah, directeur général du Réseau africain d'ONG
écologiques (AFEN). "Sans exagérer, ils constituent l'un des principaux groupes
ici."
Selon M. Omo-Fadakah, même les projets de développement les plus modestes, tels
que l'initiative baha'ie pour la fabrication des nouveaux poêles jiko, contribuent
non seulement au mouvement écologique, mais aussi à la cause de la paix. "La
paix est la condition préalable à toutes sortes de développements humains",
dit-il. "La paix peut être trouvée au sein de toutes les communautés locales
et, dans la manière dont les individus communiquent entre eux."
"Ceci me semble être l'essence même de la philosophie baha'ie, et il se trouve
que je suis d'accord avec cette idée: éveiller la population à l'importance
de la paix, et au fait qu'il est essentiel d'agir de la manière qui lui est
propre, dans les communautés locales, et sans hostilité envers quiconque", ajoute
M. Omo-Fadakah.
La communauté baha'ie de Mombassa a appris la fabrication des nouveaux jikos
grâce à des cours de formation dispensés à l'Institut de formation des agriculteurs,
dépendant du gouvernement local qui participe au programme élaboré par KENGO
pour les groupements et organisations locaux.
Les nouveaux jikos possèdent plusieurs caractéristiques qui les rendent plus
efficaces. Tout d'abord, ils ont un revêtement en vermiculite ou en argile et
environ 2,5 cm de ciment au fond, sur lequel est allumé le feu sous le charbon
de bois, afin de conserver la chaleur.
Chaque jiko est également équipé d'une petite porte latérale avec loquet, où
est introduit le papier destiné à faire prendre le feu. Cette porte bloque la
chaleur à l'intérieur du poêle.
En outre, le nouveau modèle dure plus longtemps. Les anciens poêles sont rapidement
rongés par l'action corrosive de la cendre des hautes températures; il faut
les remplacer tous les six mois, alors que le nouveau jiko peut durer jusqu'à
quatre ans.
(One Country n°5, pp. 6-7,15)
6.4.2. SYMPOSIUM SUR LA CRISE ALIMENTAIRE EN AFRIQUE - NATIONS UNIES
En termes si ponctués et délibérés qu'ils en devenaient presque hypnotiques,
Mme Eremina Mvura a exposé les défis auxquels sont confrontées les femmes rurales
en Afrique. Les auditeurs, réunis dans le confort climatisé de l'auditorium
de la bibliothèque Dag Hammarskjöld pour un symposium d'une journée sur la crise
alimentaire en Afrique le 5 septembre 1991, étaient subjugués. "C'est l'estomac
qui nous a conduits ici aujourd'hui", déclare d'emblée Mme Mvura. "Cet estomac-là
a des besoins fondamentaux. Et les femmes travaillent jour et nuit pour satisfaire
ces besoins."
"La femme rurale doit parcourir des kilomètres pour rapporter de l'eau", ajoute
Mme Mvura qui est cultivatrice et travaille pour le développement communautaire
dans les zones rurales du Zimbabwe. "Si elle revient sans eau, c'est son bébé
qui va pleurer ! Elle a besoin de nourriture pour sa famille, et cette nourriture
doit être cuite. Il lui faut donc de l'eau, et aussi du combustible." Les doléances
de Mme Mvura ne se sont toutefois pas terminées par un appel en faveur d'une
aide extérieure accrue. Bien au contraire, comme l'ont fait d'autres orateurs
lors du symposium , elle a demandé que les donateurs internationaux et les organismes
de développement soutiennent les femmes en tant que petits producteurs de récoltes
vivrières au lieu de concentrer les efforts sur les agriculteurs-hommes, les
cultures de rente et l'aide humanitaire. Mme Mvura et d'autres femmes devaient
affirmer qu'avec ce soutien l'Afrique ferait un pas de plus vers l'auto-suffisance.
"Avec une aide appropriée, les femmes d'Afrique peuvent produire suffisamment",
dit-elle. "Nous n'avons pas besoin d'être nourries à la cuillère. Nous n'avons
pas besoin d'être prises en charge... Nous cherchons un appui moral et motivant...
Nous avons besoin de matériel, par exemple des brouettes." Ce symposium était
le sixième d'une série de conférences annuelles au sujet des femmes rurales
africaines, patronné par l'organisation Défenseurs de la sécurité alimentaire
en Afrique qui siège à New York et regroupe des organisations intergouvernementales
et non-gouvernementales (ONG) et des organes des Nations unies. L'importance
des agricultrices s'affiche dans cette simple statistique : on estime que les
femmes contribuent à hauteur de 80 % à la production alimentaire en Afrique.
Malgré cela, elles sont ignorées lors de la définition des politiques alimentaires,
problème auquel Défenseurs cherche à s'attaquer.
a) Enquête auprès des ONG
Cette année, l'intérêt des informations fournies au cours du symposium s'est
accru avec la publication d'une enquête récente auprès des ONG du continent
africain. Patronnée par Défenseurs de la sécurité alimentaire en Afrique, l'enquête
souligne un grand nombre des préoccupations exprimées par Mme Mvura et d'autres.
Par exemple, elle suggère que la dégradation accrue de l'environnement, le manque
de programmes d'alphabétisation et de formation technique pour les agriculteurs
des petites exploitations, en particulier pour les femmes, ainsi que l'application
inadéquate de l'aide alimentaire, sont parmi les causes principales de l'aggravation
de la situation alimentaire en Afrique.
"Même si de nombreuses ONG reconnaissent l'importance de l'aide humanitaire,
elles aimeraient la voir s'accompagner d'efforts pour améliorer les moyens et
accroître la capacité des Africains à produire leurs propres ressources alimentaires",
remarque Alasebu Gebre Sélassié, sociologue éthiopienne et conseiller en développement,
qui analysait les résultats de l'enquête.
Sur les 94 réponses de l'enquête qui portait sur plus de 500 ONG africaines,
65% précisent que l'ensemble de la situation alimentaire en Afrique a empiré
depuis 1986, au cours des six années qui suivirent le lancement du Programme
d'action des Nations unies pour le redressement et le développement économique
de l'Afrique dont la révision finale est actuellement en cours.
"Ce qui est significatif dans cette enquête, c'est qu'elle interrogeait des
organisations africaines locales, sur les causes de la pénurie alimentaire en
Afrique", déclare Mary Power, représentante auprès des Nations unies de la Communauté
internationale baha'ie, une des organisations fondatrices et celle qui préside
Défenseurs de la sécurité alimentaire en Afrique. "Cette enquête n'était pas
basée sur les évaluations d'organisations donatrices ou d'experts techniques
occidentaux, mais plutôt sur l'expérience réelle des groupes qui travaillent
actuellement sur le terrain afin d'aider les leurs."
Les organisations interrogées ont suggéré que la situation alimentaire en Afrique
pourrait s'améliorer en portant l'effort sur les infrastructures agricoles dans
les zones rurales, avec un retour à des programmes de formation intégrée privilégiant
la préservation de l'environnement et la culture biologique et avec des possiblilités
de crédits et de prêts aux petits exploitants.
"Tout programme d'action destiné à garantir la sécurité alimentaire en Afrique
doit être entièrement conçu, exécuté, contrôlé et modifié par ceux qui sont
concernés", écrit Mme Sélassié dans la conclusion de l'enquête. "Les décideurs
du pays devraient établir leurs plans en tenant compte des expériences des petits
exploitants au niveau familial et de celles des gros producteurs."
Ces idées formulées dans l'enquête ont été défendues par les orateurs du symposium
qui a réuni plus de cent représentants d'organismes de développement, d'ONG
et de bureaux des Nations unies.
b) Femmes en première ligne
"Les femmes rurales africaines sont en première ligne pour la production alimentaire",
a déclaré Alex Ashiabor, administrateur du Groupe de travail pour l'Afrique
de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement. "Elles
sont en position de voir les problèmes pointant à l'horizon. Bien souvent, elles
peuvent offrir des solutions. Toutefois, la tradition, les usages culturels
et les lois en vigueur qui donnent la priorité aux hommes dans tout ce qui concerne
l'accès aux ressources et même dans le processus de prise de décisions les empêchent
d'atteindre leur but."
M. Ashiabor cite un expemple en Gambie où un projet sur 20 ans, visant à améliorer
la production de riz par la transformation de 2.400 ha. de marécages en champs
irrigués, a échoué parce que les femmes, "qui assurent la plus grande partie
des travaux de déblaiement, transplantation, semis et récolte, se sont vues
refuser le droit à la propriété et n'ont pas été pleinement impliquées lors
de la conception du projet".
Selon M. Ashiabor, des désaccords sont apparus et nombreuses sont les femmes
qui ont cessé de travailler la terre. Même si des facteurs d'ordre technique
ont contribué à cet échec, les facteurs sociaux-culturels et, en particulier,
l'attitude des hommes envers les femmes ont exercé une influence encore plus
grande.
c) Valeur des aliments locaux
M. Ashiabor a également préconisé une intensification de la recherche sur la
valeur nutritive, la production, la préparation et la conservation des aliments
locaux."La valeur diététique de nombreux aliments africains est connue des femmes
mais n'est pas largement diffusée", précise-t-il avant d'ajouter qu'"une meilleure
connaissance de leur valeur nutritive favoriserait l'accroissement de la consommation
des produits locaux plutôt que des variétés importées".
Ruth Bamela Engo-Tjega, chargée de liaisons au comité d'orientation du secrétariat
du Groupe de travail pour l'Afrique et l'une des fondatrices de Défenseurs de
la sécurité alimentaire en Afrique, déclare que la guerre, la dégradation de
l'environnement et l'"absence de stratégies alimentaires nationales" figurent
parmi les principales causes de l'aggravation de la situation alimentaire en
Afrique.
Selon Mme Engo-Tjega, d'autres efforts dans le domaine du développement s'avèreront
inutiles si le problème de la production alimentaire n'est pas traité en premier
lieu. "La nourriture doit avoir la priorité car elle est, en fait, la source
de toute vie", dit-elle. "Cette année encore, Défenseurs aborde le problème
avec la conviction que les simples citoyens sont les bâtisseurs des nations
et que les populations sous-alimentées ne peuvent assurer le développement d'un
pays, pas plus qu'un oiseau sans ailes ne peut prendre son envol."
(One Country n°10, pp.1, 8, 12-13)
6.4.3. SOINS DE SANTÉ - GENÈVE
Bien que les efforts en matière de santé au niveau régional et villageois, tels
que le programme de soins élémentaires à Sarh, au Tchad, aient été réalisés
en grande partie par des activités à la base, l'action baha'ie, nationale et
internationale, dans le domaine des soins élémentaires se développe, elle aussi,
rapidement.
Ainsi par exemple, en 1989, la Communauté internationale baha'ie a entamé des
relations de travail avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Dans les
deux années à venir, diverses formes de coopération vont être explorées telles
que : le patronage conjoint d'une association pour les questions de santé publique
au Burkina Faso, la reproduction de documents techniques de l'OMS dans les publications
baha'ies, et un effort général des communautés baha'ies visant à promouvoir
la stratégie de l'OMS "La santé pour tous".
Dans le cadre de cette coopération globale, la Communauté internationale baha'ie
s'est associée aux 70 autres organisations à vocation médicale ou consacrées
aux enfants, dans le programme "Des faits pour la vie", que lancent en ce moment
l'UNICEF, l'OMS et l'UNESCO. Ce programme est fondé sur la diffusion d'une brochure
simple et facile à comprendre, présentant des informations de base sur les soins
à donner aux enfants, en particulier l'importance de l'allaitement, des vaccinations,
de l'hygiène domestique et du traitement de la diarrhée.
Grâce à un réseau de programmes sanitaires, éducatifs et/ou de développement
dans 41 pays, les communautés baha'ies nationales participantes diffuseront
ces brochures et encourageront leur utilisation dans les groupes de femmes,
les écoles baha'ies, les activités pour les jeunes, les programmes d'alphabétisation
des adultes et les conférences régionales.
"La stratégie mondiale de l'OMS pour "La santé pour tous en l'an 2000" est,
pour une large part, un élément des buts que poursuivent nos communautés à travers
le monde", nous a déclaré M. Giovanni Ballerio, représentant de la Commuanuté
internationale baha'ie auprès des Nations unies à Genève.
"L'engagement croissant de nos communautés au niveau local, dans des projets
relatifs à la santé en est un exemple, comme d'ailleurs l'action de notre communauté
internationale, qui participe au programme "Des faits pour la vie". Depuis de
nombreuses années, les baha'is ont également oeuvré au sein des Nations unies
dans le cadre de conférences internationales sur la santé."
Les communautés nationales baha'ies gèrent une gamme de projets d'éducation
sanitaire. Des stations de radios d'Afrique et d'Amérique du Sud émettent régulièrement
des programmes d'information en matière de soins sanitaires. C'est ainsi qu'une
station de Bolivie, "Radio baha'ie Caracolla", diffuse des programmes éducatifs
sur la santé, tels que celui de l'UNICEF intitulé "Révolution dans la santé
infantile", et elle a collaboré à la création de 35 centres d'écoute locaux
pour la discussion de ces programmes.
Au Pérou, une troupe théâtrale itinérante patronnée en partie par la station
radio de Puno, a joué une pièce écrite spécialement pour la circonstance et
qui montre de manière saisissante comment de simples mesures, telles que l'immunisation
et la réhydratation orale peuvent sauver le petit enfant des "ravisseurs d'enfants".
Cette production a été filmée par l'UNICEF pour être utilisée dans le cadre
d'autres projets de formation sanitaire. La radio baha'ie du Liberia a participé
à la réalisation d'un programme sur les soins de santé, diffusé en cinq langues.
L'information sur les problèmes sanitaires est également distribuée par les
soins de l'Agence internationale baha'ie de la santé, créée en 1982, en Amérique
du Nord, par des professionnels de la santé. Le cercle de ses membres s'est
agrandi depuis lors puisqu'il englobe désormais des médecins, des infirmiers
et du personnel de santé disséminés à travers le monde. L'Agence internationale
baha'ie de la santé publie un bulletin trimestriel et organise une conférence
annuelle.
(One Country n°3, pp. 10-11)
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