Le courage d'aimer
Shoghi Ghadimi

2. L'amour universel
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2.3. Merci la vie

- Mademoiselle, disait un humoriste à une cantatrice, j'aimerais comparer votre voix à l'essence de rose.

- Très flattée, mais comment l'entendez-vous?

- Avec un peu, on en a assez pour longtemps.

Eh bien, chers amis, si je regarde l'heure avant mon exposé, c'est pour que ce dernier vous rappelle "l'essence de rose". Entendez par là que je vais essayer, autant que possible, d'être bref.

A une vingtaine de kilomètres de Jérusalem se trouve une ancienne ville appelée Jéricho. Cette ville a une importance historique, en ce sens que c'est la première ville rencontrée par les Israélites à leur entrée en Terre Sainte; elle fut aussi le plus grand obstacle sur leur chemin, car les hautes murailles qui l'entouraient les empêchaient d'y entrer. La légende biblique rapporte qu'il a suffi qu'une seule voix unanime se fasse entendre de la part des Israélites, pour que les murailles tombent avec fracas. D'où l'emploi du terme "murailles de Jéricho", chaque fois qu'on parle de difficultés apparemment insurmontables, mais qui se dissipent tout à coup, comme par miracle.

Or les difficultés, nous en rencontrons tous les jours dans la vie. Qu'elles soient grandes ou petites, nous voudrions qu'elles se dissipent facilement, aussi facilement que tombèrent les murailles de Jéricho.

Comment faire? C'est la question que chacun de nous se pose. Quant à la réponse, ne seriez-vous pas d'accord pour dire qu'elle se trouve, d'une manière imagée, dans la légende biblique que j'ai citée?

En effet, ne pourrions-nous pas dire que cette voix qui a permis aux Israélites de surmonter leurs difficultés, c'était la voix de l'unité?

Et l'unité ne fait-elle pas la force?

C'est donc grâce à cette force que le plus grand obstacle sur la route des Israélites fut surmonté; ce que d'une manière imagée la Bible appelle l'effondrement des murailles de Jéricho.

Mais qu'est-ce que l'unité, et quand peut-on dire qu'il y a unité chez un peuple? On dit qu'il y a unité chez un peuple quand les gens s'entendent bien, quand ils s'aiment les uns les autres. L'unité est donc la manifestation extérieure de l'amour du prochain.

C'est donc la force de l'amour qui permet de surmonter les difficultés, quelles qu'elles soient, individuelles ou nationales. Ainsi, par exemple, l'histoire fait ressortir que tant qu'il y avait de l'amour entre les Israélites, amour qui se manifestait par leur unité, toutes leurs difficultés se dissipaient comme par enchantement.

Autrement dit, tant que les termes "amour du prochain" gardaient leur vraie signification, les Israélites triomphaient dans tous les domaines. Mais à partir du moment où ils négligèrent ou oublièrent l'exacte signification de cet amour du prochain, ils perdirent leur pouvoir de surmonter leurs difficultés. Celles-ci s'aggravèrent de jour en jour et entraînèrent leur décadence, décadence qui, finalement, les a amenés à tout perdre: leur liberté, leurs biens, leur pays.

Alors vint Jésus pour leur expliquer ce que signifiait exactement le mot "prochain", explication que nous trouvons dans la fameuse parabole du bon Samaritain.

Un jour, un docteur de la loi judaïque demande à Jésus: "Qui est mon prochain?"

Et Jésus lui répond par cette parabole:

"Sur le chemin qui menait de Jérusalem à Jéricho (ce chemin de la vie avec ses épreuves) gisait un homme, dépouillé, blessé par des brigands. Un prêtre passe, mais il ne s'arrête pas pour lui porter secours. Un Lévite, c'est-à-dire un Israélite de descendance la plus pure, passe; lui non plus ne s'arrête pas.

Arrive un Samaritain qui aperçoit ce malheureux, s'arrête, lui bande les plaies, l'installe sur sa monture, le conduit à l'auberge, et remet à l'hôtelier une petite somme en lui disant: . "Prenez soin de lui, ce que vous dépenserez en surplus, je vous le rembourserai quand je reviendrai."

"Lequel de ces trois a été le prochain du malheureux?" demande Jésus.

Question dont la réponse est évidente. Mais à l'époque, elle était très embarrassante pour un Israélite, qui considérait un Samaritain comme un damné rejeté par Dieu. Puisque Dieu le rejetait, qui aurait pu se permettre de s'approcher de lui? Qui aurait osé le prendre pour son prochain, même si ce dernier se comportait comme un ange?

Il fallait absolument changer cette façon de penser.

C'est ce que fit Jésus, en laissant entendre par cette parabole que Dieu ne rejette pas ceux qu'on a pris l'habitude de considérer comme des damnés, comme des rejetés. Mais étant donné qu'à cette époque l'humanité en était au stade de l'enfance, Jésus ne pouvait pas aller plus loin et dépasser ce langage imagé. Il fallait protéger cet "enfant" qu'était l'humanité, il fallait le mettre en garde contre les "loups".

"Je vous envoie, disait Jésus, comme des brebis au milieu des loups, soyez prudents." (Matt. 10/ 11)

En bref, nous voyons que, d'une manière parabolique, Jésus déconseillait à ses contemporains de rejeter à priori qui que ce soit, et, toujours d'une manière imagée, leur demandait d'éviter les "loups", attitude conforme à la psychologie à appliquer à l'égard de l'"enfant".

Jésus savait cependant que cet "enfant" deviendrait adulte, et qu'il faudrait alors abandonner ce langage parabolique et parler ouvertement.

"Je vous ai dit ces choses en paraboles. L'heure vient où je ne vous parlerai plus en paraboles, mais ouvertement du Père." (Jean 16/25)

De plus, Jésus prévoyait que ce qu'il ne pouvait pas dire aux "enfants" de son époque, il faudrait le dire plus tard, quand ils auraient atteint l'âge adulte.

"J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter maintenant.

Quand le Consolateur, l'esprit de vérité sera venu, il vous conduira dans toute la vérité." (Jean 16/12)

La question qui se pose maintenant est celle-ci: L'homme d'aujourd'hui n'a-t-il pas atteint l'âge adulte? N'a-t-il pas acquis une maturité suffisante pour qu'on ne lui parle plus en paraboles, et qu'on lui tienne un langage ouvert, pour qu'on lui dise toute la vérité?

Ce langage ouvert ne serait-il pas, par exemple, l'aveu franc qu'"aux yeux de Dieu tous ses enfants sont égaux", que "tous les peuples forment une seule famille'" et que, par conséquent, il n'y a pas la famille des rejetés et celle des élus. "La seule différence entre les membres de la famille humaine est une différence de degré: les uns sont encore comme des enfants, et doivent être éduqués; d'autres sont comme des malades, et doivent être traités avec tendresses (Causeries d`Abdu'l-Baha - éd. 1970. M.E.B. Bruxelles).

C'est ce que précisément nous trouvons dans les Écrits baha'is, qui vont jusqu'à dire:

"Aucun n'est ni mauvais, ni méchant (Causeries d`Abdu'l-Baha - éd. 1970. M.E.B. Bruxelles).

Si aucun n'est mauvais ni méchant, pourquoi alors perdre notre temps à chercher les défauts chez notre prochain, et, à plus forte raison, à considérer celui-ci comme rejeté par Dieu?

Le monde humain n'est-il pas comparable à une exposition d'"oeuvres d'art" de ce Grand Artiste qu'est Dieu? Avons-nous le droit de juger l'une de Ses "oeuvres d'art", et de dire qu'elle ne devrait pas être exposée, qu'elle devrait être éliminée? Une telle attitude plairait-elle à l'Artiste?

Sûrement pas, car ce droit c'est à Lui seul qu'il appartient. Si nous l'usurpons, nous ne pourrions que Le mécontenter. Ce serait même une attitude absolument répugnante d'après les Écrits baha'is, qui disent textuellement:

"Le défaut le plus répugnant, c'est de chercher les défauts des autres (Causeries d`Abdu'l-Baha - éd. 1970. M.E.B. Bruxelles).

Il est à remarquer que Jésus exprime aussi cette idée lorsqu'il dit:

"Pourquoi vois-tu la paille dans ]'oeil de ton frère, et n'aperçois-tu pas la poutre dans ton oeil." (Matt. 7/3)

Jésus, une fois de plus, s'exprime en un langage parabolique. Une fois de plus, ce langage parabolique est remplacé dans les Écrits baha'is par un langage ouvert, accompagné de raisonnement.

Et il en est de même pour toutes les paraboles de Jésus, et plus particulièrement encore pour le sermon sur la montagne.

De telle sorte qu'on peut dire qu'une partie des enseignements baha'is pourrait être comparée au sermon sur la montagne, codifié et justifié par un raisonnement conforme à la maturité de l'humanité.

Je dis bien: codifié sous forme de lois, parce que les paroles de Baha'ullah, "N'écoute pas et ne vois pas le mal", par exemple, deviennent une loi pour tout baha'i, loi que Baha'u'llah justifie en ajoutant: "Et ne t'avilis pas."

De son côté`Abdul'l-Baha dit:

"Tout défaut que nous voyons chez les autres, nous devons l'attribuer à nous-mêmes, car si nous n'avions pas ce défaut, nous ne serions pas en mesure de nous en apercevoir."

Ce qui paraît logique. En effet, si dans une conversation, je m'aperçois que mon interlocuteur dit un mot chinois, c'est que je possède le chinois.

Mais rien n'illustre cette idée aussi bien que cette histoire que je vais vous raconter.

Un homme voyageait en première classe. A un moment donné, son vis-à-vis sort du compartiment pour quelques instants. De retour il trouve sa place prise par un nouvel arrivant. Il la réclame donc, à quoi l'autre répond que s'il avait pris un billet de première, c'était pour avoir une place assise, et que cette place étant libre il était en droit de l'occuper.

- Mais cette place n'est pas libre justement. Je l'occupais avant vous.

- Est-ce que vous avez une réservation?

- Non.

- Alors?

La situation étant sans issue, appel est fait au contrôleur. Mais celui-ci ne sait pas, non plus, comment trancher la question.

A ce moment intervient notre bonhomme qui dit au contrôleur:

- Demandez donc à ce monsieur qui réclame sa place avec tant de véhémence, de présenter son billet.

Tout confus celui-ci le présente. Il était de seconde classe!

- Comment avez-vous découvert que mon billet était de seconde? demande-t-il à notre bonhomme avant de se retirer.

- C'est que, répond celui-ci, le bout de votre billet sortait de votre poche, et j'ai remarqué qu'il avait la même couleur que le mien.

Si donc notre homme s'était aperçu que son voisin était un resquilleur, c'est que lui-même, il l'était.

Voilà pourquoi en psychologie il est dit: si tu veux connaître les défaillances d'un homme, laisse le parler des autres.

Parler des défauts de notre prochain, c'est donc parler de nos propres défauts et, par conséquent, nous avilir aux yeux de tous.

Par contre, l'attitude inverse, c'est-à-dire louer notre prochain, attire davantage le respect à notre égard.

Autrement dit, une telle attitude nous élève aux yeux des autres. Cela me rappelle le cas de ce mari à propos duquel sa femme disait:

"Mon mari avait deux habitudes qui me gênaient. Un jour je lui ai demandé de s'en corriger. En échange, je lui proposais de me guérir de deux défauts de son choix.

- Mais je ne t'en connais aucun, m'a-t-il répondu.

Après cela comment pouvais-je ne pas le respecter davantage, oubliant complètement ses défauts?"

Conséquence logique: on arrive à un second commandement baha'i qui nous demande de chercher les qualités des autres et non pas leurs défauts.

C'est Abdu'l-Baha qui le recommande. Et toujours il a été le premier à en montrer l'exemple.

Faisant allusion aux défauts d'un homme, quelqu'un dit à `Abdu'l-Baha:

- Il n'a pas eu honte de passer toute une nuit au jeu de hasard.

- Quelle patience! lui fit remarquer `Abdu'l-Baha, quelle persévérance! Faire la même chose toute une nuit!

Pour nous résumer, disons qu'en cherchant les défauts des autres, nous nous avilissons; par contre, en cherchant leurs qualités, nous prenons de plus en plus conscience de notre dignité et de nos capacités latentes.

Et c'est précisément sur ce point qu'insistent le plus les Écrits baha'is, étant donné que l'humanité entre dans le stade de sa maturité. L'homme d'aujourd'hui n'est plus l'enfant d'il y a deux mille ans. Il est adulte et un adulte doit veiller constamment à ne pas commettre le moindre geste qui l'avilisse à ses propres yeux comme aux yeux des autres. La prise de conscience de sa dignité humaine doit l'emporter sur toute autre considération. Il doit donc y avoir une vérité qui conduit à cette prise de conscience. Cette vérité, l'homme peut-il la découvrir personnellement? Oui, disent les Écrits baha'is, puisque chacun a en lui une "lampe" qui, une fois allumée, lui permet de découvrir cette vérité directrice.

"Tu es Ma lampe, et Ma lumière est en toi. Sois donc illuminé par elle" disent les Écrits baha'is.

Quant à cette vérité, ne se présente-t-elle pas sous différentes formes? Et l'un de ses aspects, ne serait-il pas le fait de ne jamais se permettre de s'occuper des défauts des autres pour les juger, et, à plus forte raison pour les considérer comme rejetés par Dieu? Mais bien au contraire, être pénétré de cette idée que tous sont enfants de Dieu. Peu importe s'il y en a qui sont encore "enfants", ou qui restent encore "malades". Cet aspect de la vérité, dont nous avons déjà parlé, constitue le principe de base de la foi baha'ie. Il est connu sous le nom de principe de l'unité du genre humain.

Un autre aspect de la vérité ne serait-il pas le fait d'accéder à cette maturité qui permet de se considérer comme citoyen du monde? Ceci constitue un second principe de la foi baha'ie.

Un troisième aspect de cette vérité ne serait-il pas la prise de conscience de l'intelligibilité de la foi? Ce qui est encore un autre principe baha'i.

Un quatrième aspect de la vérité ne serait-il pas le fait de considérer le travail comme un acte d'adoration envers Dieu? Acte d'adoration qui, en tant que tel, doit être fait sincèrement et consciencieusement.

Voici encore un autre principe de la foi baha'ie. La vérité se présente sous bien d'autres aspects encore, chacun constituant un principe selon la foi baha'ie et tous ces principes étant l'esprit même d'aujourd'hui. Pourquoi, me direz-vous alors, pourquoi les gens n'allument-ils pas leur "lampe" afin de voir, afin de découvrir la vérité?

Là, je crois qu'il faut distinguer plusieurs catégories de gens.

Une première catégorie est constituée par ceux qui allument quand même leur lampe, mais moins pour voir que pour que les autres voient. J'entends par là les personnes qui reconnaissent la véracité des enseignements baha'is et qui en parlent partout. même par la voix de la presse. A titre d'exemple, je vous renvoie au périodique Planète de Paris, à La Presse de Montréal, à La Gazette de Lausanne, au Pourquoi Pas? de Bruxelles, etc...

Ce sont des gens qui, à force de faire l'éloge des enseignements baha'is, épouseront un jour cette doctrine. Ils me rappellent le cas de ce père qui était allé chercher une épouse pour son fils. L'ayant trouvée, il revint auprès de lui, et lui en paria avec tant d'ardeur et d'admiration que finalement il se dit: "au fond pourquoi ne l'épouserai-je pas moi-même?"

Une deuxième catégorie de gens est constituée par ceux qui ont allumé leur "lampe", mais qui voient à travers des verres tellement noirs que tout leur semble noir. C'est le cas de ce coiffeur dont je vais vous raconter l'histoire.

Un homme entre chez son coiffeur et lui dit:

- Coupez mes cheveux assez court, parce que je pars en voyage.

- Où partez-vous? demande le coiffeur.

- A Rome.

- C'est très bien d'aller à Rome. Mais pourquoi maintenant? Rome est mortelle à cette époque de l'année. Et comment y allez-vous?

Par la ligne Alita.

C'est une bonne idée de voyager par avion. Mais franchement, pourquoi Alita'? C'est la pire des lignes aériennes. Et où allez-vous loger? Chez des amis?

- Non, je descends à l'hôtel Excelsior.

C'est très bien de réserver une chambre à l'hôtel. Mais pourquoi justement Excelsior? On y est tellement mal servi. Et c'est tellement cher. Mais au fait, dans quel but vous allez à Rome et pas ailleurs?

- C'est pour être reçu par le Pape.

C'est une chance d'être reçu par le Pape. Mais, mon ami, vous serez perdu dans la foule, et le Pape ne vous verra même pas...

Un mois après le client revient pour se faire couper les cheveux.

Alors, votre voyage? demande le coiffeur.

Vol excellent. Rome est une merveille. Excelsior est un hôtel de première classe. Quant au Pape, il m'a dit quelques bonnes paroles, et lors de la bénédiction il m'a passé la main sur la tête.

- Et alors?

- Alors il m'a dit: "Qui vous a coupé les cheveux comme ça? C'est affreux. Vous devriez changer de coiffeur."

Eh bien, chers amis, si l'on soulève devant nous des objections telles que: "Comment ne pas juger les gens? Et ceux qui se disent incroyants, Dieu ne les rejette-t-Il pas? Et si Dieu les rejette, comment pourrions-nous les accueillir comme des frères?"

Si l'on nous tient un tel langage,... "changeons de coiffeur"! Car au fond, comment peut-on juger les gens, alors que personne ne peut dire qui, à la fin, sera jugé bon. Judas n'était-il pas le trésorier de Jésus? Et à la fin ne l'a-t-il pas trahi? Saül ne persécutait-il pas les chrétiens? Et à la fin n'est-il pas devenu un des apôtres les plus fervents du Christ?

Si l'on nous dit: "Occupez-vous de votre pays, ce qui se passe ailleurs ne vous regarde pas."

Si l'on nous tient un tel langage, "changeons de coiffeur"! Car ce qui se passe ailleurs, précisément nous regarde. Ce qui se passe au Vietnam, par exemple, nous regarde pour la simple raison que, mis à part le côté purement humain, les milliards de dollars qui s'y perdent ont entraîné la dévaluation de cette monnaie, et contraint les États-Unis à prendre des mesures qui ont affecté notre économie et, par conséquent, notre vie quotidienne. Nous devons donc considérer ce pays comme le nôtre, et ses habitants comme nos concitoyens.

Si l'on nous dit: "C'est bien beau d'accepter dans la foi ce qui est d'accord avec la raison, mais ne touchez pas aux rites. Peu importe s'ils ne satisfont pas votre raison, car en les abolissant vous détruiriez la foi."

Si l'on nous tient un tel langage, "changeons de coiffeur"! Car si à l'âge de la raison, on demande à un homme d'accepter ce qui contrarie sa raison, sa conscience n'est pas tranquille. Et le but de la foi qui est précisément la tranquillité de la conscience, n'est pas atteint.

Si l'on nous dit: "Faire consciencieusement son travail, ce serait idéal si tout le monde le faisait. Mais en attendant n'y pensez même pas. Sauvez les apparences, comme tout le monde, et profitez au maximum. Autrement vous êtes perdu."

Si l'on nous tient un tel langage, "changeons de coiffeur"! Car la fausse monnaie qu'on nous a encouragés à mettre en circulation, tôt ou tard nous sera rendue. Et nous en serons confus et écoeurés. Faisons notre travail consciencieusement, et nous verrons qu'en définitive, mystérieusement, c'est le travail consciencieux qui nous sera rendu.

On peut encore parler de bien d'autres aspects de cette vérité qui est l'esprit même de notre époque. Résumons-les en disant qu'il est temps de considérer tous les hommes, sans distinction de religion, de façon de penser, ou de pays d'origine, comme de bons Samaritains, tout en agissant, à leur égard comme le bon Samaritain.

Commençons cette expérience à l'échelon local, dans la vie quotidienne. Commençons notre journée par un geste qui réjouit un coeur: un coup de téléphone à un malade; une lettre d'encouragement à un homme accablé par les épreuves, une courte visite à une personne âgée et solitaire. Et nous verrons comment, intérieurement, nous en ressentirons une profonde joie; et comment, mystérieusement, nous serons réjouis par une bonne nouvelle inattendue. Continuons notre journée en venant en aide à un homme en difficulté. Et nous verrons comment, mystérieusement, nos propres difficultés, apparemment insurmontables, disparaîtront comme les murailles de Jéricho.

C'est à une telle expérience que la foi baha'ie nous invite, expérience qui, une fois tentée, nous amènera à nous écrier du fond du coeur:

QU'IL FAIT BON VIVRE,
LA VIE MÉRITE D'ÉTRE VÉCUE.
MERCI LA VIE!

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