Médiathèque baha'ie

LE BAYAN ARABE

Le livre sacré du babisme
de Séyyèd Ali Mohammed, dit le Bâb

Retour à la bibliothèque    Texte du Bayan arabe Chapitre suivant


Table des matières

Avant-propos
   Le Bâb et le soufisme
   Le Bâb et l’incarnation
   Le Bâb et la Science
Préface
   Porte 2 – dans l’explication de la Balance de Très Haut
TEXTE DU BAYAN ARABE

Regarde les chrétiens : comme ils accusent Dieu de mensonge quand ils disent qu'Il n'est qu'une des trois personnes de la Trinité.
(Le Bâb - Réponse au Vaqayé Nigar d'lsfahan.)

Traduit de l'arabe par A.-L.-M. Nicolas, premier interprète de la légation de France à Téhéran. Ernest leroux, éditeur, 28 rue Bonaparte, Paris. Année 1905
Le Puy-en-velay - imprimerie R. Marchessou. Peyriller, Rouchon & Gamon.

* AVERTISSEMENT du compilateur du texte au format informatisé
Ces textes informatiques ont été scannérisés à partir du livre de «A.-L.-M. NICOLAS» qui est une traduction des différents écrits du BAB et contient également sa traduction d’un des livres saints de la révélation BABIE : «LE BAYAN ARABE».
«A.-L.-M. NICOLAS» y rajoute beaucoup de notes personnelles. Ces notes ont été rapportées telles quelle, sans aucune modification ni vérification. Elles n’engagent que son auteur.
Les noms persan et arabes ont été rapportés également tels que «A.-L.-M. NICOLAS» les a écrit dans sa traduction Par exemple le «Béyân» s’écrit aujourd’hui le «Bayan», ou le «Qoran» serait écrit «Coran», ou «Béhahisme» s’écrirait «foi baha’ie». Ces scripts ne sont donc pas compatibles avec les ordonnances de Shoghi Effendi, le gardien de la foi de Baha’u’llah, quand à la transcription des orthographes des noms ARABES et PERSAN mise en place par lui.
De temps en temps le traducteur utilise l’écriture ARABE ou PERSAN pour certaines explications. A cause de la difficulté de combinaison des différentes écritures dans un traitement de texte français, nous n’avons pas pu les transcrire tels qu’ils ont été écrits. Nous les avons donc remplacé par des lettres latines.
EN CONCLUSION IL FAUT SAVOIR QUE CES TRADUCTIONS NE SONT PAS POUR L’INSTANT VALIDEES NI REVISEES PAR LES INSTITUITIONS COMPETENTES. NEANMOINS CETTE TRADUCTION PEUT PERMETTRE AUX CHERCHEURS OCCIDENTAUX, NE CONNAISSANT PAS LES LANGUES DES REVELATIONS BABIE ET BAHA’IE, DE POUVOIR APPROFONDIR LEURS CONNAISSANCES SUR CES RELIGIONS DU 19ème SIECLE.
Et pour terminer voici un extrait de ce que «A.-L.-M. NICOLAS» dit lui même de cette traduction :
«Pour le moment qu'il me suffise de dire que l'ouvrage que j'offre aujourd'hui au public est un essai de traduction du Béyân arabe ; je dis essai, d'abord parce que certaines parties de cet ouvrage sont extrêmement obscures et demandent pour être à peu près comprises, l'appui du Béyân persan, et secondement parce que la langue dans laquelle il est écrit ne m'est pas aussi familière que le persan. Je puis cependant affirmer que cette traduction est consciencieuse et que je me suis entouré, avant de la livrer à l'imprimeur, de toutes les précautions possibles et imaginables : je n'ai épargné ni les démarches, ni les demandes de renseignements et je pourrais presque dire que cet ouvrage a été traduit en collaboration avec mes amis persans (parmi lesquels je dois surtout citer Hadji Séyyèd Ali Isfâhâni) si ceux-ci savaient le français.»
FB


AVANT-PROPOS

Il survient parfois, dans la critique européenne, des phénomènes bizarres qui ont trait à certains points spéciaux de la littérature orientale et qui déconcertent par leur étrangeté. Le plus inattendu de ces phénomènes est certes celui dont il nous est donné depuis quelque temps d'être les témoins et qui consiste à refuser avec les anglo-saxons le titre de soufi à Khéyyâm, pour l'accoler, avec l'École française, au nom de Séyyèd Ali Mohammed le Bâb, qui fut pourtant, de son vivant, l'ennemi acharné de cette secte et dont toute la doctrine est en opposition flagrante avec le panthéisme oriental

Ce résultat est fait pour stupéfier quiconque connaît un peu la Perse et sait ce qu'est un soufi, ce qu'était un bâbi, ce que peut être un Béhâhi ou un Ezéli. Ce n'est d'ailleurs pas la première aventure courue par le Bâb en Europe, je devrais dire en France. Il eut pour fortune singulière d'être - plutôt de force - enrégimenté par M. de Gobineau, parmi les élèves de Molla-Sadra. Le professeur et l'élève durent être fort scandalisés, mais ils ne dirent rien, et pour cause.

Khéyyâm ne peut nous intéresser ici (Voir «la Divinité et le Vin» chez les poètes persans) ou nous nous occuperons simplement de rétablir sous son vrai jour la physionomie si curieuse et si expressive du héros Chirazi; et, pour ce faire, après quelques réflexions préliminaires, nous lui laisserons la parole; il s'en servira, j'aime à le croire, de façon à nous éclairer complètement sur ses idées et sur ses croyances.

J'ai rencontré en Europe trois accusations contre le Bâb.

Primo : on dit qu'il est soufi;
Secundo : on l'accuse de prêcher l'incarnation;
Tertio : on affirme qu'il interdit à ses sectateurs l'étude des sciences (Nous répondrons en même temps et par une simple citation aux allégations de M. de Gobineau)


I. Avant-propos : Le Bâb et le soufisme

De ce que Séyyèd Ali Mohammed prétende expliquer le sens intime du Coran, il ne s'en suit pas qu'il partage les doctrines du Mesnévi, du Mantèq out Taïr et de tous les ouvrages qui ont un caractère mystique; de ce qu'il affirme qu'on rencontre Dieu où que l'on porte ses regards, il ne s'en suit pas qu'il soit panthéiste, car c'est là une affirmation qu'on rencontre même dans le Catholicisme, dès que l'on veut prouver l'existence de Dieu; affirmation qui se résume dans la formule à «l'oeuvre on connaît l'artisan» ; de ce qu'il recommande de s'affranchir de tout ce qui existe pour découvrir «la mer du savoir» et trouver Dieu partout, nous ne sommes pas obligés de le classer parmi les soufis, pas plus que parmi les solitaires de la Thébaide; de ce qu'il emploie un vocabulaire qu'on a plutôt l'habitude de rencontrer dans les livres des mystiques, faute de lire les ouvrages de l'orthodoxie chiite, il ne s'en suit pas que ce vocabulaire ait le même sens ni la même valeur chez les uns et chez les autres; de ce qu'enfin le Bâb ait recours à la Talismanique, il ne faut pas le rapprocher de telle ou telle secte des temps passés : d'autant que l'usage qu'il en fait est contraire à celui qu'on en faisait, les conclusions qu'il en tire sont bien différentes de celles auxquelles l'on arrivait d'habitude. Je ne crois vraiment pas qu'on puisse soutenir que Saint-Jean était un ismaélien parce qu'il donne dans son Apocalypse le chiffre de la Bête.

Tout cela est certes bien superficiel et provient surtout de ce que l'on a hâte de juger avant de bien savoir. Le Bâb nous dit cependant quelque part: «Pour bien connaître ma pensée il faut lire mes ouvrages d'un bout à l'autre»

Le grand inconvénient est que l'erreur est lancée et peut faire son chemin dans le monde malgré ce qu'écrit le Bâb à Mirza Hassan Vaqayé Nigar à Esfahan (voir la Sourate Tauhid) :

«Au sujet de ce que tu avais dit dans ta lettre relativement à ce que les hommes ont divergé à mon sujet et que certains même ont dit à mon égard des choses inconvenantes : il n’ y a pas de doute que la plupart des hommes se donnent leurs propres passions comme Dieu, car ils parlent conformément à ce que leur dictent leurs passions. Bientôt Dieu les châtiera à cause des mauvaises oeuvres qu'ils accomplissent. Mais cet état, cette manière d'être des hommes n'est pas chose extraordinaire, car en tous temps il s'est rencontré des hommes pour accuser à tort leur Dieu de mensonge. Regarde les chrétiens comme ils accusent Dieu de mensonge quand ils disent qu'il n'est qu'une des trois personnes de la Trinité ! Vois les Juifs qui disent que Ozéir est le fils de Dieu.» (Le Bâb ne parait pas ici très partisan du dogme de l'incarnation)

Dans le Riçalé Zahabiyè (Lettre d’orée), le Bâb répond lui-même, en ce sens, à l'un de ses disciples, Djévad, qui semble avoir flotté indécis entre la nouvelle révélation et les affirmations contraires des sectes orthodoxes. Ce Djévad avait certainement dû être un soufi avant de se faire bâbi puisqu'il avait un mourchid (Mourchid est le terme technique pour indiquer le chef, le Directeur spirituel, le Pir, celui qui guide dans les sentiers de la connaissance. Ce terme est exclusivement employé pour désigner un chef Soufi). Ce mourchid lui avait remis des versets fabriqués par lui pour lui donner la possibilité de les comparer avec ceux de Séyyèd Ali Mohammed.

Djévad fort embarrassé, ne trouva pas de moyen plus simple que d'envoyer ces versets au Bâb, qui répondit :
«O Djévad ! tu as envoyé vers moi de l'encre noire dans ces papiers que tu m'as fait tenir de la part de celui qui veut guider les hommes vers le secret de la vérité». (Celui qui veut guider les hommes vers le secret de la vérité est le chef spirituel soufi, le mourchid)

O Djévad! crains l'ordre de Dieu! En vérité la promesse universelle arrive au jour de la séparation» (Du bon d'avec le mauvais, c'est le jour du jugement). En vérité! ton mourchid ne m'a pas connu et ne m'a pas vu. S'il avait avis de ce que Dieu a jeté dans mon coeur et qu'en vérité IL FUT A LA RECHERCHE DE LA VÉRITÉ PURE, il n'eut pas placé ses paroles menteuses en face des versets. J'en jure par Celui quia mon être entre ses mains, celui qui dans son traité a écrit qu'il a apporté des versets semblables aux miens, a prononcé des paroles qui sont un mensonge absolu, une accusation contre Dieu, une affirmation sans bases. Eloigne ton être du mensonge de CES GENS-LA (Ces gens-là. On remarquera que le Bâb parle ici d'un mourchid, d'un soufi, et que généralisant il dit ces gens-là, pour dire les soufis»). LES PAROLES QUI SORTENT DE LEURS BOUCHES sont loin de leurs rangs (Ce sont des hypocrites). Ils ne parlent que pour dire des mensonges. Il semblerait que toi tu regrettes que ceux-là (les soufis) ne donnent pas leur foi ! Sache, qu'en vérité, la violence est le salaire des violents et la malédiction de Dieu atteint les menteur.

…Si tu (II s'adresse ici au Morchid) donnes comme témoignage les macérations dans la route de Dieu et l'attirance de Dieu, en vérité! Dieu a la puissance de faire parvenir l'esclave au plus haut degré de l'existence sans ces macérations, sans cette attirance (Ceci est la négation même du soufisme qui exige de ses adeptes le «Zoouq» grâce, attirance de Dieu et les Riazat), car Dieu fait ce qu'il veut, de la façon qu'il le veut. Sache en vérité, que l'honneur de ces macérations, de ces attirances n'est qu'à cause de l'arrivée au degré de la connaissance de l'essence (Elles ne valent rien par elles-mêmes : nouvelle négation du soufisme). Donc, si Dieu fait parvenir quelqu'un à ce degré sans ces deux moyens, il n'a pas besoin d'eux. Si tu dis que le témoignage est dans l'amour de Dieu, dans le secret divin, dans la forme éternelle et la lumière divine, dans la forme hors de la matière humaine pure de mauvaises qualités, dans les attributs de sainteté, dans les manifestations qui subsistent par elles-mêmes, dans les rangs de ce bas monde, dans la majesté de l'autre, dans ce que Dieu a créé sans fin et sans fin, en vérité Dieu m'est témoin que tout cela existe en moi. Chaque chose a une vérité (essence), chaque arrivée au but a une lumière divine. Or toi, aujourd'hui, tu sais que ceux qui sont comme toi des Ouréfa (Aréf - singulier ;Ouréfa -pluriel : mots qui servent à désigner exclusivement les soufis : Irfan : soufisme), et les autres, tous prétendent à ce degré (d'amour de Dieu), et cependant ils se renient mutuellement les uns les autres. Il en est de même pour les gens du Chériat» (Les orthodoxes, ceux qui suivent la pure doctrine de l'Église Chiite)

Si nous continuons un peu la lecture de cette très longue réponse nous verrons quelles sont les sectes dont le Bâb se sépare absolument : «Si quelqu'un ne boit pas de cette eau, dit-il, pour lui il n'y a plus de jouissance dans l'Unité, il n'y a plus de route dans le rang de la Nudité. En vérité la plupart des Oulémas Echraqiins et méchchahiins et Sadrayins (1) et Elahyins (2) leurs pieds ont glissé dans l'explication de ce monde.

(1) .Les partisans de Molla Sadra dont le Bâb ne fait pas partie quoiqu'on en ait dit.
(2) Les partisans de Hékim Elahi, Si «leurs pieds ont glissé» c'est qu'ils se sont trompés. Peut-on admettre que le Bâb dise «telle secte se trompe et j'en fais partie». N'est-il pas vrai que de ce qu'il affirme qu'elle se trompe, il affirme qu'il n'en fait pas partie. Dès lors il n'est ni de la secte de Hékim Elahi, ni de celle de Molla Sadra.

Ils se sont trompés : le rayonnement de l'essence sur les existences ils l'ont pris pour l'être même de l'essence. C'est pourquoi ils MENTENT quand ils disent que les vérités sont fixées dans l'essence. Et ce mensonge ils l'ont dit pour établir la science de Dieu. Ils disent que la Vérité de l'existence est simple pour établir la causalité de l'essence; et ils parlent de la relation entre l'essence et les actes et attributs, ils parlent de l'unité d'existence entre le Créateur et le créé. Or, tout cela n'est, pour les gens de Dieu, QU'ASSOCIATION absolue, car Die était savant avant l'existence de chaque chose, ainsi qu'il était vivant. De même que Dieu n'a pas besoin dans sa vie de l’existence d'un autre que lui, il n'a pas besoin dans sa science de l'existence de l'objet de la science : en vérité l’essence ne se conjugue avec rien (Encore ici le Bâb ne semble pas partisan de l'incarnation). En vérité, la cause des contingences est une Création de Dieu, et c'est la Volonté. Dieu a créé cette Volonté d'elle-même sans qu'un feu lui parvint de l'essence divine: il a créé toutes les existences par l'entremise de cette Volonté et cette Volonté raconte (pour l'explication de ce terme, voir le Traité des sept Preuves) toujours son être même et ne démontre que son essence. Dans les contingences il n’y a aucun verset qui démontre l'essence de Dieu, car LA VÉRITÉ DE DIEU ÉLOIGNE TOUTES LES CONTINGENCES DE SA CONNAISSANCE ET L'ESSENCE DE DIEU REND IMPOSSIBLE LA COMPRÉHENSION DE TOUTES LES ESSENCES. En vérité! la relation de la Volonté avec Dieu est comme celle de la maison (la Kaaba que Dieu a appelé sa maison) avec l'être suprême.

Cette relation est une relation d'honneur pour la créature, mais non pas pour l'essence, car Dieu est pur, etc.

Il est impossible de parler d'une façon plus nette, plus précise et plus anti-soufie.

Si cela ne suffisait pas, qu'on écoute le Bâb encore dans la sourate AC (sourate aux oulémas) qui est datée de la cinquième année de la manifestation :
«Aujourd'hui il y a cinq ans qu'il a crié de sa plus haute voix. Venez à moi ! «Venez à moi ! non pas par la pensée, non pas par imagination, non pas par des PAROLES SOUFIES, non pas par des mots infidèles! En vérité! c'est moi le savant en la vérité certaine avec les plus hauts arguments.»

Et enfin quelque chose de plus précis encore. Sous le numéro 22 de la Réponse aux questions de celui qui a fait hégire vers Dieu, S. E. Molla Ahmed, qui se trouve à la page 102 de mon exemplaire de la Sourate Tauhid je lis :
«Et si moi je demande à tous les gens de la terre au sujet de la raison de leur foi, ils ne peuvent rien dire si ce n'est qu'enfin de compte, leur réponse retourne au livre qui confirme leur religion. Ce qu'ils comprendront à la fin, s'ils le comprennent dès le début, ils seront heureux dans la route de leur Seigneur, et ils remercieront leur Dieu à cause de ce qu'il leur a donné dans sa bienveillance. Et ceux-là, nuit et jour, se prosternent devant Dieu et moi je te demande pardon, ô mon Dieu, de ce qu'on m'a attribué la mention de la lettre Sàd (1). Aujourd'hui tous les hommes auprès de moi sont égaux, si ce n'est ceux qui obéissent à la Vérité qui vient de toi et qui croient à tes versets.»
(1) [nota: c'est la première lettre du mot Soufisme qui d'ailleurs, dans mon exemplaire est écrit sous la formule Es Sad.]

Tous les hommes sont égaux à mes yeux, sauf ceux qui obéissent à la vérité : qu'est-ce que cela veut dire? Il est évident que le Bâb entend par ces paroles : que m'importent ceux qui ne croient pas ! ils sont tous égaux à mes yeux et dans leur impiété ! seuls sont dans la vérité ceux qui m'ont donné leur foi! Juifs, chrétiens, catholiques, protestants, sunnites, chiites, soufis, philosophes c'est tout un ; tous sont dans l'erreur, tous se détournent de Dieu, tous sont des blasphémateurs.

C'est dans toute l'immense production littéraire du Bâb qu'il faudrait puiser pour y trouver à chaque mot de son oeuvre l'horreur et le dégoût que lui inspire le soufisme: Cela va jusqu'au point qu'il écrit à Molla Hassan Bedjestani (La lettre est contenue dans le manuscrit que j'ai intitulé A.G).

«Oh donc toi qui as choisi de voyager dans la route de Dieu, remercie Dieu par ta science en Dieu, car nous avons lu ta lettre d'auparavant, et nous avons fait descendre sur toi les versets et les explications dans lesquels était l'ordre de la justice. Maintenant nous avons lu ta lettre, cette lettre qui respirait par les pensées fausses qu'elle renfermait l'atmosphère des imaginations mensongères des hommes. Donc si cette personne qui a écrit cette lettre est autre que des élèves de Séyyèd Kazem, je ne dois même pas ouvrir cette lettre. (nota : Séyyèd Kazem Rechti, élève et successeur de Chéikh Ahmed Ahçai comme chef de la secte chéikhie. On sait que le Bâb les considère comme deux précurseurs)

Après la mort de Séyyèd Kazem, certains chéikhis reconnurent la révélation de Séyyèd Ali Mohammed, d'autres, en moins grand nombre suivirent la doctrine de Kérim qui se déclara le véritable successeur de Séyyèd Kazem.

Les preuves que j'ai données dans mon Séyyèd Ali Mohammed que le Bâb considérait chéikh Ahmed et Séyyèd Kazewi comme ses deux précurseurs pouvant ne pas suffire à ceux qui veulent à toute force faire du Prophète un soufi, je citerai ici ce passage de sa réponse à Molla Hassan Bedjestai:
«Et Ahmed et Kazem, s’ils vivaient tous les deux et reniaient le témoignage des versets de Dieu, ils n'eussent été ni l'un ni l'autre des PORTES pour religion de Dieu. Et alors il eut été convenable pour moi de lancer la sentence contre eux de la façon que Dieu l’a permis dans son livre».

Le dédain est là absolu pour tous, sauf pour deux catégories de personnes bien nettement définies : celles qui croient au Bâb et celles qui, n'y croyant pas encore, sont cependant sur la voie, éclairées qu'elles ont été d'une part de la vérité par Séyyèd Kazem Rechti, dont elles sont les élèves.

Le reste n'est pas digne qu'on s'occupe de lui, or le reste comprend les soufis.

D'ailleurs toute l'oeuvre du Bâb démontre surabondamment qu'il n'est l'élève de personne :
Il ne relève que de Dieu. En lui, comme en Jésus, comme en Mohammed, comme en Moïse, s'est réfléchie la Volonté Primitive : il n'est plus qu'un miroir et c'est elle qui raconte en lui, par lui, ce qu'elle raconte. Il ne faut pas oublier qu'il est Prophète, et nous aurions mauvaise grâce à lui disputer ce titre, car il l'a payé du plus pur de son sang. Traitons-le donc en conséquence, et n'allons pas le rabaisser au rang d'un philosophe ordinaire. Si nous trouvons qu'il ment, nous n'avons plus à nous occuper de lui ; si au contraire il dit vrai, nous devons nous prosterner. C'est là sa prétention, et nous devons nous mettre sur son terrain pour le juger.
Au surplus, et pour en finir avec cette question, laissons lui sur ce sujet une dernière fois la parole.

«Maintenant que tu connais les significations vraies de ce monde, sache que, aujourd'hui, dans la branche des Esna Achéri, les divergences sont arrivées à leur comble. Quelques-uns, connus sous le nom de OUÇOULI se croient en la possession de la vérité, parce qu'ils ont la science du Zènn (Analogie), au sujet duquel ils s'accordent tous; d'autres, connus sous le nom d'AKHBARI se croient dans la vérité parce qu'ils n'acceptent pas le témoignage de l'intelligence brillante; d'autres, connus sous le nom du feu Chéïkh Ahmed, fils de Zènn ed din, - que Dieu bénisse la poussière de son tombeau - se croient en possession de la vérité absolue et pure. Ils n'ont cependant pas compris le dixième des paroles de cet illustre unitaire ! D'AUTRES SONT CONNUS SOUS LE NOM DE SOUFIS, ET ILS CROIENT POSSÉDER LE SENS INTIME DU CHÉRIAT ALORS QU'ILS SONT DANS L'IGNORANCE TANT DE SON SENS APPARENT QUE DE SON SENS INTIME ET EN SONT TOMBÉS LOIN, BIEN LOIN ! PEUT-ÊTRE PEUT-ON DIRE D'EUX QUE CES GENS QUI N'ONT AUCUNE INTELLIGENCE ONT CHOISI LA ROUTE COMPLETE DES TLNEBRES ET DU DOUTE.» (voir à la Préface, la traduction des Sahifé Adliyé - revue des preuves)


II. Avant-propos : Le Bâb et l'incarnation

Une seconde erreur, tellement extraordinaire qu'elle en est incroyable consiste à affirmer que le Bâb admet l'incarnation, et qu'il accepte que les différents Prophètes qui se sont succédés sont les divers aspects de la Divinité descendant de son rang de Créateur pour revêtir les vêtements de la créature.

Jamais une pareille idée ne pourra pénétrer dans le cerveau d'un Persan, pourvu que ce persan ne soit pas atteint d'aliénation mentale. Ce qui déplaît le plus aux chiites, ce qui les exaspère jusqu'à la furie ce n'est pas que nous niions la mission de Mohammed, ce n'est pas que nous buvions du vin, ce n'est pas que nous mangions du porc, ce n'est pas que nos femmes sortent visage découvert, ce qui pourtant est le comble de l'abomination, c'est notre croyance en la

Divinité du Christ, c'est notre foi en l'incarnation. C'est là pour eux un blasphème inouï et qui nous rend dignes des châtiments les plus violents et les plus éternels ; et la pensée que nous pouvons être convaincus de la vérité d'une invention aussi scélérate leur donne la nausée.

Pourquoi dès lors attribuer une telle idée au Bâb? pourquoi et sur quoi se base-t-on? Ne dit-il pas partout que Dieu est inaccessible, qu'aucune intelligence ne le peut concevoir, aucun nom le désigner, aucun qualificatif l'atteindre. Ne creuse-t-il pas un fossé à jamais infranchissable entre le Créateur et la Créature, et n'est-il pas dès lors, obligé de commenter la fameuse parole de Dieu dans le Qoran : «Peut-être finirez-vous par croire que vous serez un jour en présence de Votre Seigneur?» Écoutons-le d'ailleurs, c'est encore le seul moyen que nous ayons de répondre à ses contradicteurs.

Dans le Sahife Adliyé il est dit :

«Si tu contemples aujourd'hui les rangs précédents, tu les verras comme les rangs du progrès de la semence. Sache que Dieu a tout créé pour le jour du jugement qui est le jour de la Manifestation de Son être, ainsi que le dit ce verset du Qoran : C'EST DIEU QUI À ELEVE LES CIEUX SANS COLONNES VISIBLES ET S'EST ETABLI SUR LE TRÔNE - IL A SOUMIS LE SOLEIL ET LA LUNE ET CHACUN DE CES ASTRES POUSUIT SA COURSE JUSQU'A UN POINT DÉTERMINÉ ; IL MANIE LES AFFAIRES DE L'UNIVERS ET FAIT DISTINCTEMENT SES MERVEILLES. PEUT ETRE FINIREZ VOUS PAR CROIRE AVEC CERTITUDES UN JOUR VOUS SEREZ EN PRÉSENCE DE VOTRE SEIGNEUR» (Qoran XIII, 2).
Il n'y a pas de doute que cela ne veut pas dire : la contemplation de l'essence de Dieu, car c'est là chose impossible et inaccessible. Cela veut dire la contemplation de Celui qui est manifesté dans la manifestation et en qui on ne peut voir que Dieu. C'est exactement comme si tu plaçais un miroir en face du soleil : en ce miroir on ne peut voir que le soleil.

Contempler Dieu ne veut pas dire: le voir avec son oeil matériel, cela veut dire le voir avec l'oeil de son coeur. Vois, par exemple, aujourd'hui les croyants : tous ne regardent avec l'oeil de leur coeur que le Prophète de Dieu, tandis que les non croyants, comme ils ne le regardent pas, restent dans l'obscurité. Contemple la manifestation nouvelle [nota : Le Bâb]. Combien de personnes le voient [id. L’être manifesté, c'est-à-dire le Bâb], mais, comme elles ne le regardent pas avec l'oeil du coeur, ELLES NE LE VOIENT PAS et ne connaissent rien à son sujet. Combien de personnes au contraire, qui ne le voient pas, mais qui le connaissant par la vue du coeur, le REGARDENT ET LE VOIENT. Voilà la différence entre le croyant et celui qui ne croit pas.» [nota : Les premières le voient matériellement puisqu'elles sont dans la ville où il se trouve, mais elles le voient sans le VOIR, tandis qu'au contraire des gens de la province et qui n'ont jamais été en sa présence le voient et croient en lui]

Toutes les oeuvres du Bâb, tant Arabes que persanes, tant versets qu'oraisons, tant commentaires que réponses sont pleines de cette pensée. Ouvrons ses écrits et lisons: «Dans le deuxième verset de la Sourate «Le Tonnerre» [nota : Sourate XIIIe révélée à Makou, manuscrit AA.] , où il est mentionné qu'on doit voir Dieu, et que cette vue a été la cause de la création des cieux et de la terre, il est hors de doute que la signification du mot être en présence» n'est pas être en présence de l'essence éternelle, mais bien la vue dont on peut jouir sur le mont de Makou». [nota : C'est-à-dire le Bâb qui est emprisonné sur le mont de Makou.]

«Il n’y avait pas, il n’y a pas de doute que la signification [nota : d’être en présence de Dieu.] ne soit pas la contemplation de l'essence éternelle, car elle est inaccessible. Les yeux ne la peuvent percevoir alors qu'elle perçoit toutes les créatures. C’est elle l'impondérable, celle qui sait. Le sens est peut-être la contemplation de la forme de la Vérité : aussi Dieu a appelé la Kaaba sa maison : cependant il est bien au-dessus d'un lieu, d'une limite. Il en est de même pour la mention de la contemplation et si tu descends de quelques degrés alors le Ziarét Djamèh te parle à ce sujet car tu y dis aux imamis : Celui qui vous connaît, connaît Dieu.» [nota : Extrait de la pièce intitulée, Le meilleur gardien, Séyyèd 92 (=Mohammed).]

«Tout ce qu'il y a sur la surface de la terre, si tu le vois, n'est que comme un cadavre: et cette mort c'est la mort à la foi, non la mort corporelle.»

«Donc (1), l'existence du Velayet dépend de la parole du Prophète, et la qualité de Prophète vient de la parole de Dieu que prononce le Prophète. EN VÉRITÉ L'ESSENCE ÉTERNELLE NE S'INCARNE EN AUCUNE CRÉATURE.» [nota : Extrait de la Sourate révélée à Makou (manuscrit A. A.)]

«Le début de la manifestation de la Primitive Volonté est de la Volonté elle-même, comme le prophétisme du Prophète se base sur les paroles qu'il prononce, etc.»

«Tu m’as interrogé sur le sens des paroles DIEU N'A PAS ENGENDRÉ ET N'A PAS ÉTÉ ENGENDRÉ, RIEN NE LUI EST SEMBLABLE». [nota : Dans mon volume de la Sourate Tauhid, à la page 209, réponse à Mirza Hassan Vaqayé Négar à Esfahan]

«Il n’y a pas de doute qu'éternellement Dieu était alors qu'il n’y avait rien d'autre que lui. Et maintenant il en est comme il en était auparavant. Et cette parole est comme ce verset: Ne choisissez pas deux Dieux ! certes ! certes ! Dieu est unique, donc, craignez moi, moi seul, ô mes esclaves». [nota : Le Qoran lui-même lance l'anathème sur ceux qui croient en l'incarnation de Dieu en Jésus, ce que le Qoran fait, le Bâb le fait aussi, et ce qui était vrai suivant le Qoran reste vrai suivant le Béyân]

«Il n’y a pas de doute qu'il est impossible qu'il y ait deux dieux en ce monde !»

Dans sa réponse à Séyyèd Taghi qui se trouve à la page 79 de mon exemplaire de la Sourate Tauhid il est écrit :
«La troisième question que tu as posée est le sens de la parole des philosophes qui disent D'un ne peut être créé qu'un.» [nota : C'est-à-dire: tu m'as demandé le sens de la parole]

«L'essence même de cette parole est un mensonge quand la cause veut dire l'essence éternelle et absolue de Dieu. Dieu ne se conjugue [nota : ou ne s’incarne] jamais avec une chose et, jamais rien ne sort (de l'être) de Dieu. Cette qualité de Dieu [nota : Qui consiste à ne pas engendrer et à ne pas être engendré] est prouvée en tout état. Si le sens de la Cause» est le premier Zikr [nota : Voir le Traité des Sept Preuves], c'est-à-dire celui que Dieu a créé lui-même, alors cette parole devient vraie: autre qu'Un, en effet, ne peut expliquer l'action de l'essence d'être Unique. C’est là la religion des imams purs.»

«C'est ainsi que Dieu, dans le hadis Qoutsi [nota : Dieu y parle à Mohammed] interpelle Jonas : O Jonas ! connais -tu la Volonté?» Jonas répondit «Non». Dieu dit «La Volonté est le premier Zikr». «Il n'est pas possible que Dieu crée une chose ex nihilo à moins que cette chose soit unique, car le premier rang du Zikr est de démontrer l'Unité de Dieu., Dans le commencement du degré de l'Unité il n'est pas possible d'être autre qu’Un. La parole que disent les philosophes que la cause de toutes les existences est l'essence de Dieu» est un mensonge. IL N'Y A PAS DE CONJUGAISON [nota : ou d'incarnation de Dieu] ENTRE DIEU ET LES CHOSES. IL N'EST PAS ADMISSIBLE QUE LESSENCE DE DIEU SOIT UN LIEU DE CHANGEMENT.»

«Il doit y avoir similitude entre la cause et l'effet. Donc, la vérité est ceci que la cause des choses est ce premier Zikr que Dieu a créé ex nihilo. Et il en a fait la cause de toutes les créatures, ainsi que le dit l'imam, sur lui soit le salut ! LA CAUSE DES CHOSES EST L'INDUSTRIE DE DIEU ET CETTE INDUSTRIE NA PAS DE CAUSE»...

«Et en ce monde il n’y a pas de Créateur si ce n'est Dieu seul. Donc de même qu'il est nécessaire pour l'esclave d'unifier l'Essence, de même lui est-il obligatoire d'unifier Dieu dans ses attributs, dans ses actes, dans son adoration. Sans ces trois unifications aucun acte des esclaves n'est agréé».

«Dans le rang de Premier Zikr, qui est le plus GRAND DES DEGRÉS DE LA CRÉATURE [nota : Si l'on a bien compris ce que nous avons dit du Premier Zikr dans le traité des Sept Preuves, on trouvera que cette parole suffit pour prouver la vérité de nos affirmations] , il faut que ce premier Zikr existe pour quatre causes. La cause faélé [nota : Sa création par Dieu], l'illèt Maddé [nota : Son être même], l'illèt Souri [nota : Sa forme], l'illèt Qahi [nota : Son utilité, son fruit]. Son existence n'est possible dans le monde des nouveautés [nota : Houdous: nouveau, par opposition au monde éternel ou qadim] qu'à l'aide de ces quatre aspects, car chaque chose, pour manifester son existence doit avoir un élément de feu, un élément d'air et d'eau pour conserver cette existence, et un élément de terre Pour accepter ces degrés. Aussi quand ceci est descendu d'un degré, ces degrés deviennent au nombre de sept. C'est pour quoi l'imam dit : «Aucune chose n'existe dans le ciel ni sur la terre si ce n'est par l'intermédiaire de sept choses: la volonté, le désir, le destin, le sort, la permission, le temps, le devoir.» Et si quelqu'un s'imagine qu'on puisse diminuer une de ces sept, c'est un infidèle....»

«Ce que je t'ai dit dans l'explication de cette parole des philosophes qui disent : D’UN NE PEUT SORTIR QU'UN», je te le disais en ce qui concerne le rang apparent. Quant à l'explication de cette parole, eu égard au sens intime, la voici : il n’y a aucun doute que l'essence éternelle ne se conjugue pas [nota : ou ne s'incarne pas] avec ses créatures jusqu'à devenir le lieu d'où sortent les choses. Si cette question a été vérifiée en philosophie c'est quelle retourne aux rangs de la création des créatures. La cause de la Volonté, en vérité , n'est pas l'Essence Éternelle, car si c'était l'Essence Éternelle il deviendrait obligatoire que Dieu fût du même rang que les contingences. Et Dieu est bien au-dessus de cela qu'il soit fixé le lieu d'issue de l'Unité. Quand nous disons de l'Unité ne peut sortir que l'Unité, la cause en est ceci que le premier degré de la Création est ce degré de l'Unité: dans ce premier degré on ne peut rien trouver d'autre que l'Unité. Ceux qui disent que la cause de l’existence de l'Unité dans le rang de la création est l'essence de Dieu, ceux-là sont obligés de dire: «Dieu est le lien de changement des nouveautés». Et, en effet, avant que Dieu créât les existences, il était forcément dans un certain état, puis après l'existence des choses il se trouva dans un nouvel état. Ou bien alors il faut croire que les contingences sont éternelles et résident dans l'essence éternelle. Cela revient à la parole la Vérité de toutes choses est en Dieu.»

(1) «Il n’y a pas de doute que ce ne soit là une erreur. La vérité est ceci : Personne n'a de route qui le puisse conduire vers l'essence éternelle. Toujours elle subsiste dans son état d'éternité et rien ne la peut égaler; rien n'en peut sortir [nota : elle ne peut engendrer, ne peut s'incarner] rien n'est semblable à son essence, rien ne se sépare d’elle. Elle a créé l'Unité (la volonté Primitive) d'elle même, par elle même et la fixée la cause de l'existence. de toutes les existences.»

Dans sa réponse à Agha Abd Oullah Qazvini, qui avait écrit d'isfahan le Bâb dit : «Ce que tu avais écrit que la Porte de l'imam doit forcément être le miroir de l'imam, cela est vrai et il n'y a pas de doute en cette parole. De même que l'imam est le MIROIR de Dieu et qu'en lui on ne peut voir que Dieu, Dieu n'a MIS AUCUNE DIFFERENCE, entre Dieu et lui, si ce n'est dans le degré d'adoration [nota : Comme «miroir» de Dieu, il n'y a aucune différence entre lui et Dieu : miroir pur il réfléchit exactement Dieu; mais, comme homme, c'est à dire comme adorateur de Dieu, il n'est qu'une infinie poussière], ainsi que Houdjet y fait allusion dans sa prière de la nuit de Redjeb.»

Toi, ne vas pas rester dans l'obscurité de ce rang d'adoration [nota : Ne te laisse pas, éblouir par la splendeur du miroir, et que celle-ci ne te cache pas l'individualité du prophète, homme comme toi, et misérable comme toi : Garde-toi de croire à l'incarnation, car celle-ci n'existe pas, et tu ne serais, si tu te laissais égarer dans cette voie qu'un vil blasphémateur] : «l'imam malgré son haut degré, malgré son non besoin de toutes choses, montre cependant son impuissance a son assassin et lui demande de l'eau.» [nota : Allusion au drame de Kerbéla]


III. Avant-propos : Le Bâb et la Science

Enfin, la troisième accusation qui a été lancée contre le Bâb était qu'il interdisait à ses disciples de s'instruire dans les sciences. Ainsi, ce Réformateur merveilleux, cet homme assez audacieux pour s'attaquer au colossal édifice d'un monde plein de vie, qu'il avait la prétention de renier et d'anéantir au risque évident d'être écrasé par sa chute, ce Prométhée qui tentait d'escalader les cimes du mystère et de l'inconnu pour dérober au ciel ses secrets encore insoupçonnés, ce génie splendide et surhumain n'est qu'un vulgaire fanatique assoiffé d'ignorances et prêchant l'obscurantisme à travers le monde!

Comment peut-on concilier ce rôle qu'on lui prête avec celui qu'il a joué réellement? n'est-ce pas faire preuve d'ignorance que d'en agir ainsi ? Chercher le bien de ses semblables, leur crier ce que l'on croit être la vérité, et mourir pour prouver ce que l'on dit, est-ce donc là oeuvre si commune et si vulgaire qu'on ait le droit de lancer de pareilles accusations contre celui qu'on a tué pour l'avoir essayé ?

J'imagine qu'il a dû en être toujours ainsi et que ce spectacle auquel nous assistons de nos jours a été vu déjà, au cours des siècles, à plusieurs reprises.

«Contemple l'éloignement de la Créature : elles obéissent à un savant parce que l'imam a ordonné «Obéissez à ceux qui racontent nos hadis». Elles croient obligatoire d’obéir à l'imam à cause de la parole du Prophète, et la mission du Prophète, est prouvée par les versets qui descendent sur lui. Donc, ces gens restent dans l'ignorance de la source de la preuve alors que suivant eux-mêmes ils sont fermes dans leur foi. Cependant l'authenticité du hadis n’est vraie que s'il est conforme au Qoran. S'il y est contraire ou en contradiction avec lui, il est obligatoire de l'abandonner..» [nota : De la Pièce intitulée «Le meilleur gardien, Séyyèd»]

Une religion qui inscrit au front de l'humanité le mot «progrès», qui base son enseignement sur une ascension croissante de l'homme vers le «Bien», c'est-à-dire vers Dieu, en même temps que vers une connaissance plus complète tant de lui-même que de la nature qui l'entoure, ne peut pas interdire la recherche de la science à ses adeptes. En vérité, le Bâbisme ne l'interdit pas, pas plus que le Béhaisme.

Mais il faut s'entendre sur la valeur du mot science, sur sa signification, sur sa portée. La science n'est pas la même en Perse qu'en Europe, et c'est ce qu'il ne faut pas oublier si l'on veut comprendre quelque chose aux textes que l'on lit. Les savants de la Perse, les Oulémas» sont des savants religieux ou, si l'on préfère des savants en religion, mais pas le moins du monde des savants en physique, en chimie ou en géométrie. Ils ignorent tout de la nature, et leur science se borne à connaître le Qoran et sa prononciation, les hadis, les commentaires, l'histoire des premiers temps de l'islam, la théologie, les éléments d'une philosophie raffinée, l'Arabe et sa grammaire, un peu de mathématique, de médecine, d'astronomie et de talismanique. J'irai plus loin et je dirai qu'un persan - de l'ancienne école bien entendu - est incapable de concevoir une idée générale et d'avoir un aperçu d'ensemble sur ce qui fait l'objet des sciences humaines.
Le Bâb estime quelques-unes de ces pseudo sciences inutiles et dangereuses, c'est celles-là qu'il interdit.

De plus il émet la prétention d'être «oummi», c'est-à-dire ignorant comme l'enfant qui vient de naître : qu'est-ce à dire: le Bâb' n'aurait-il suivi les cours d'aucun professeur, ne saurait-il vraiment rien de rien ? ni même lire ou écrire? Nous savons le contraire puisqu'il nous le dit lui-même [nota : Par exemple et par le Béyân et par la lettre adressée à Ahmed le Professeur] et là encore nous saisissons sur le vif sa pensée : il ignorait tout de ce que l'on est convenu d'appeler les sciences et cependant, ignorant, il resplendit comme Prophète de toutes les magnificences de la science divine.

Ce n'est pas, semble-t-il, qu'au point de vue humain il n'y ait à redire au moins à la façon dont s'exprime cette science, et de là proviennent toutes les accusations d'ignorance lancées par le monde musulman contre le Réformateur. C'est ainsi qu'on peut voir ceux qui sont ornés d'une science mensongère se railler de la science elle-même, représentée par le Prophète et se convaincre qu'elle n'est rien et qu'ils sont tout; et ce, parce que précisément ils sont convaincus de la vérité de ce qu'ils appellent à tort leur science. Dès lors à quoi peut servir cette science ? et pourquoi prendre la peine de l'acquérir?

Prenons comme exemple, la logique. Le Prophète, quel que soit son nom, vient d'établir dans ses livres, Evangile, Qoran, ou Béyân, la loi religieuse édictée par Dieu, et ceci fait, remonte dans le séjour céleste et disparaît. L'homme alors s'empare de son oeuvre, la tourne et la retourne dans tous les sens, y applique les règles d'un raisonnement qu'il croit infaillible et arrive ainsi aux diverses conclusions qui partagent le monde en une infinité de sectes. L'une de ces sectes est dans la vérité, mais les autres !

Dès lors à quoi peut servir la logique, si ce n'est à égarer ceux qui la cultivent? car c'est précisément elle qui conduit les hommes à toutes ces conclusions erronées.

La porte 10 de l'Unité IV dit : «Il n'est pas permis d'instruire dans d'autres livres que le Béyân si ce n'est quand le livre a été écrit dans la science du Béyân sur les sciences QELAM (théologiques). Il est interdit à tout croyant d'enseigner les sciences sorties du MANTEQ (logique) et des OUÇOULS (principes)».

Là il faut bien admettre que l'énumération ne comptant que le Manteq et les Ouçouls, ce sont le Manteq et les Ouçouls qui sont interdits. Il me semblerait fort exagéré de continuer cette énumération et d'embrasser toutes les sciences humaines dans cette interdiction.

Et il est si vrai que le Bâb reste sur le terrain religieux qu'il dit encore dans cette même porte:

«Il est permis si quelqu'un, dans une science écrive un livre et que chaque fois que le nom de Dieu y est mentionné il ait la foi en Lui, il est permis, dis-je, de s'instruire dans ce livre si les textes y cités sont les paroles dit Point- Sinon COMMENT CE LIVRE POURRAIT-IL DÉMONTRER L'ARBRE DE LA VÉRITÉ alors qu'il ne mentionnerait même pas le créateur de la mention?»

Et c'est si bien l'inutilité de ces sciences qui exaspère le Bâb, qu'il s'écrie dans la même porte : «Il est interdit d'écrire un livre par lequel l'homme ne soit ni en graissé ni mis à l'abri du besoin, comme les livres relatifs aux Ouçouls, à la logique, aux sciences théologiques et philosophiques, à la science des mots non usités et tout ce qui y ressemble, à l'étymologie et à la syntaxe : tout cela est inutile.»

Car, dit-il, il est bien certain que moi-même j'ignorais ces sciences : «De même dans cette manifestation du Point, quiconque y a vécu a vit qu'il était exempt de la science grammaticale, de la science de la logique, de la jurisprudence, des Ouçouls et de tout ce qui en dépend.»

«En vérité, au jour dit jugement, le livre de la Vérité parlera. Alors, se tourner vers le livre muet sera marquer qu'on ignore le livre parlant.» [nota : il y a ici une allusion à certaines croyances sur le Qoran parlant sur lesquelles nous ne pouvons nous appesantir en ce moment]

... «Car enfin, toute ces sciences ne sont que pour la compréhension du but de Dieu dans ses paroles; et Celui dont le but est le but de Dieu, dont la parole est la parole de Dieu, quel besoin a-t-il de tout cela?»

Quels besoins peuvent même en avoir les autres «puisque dans ce siècle les créatures, grâce aux mots persans, sont à l'abri du besoin (d'apprendre l'Arabe).»

Ces sciences mensongères sont nuisibles.

«Tous sont restés ignorants à cause de leurs rangs scientifiques mensongers. Car ces rangs, s'ils ne se joignent pas à la Foi, l'homme devient néant, et cependant il s'en enorgueillit».

«Avec la Foi, même s'il n'a pas la science de Dieu, l'essence même de la science est confirmée pour ce croyant : et ils n'ont pas eu cette Foi.»

«Les plus violents des hommes au moment de la manifestation de Celui que Dieu doit manifester sont ceux-là qui s'imaginent être rares par leur science, alors qu'ils ne peuvent même pas comprendre que leur science ne peut leur servir qu'à comprendre ses paroles d'auparavant.» [nota : Toutes ces citations sont tirées du Béyân Persan, Unité IV,porte 10]

Peut-être est-il inutile d'insister, mais cependant je citerai encore quelques textes, sans les commenter, en priant le lecteur de vouloir bien les lire attentivement, pour en extraire le sens.

Dans la pièce «Bism Illah el A'alem el A'alem» qui se trouve dans mon exemplaire des Sahifé Adliyé, il est dit :

«Regarde dans n'importe quelle nation tous, en vérité, se croient à la recherche de Dieu, tous désirent le contentement de Dieu ! Ils n'aiment certes pas le contraire du contentement de Dieu et cependant tous agissent et ont agi contrairement à ce qui est réel. Regarde les lettres des Psaumes, puis les lettres de la Bible, puis les lettres de l'Evangile, puis les lettres du Qoran, puis les lettres du Béyân, puis les lettres du Livre de Celui que Dieu doit manifester, depuis les plus élevées jusqu'aux plus humbles, toutes s'imaginent rechercher le contentement de Dieu et être, dans sa religion, perspicaces et convaincus, et cependant tous, auprès de Celui qui sera manifesté après Celui que Dieu doit manifester, sont comme les lettres des Livres d'auparavant auprès des confesseurs du Béyân.»

«Comme tu vois manifestement leurs témoignages ! Vois les manifestations suivantes comme les manifestations précédentes. Ceux qui crient : «C'est moi ! c'est moi !» [nota : C'est moi celui qui est venu en aide à la religion, le premier croyant, le plus zélé…] dans chaque manifestation, deviennent néant à la manifestation suivante. Combien les créatures, dans l'Evangile ont dit : C'est moi ! c'est moi !» et se croyaient en vérité minutieux dans leur religion. Mais quand se manifesta le Prophète de Dieu personne autre que 70 croyants (à l'Evangile) ne voulurent reconnaître en lui le Prophète promis. Le reste demeura dans soit : «C'est moi! c'est moi!» et en vérité se crut perspicace dans sa religion. Vois donc maintenant que les prétendues preuves ne pèsent même pas le poids de l'aile d'une mouche ! Vois qu'il en est ainsi dans la Manifestation de l'Evangile, dans celle du Qoran, dans celle du Béydn ! dans celle de Celui que Dieu doit manifester et ne te laisse plus tromper par ces : c'est moi c'est moi !» des créatures, car ils ne pèsent pas un grain d'orge». [nota : A la réponse à la lettre de la Vie, le premier croyant. Lettre écrite à Makou. Faire parvenir à Molla Youssouf Ali Ardebili, afin qu'il la remette à Azkend, à son propriétaire]

Dans mon exemplaire des Sahifé Adliyé il est écrit:

«Et ensuite - qu'il ne reste pas caché que l’exemple de la science est exactement l'exemple des choses connues. De même que chaque chose connue est dans sa limite, la science de cette chose est aussi dans sa limite [nota : Dans la limite de cette chose]. Par exemple, la science du minéral a la hauteur du minéral, la science des plantes a celle des plantes. De degré en degré, regarde ainsi toutes choses et ordonne jusqu'à ce que cela se termine à la science de Dieu. Cette science a de la prééminence sur toutes les autres sciences. Il en est de même de la science des Lettres de l'Unité: dans la Créature, il n’y a pas de science plus haute que celle-là. Multiplie l'Unité, et la science de chaque Unité, vois-la dans son degré, jusqu'à la fin de l'existence. La science de chaque manifestation antérieure, relativement à la manifestation suivante ne la prend pas pour une science. Par exemple, toute la science de l'Evangile et les sciences qui sont à son Ombre ont été écrites dans la religion des Chrétiens jusqu'au moment où le Prophète n'était pas encore manifesté, la vérité de la Science s'appliquait à cette science.

Mais, après la manifestation (de Mohammed) il n'en est plus de même. Peut-être ne peut-on plus la mentionner (cette science) que sous ta lettre Djim (Djahéliet = ignorance). Si quelqu'un (à ce moment) avait eu de la science réelle, il eût cru au Prophète. Or, de même que les PRÈTRES de cette époque, avec le, SUMMUM DE LEUR SCIENCE sont restés dans l'obscurité – et C’est une preuve qu'ils n'avaient pas la SCIENCE RÉELLE – de même, dans chaque manifestation des degrés de la science, vois-les suivant les degrés des choses connues. Avant la manifestation du Point du Béyân combien y avait-il d'oulémas (de savant) dans l'islam ! Chéikh Mohammed Hassan, à Nedjef écrivit 500 000 lignes dans la jurisprudence et les conséquences des principes; et des hommes de ce genre il y en avait dans chaque pays, dans chaque science. Pourquoi donc n'as tu pas trouvé qu'ils fussent savants ? Pourquoi es-tu allé choisir le feu Séyyèd [nota : Séyyèd Kazem Rechti]

Que si lu eusses cru qu'ils avaient de la science, IL EUT ÉTÉ OBLIGATOIRE POUR TOI D’ALLER LA RECHERCHER AUPRES D'EUX, ainsi que le Prophète, le salut soit sur lui, te l'avait permis quand il a dit : ALLEZ A LA RECHERCHE DE LA SCIENCE FUT-ELLE A LA CHINE.»
«Dès lors, puisque toi-même tu ne les dis pas en possession de la science, comment et pourrais-tu être content qu'un autre vienne le dire.»

«Et cependant si tu regardes du début à la fin de l'existence, tu verras que l'essence de la science se trouvait dans la branche de Esna Achéri et cependant tu n'as pas cru que leur science fût science, tant qu'enfin tu as choisi Celui qui avait auprès de lui la science de Dieu [nota : A rapprocher de la phrase qu'on a lu plus haut : «Pourquoi es-tu allé choisir le feu Séyyèd»], et tu en as vu le fruit. Tu as vu que la nation du Prophète de Dieu prétendait tout entière lui obéir, et qu'un chacun se croyait plus proche qu'autrui ut Mehdi de la famille de Mohammed par la force de son obéissance. Et cependant des Lettres du Vivant ont été choisies parmi les élèves d'un savant [nota : Séyyèd Kazein Rechti] qui avait la science de Dieu....»

Le texte continue ainsi pour arriver à ce point : «Car si tu étais le Platon de ton temps et que tu n'eusses pas la science de l'intime, d'où eusses-tu pu être des Lettres du Vivant ? d'où eusses-tu pris sur les autres l'avance de la Foi ? Et cependant tu vois de tes propres yeux que dans chaque science il y a un Platon, mais il est allé parmi ceux qui meurent, car il n'avait pas la science en Dieu ...» [nota : Il y a ici une allusion à la fameuse anecdote qui met Jésus et Platon en présence]

Dans le Béyân arabe [nota : Le texte continue fort longuement mais je suis tenu de me borner], à la dix-septième porte de l’unité VIII, il est dit : «Dieu a rendu obligatoire pour vous d'acquérir la science de votre religion afin que les hommes puissent acquérir de vous la science et la connaissance et ne soient pas obligés de s'expatrier pour se l'assimiler.»

Et, à la 15ème porte de l'Unité XI : «Dieu a rendu obligatoire aux gens du Béyân DE SE RENDRE SAVANTS. Qu'ils embrassent donc toute la terre, qu'ils connaissent tout Sultan, tout Prophète en son temps, et son livre; les limites des royaumes des Sultans, le nombre de leurs soldats, le prix des choses qu'ils ont en mains, de leurs joyaux : qu'ils aient cette science et que le fruit en retourne à ce jour où tous les hommes sont en présence de leur Seigneur!»



IV. PRÉFACE

Dans l'avant propos du premier volume de Séyyèd Ali Mohammed dit le Bâb, j'expliquais pourquoi je ne pouvais admettre l'existence des Trois Béyân, que nous annonce M. de Gobineau. Je disais même : «Je ne crois donc pas, je ne crois en aucune façon que le Bâb ait d'abord publié les versets arabes du Béyân pour les commenter dans une seconde édition». J'invoquai comme raison que tel groupe de philosophes pouvait donner aux termes de cet ouvrage telle signification spéciale et arriver, dès lors, à des conclusions bien différentes de celles que désirait le Bâb.

J'ajoutais même que ce danger me paraissait pressant et qu'il y fallait parer.

Or, si j'avais tort en ce qui concerne la publication du Béyân arabe qui a certainement précédé - et de beaucoup - la publication du Béyân persan, du moins n'avais je pas tort en ce qui concerne le nombre de ces Béyân, et avais-je absolument raison dans mes craintes d'une interprétation erronée.

Ces craintes étaient parfaitement fondées, si fondées même qu'elles furent nettement et souvent exprimées à Séyyèd Ali Mohammed et par Molla Hossein Bouchrouyéhi lui-même. C'est ce que nous apprend le début de l'ouvrage du Bâb intitulé Sahifé Adliyé, auquel nous reviendrons tout à l'heure.

Pour le moment qu'il me suffise de dire que l'ouvrage que j'offre aujourd'hui au public est un essai de traduction du Béyân arabe ; je dis essai, d'abord parce que certaines parties de cet ouvrage sont extrêmement obscures et demandent pour être à peu près comprises, l'appui du Béyân persan, et secondement parce que la langue dans laquelle il est écrit ne m'est pas aussi familière que le persan. Je puis cependant affirmer que cette traduction est consciencieuse et que je me suis entouré, avant de la livrer à l'imprimeur, de toutes les précautions possibles et imaginables : je n'ai épargné ni les démarches, ni les demandes de renseignements et je pourrais presque dire que cet ouvrage a été traduit en collaboration avec mes amis persans [nota : Parmi lesquels je dois surtout citer Hadji Séyyèd Ali Isfâhâni] si ceux-ci savaient le français.

A la différence du Béyân persan qui contient huit unités et dix portes de la neuvième, le Béyân Arabe en contient 11 complètes.

Ces onze unités du Béyân arabe sont toutes de la main du Bâb, mais elles sont le produit d'une double rédaction. La première rédaction court, comme dans le Béyân persan du début jusqu'à la dixième porte de la neuvième unité. La partie comprise depuis cette dixième porte jusqu'à la onzième unité inclusivement a donc été rédigée après coup. Il n'y a qu'à se reporter au Béyân, Unité IX, porte 10, pour s'en rendre compte.

Or le Bâb nous dit lui même – et n'oublions pas que c'est Dieu qui parle par sa bouche - dans la lettre que nous allons citer en entier, que le nombre des portes du Béyân doit être au nombre de toutes choses» [nota : Toutes choses, Koull chéi = 361], qu'en vérité toutes n'ont pas été manifestées puisque onze unités seulement ont été révélées [nota : Ce qui démontre que cette lettre a été écrite après que le Béyân Arabe eût reçu le complément de deux Unités et neuf portes] mais que celui qui doit compléter leur nombre est Soubh-Ezel. [nota : Mirza - et non Séyyèd - Yahya, Nouri Soubh Ezel, l'ennemi juré de son demi-frère Mirza Houssein Ali Nouri Béha Oullah]

Céméré Azélyé: Ya Véhid
[nota : Il ne peut faire de doute pour moi qu'il s'agisse ici de Soubli-Ezel. Que ce dernier ait été considéré par le Bâb et tous les Bâbis comme le Khalife du nouveau Prophète, cela nous a toujours parti indiscutable, et notre conviction s'est trouvée confirmée par la lecture du «Nouqtèt-el-Kàf» de la Bibliothèque Nationale. On sait que cet ouvrage qui porte le n° 1071 dans le catalogue, est l'oeuvre de Mirza Djani qui mourut à une époque où il n'existait que des Bâbis. Il ne peut donc être suspect de partialité et sa relation projette une lumière définitive sur les premiers temps du Bâbisme. Que par la suite Celui que Dieu doit manifester ait été Mirza Housseïn Ali Nouri Béha Oullah, je n'y contredis nullement, mais je tiens à rétablir ici la vérité historique trop souvent méconnue.]

Au Nom de Dieu, l'Eternel, l'Eternel!
[nota : L'éternel, ou plutôt le plus éternel, le seul éternel = El A'azal]

En vérité! Moi je suis Dieu ! Il n’y a pas de Dieu, si ce n'est moi, l'Unique.

En vérité ! Moi je suis Dieu! je suis celui qui enlève le besoin aux hommes !

O Nom de l'Éternel !
[nota : L'éternel = Ezel; O nom de l'Éternel veut dire: O toi qui te nommes Ezel]

Témoigne qu'il n’y a pas d'autre dieu que Moi, qui suis l’Aimé, le Chéri !

Témoigne qu'il n’y a pas de dieu si ce n'est Toi! Toi qui embrasses tout, qui subsistes par Toi-même !

En vérité! Dieu a créé ce qu'il a créé dès le début qui n'a pas de commencement; et Il créera ce qu'il créera jusqu'à la fin qui n'aura pas de fin !

Il crée par l’intermédiaire du spectacle de soit être.

Chaque jour, chaque nuit, lis et que tous les esclaves de Dieu lisent: Il n’y a pas de dieu si ce n'est Moi, le Savant 1 le Puissant!
Et, si tu le veux, dis cette prière :

Dieu aime que les corps des morts soient ensevelis dans un linceul de soie blanche et qu'on les mette dans des cercueils de cristal. [nota : Comme on le voit les ordres du Bâb sont disséminés dans toute sa production littéraire. C'est pourquoi il dit qu'il faut lire toutes ses oeuvres pour être au courant de sa pensée. J'avais d'abord cru que peut-être cette lettre était celle dont me parlait Soubh Ezel, à Chypre, quand il me disait que Séyyèd Hosseïn lui avait remis un ordre du Bâb lui ordonnant de l'enterrer dans un cercueil de cristal et de l'enfouir dans un endroit de Chahzade Abdoul Azim qu'il lui désignait d'une façon secrète. C'est dans cette lettre encore que le Bâb lui ordonnait de publier le reste du Béyân ou tout au moins de commenter les versets arabes non commentés dans le Béyân persan.]

Qu'on les dépose alors dans des Pierres douces, autant qu'on peut le faire. Ceci c'est ce que Dieu aime pour ceux qui croient en lui et en ses versets, si on Peut le faire.

Si on ne le peut, qu'on l'ensevelisse alors dans un morceau de laine et dans des cercueils de bois, puis ensuite, autant que faire se peut, dans de la pierre même si on ne peut le faire qu'après de longs jours. [nota : Il faut ensevelir le cercueil dans un endroit pierreux ? ou bien dans un tombeau]

Cet ordre est par respect pour les vivants, afin que leur coeur soit rasséréné.

Toi, sois en présence de Dieu si tu le peux faire [nota : Cela veut dire, je pense : «Si tu peux le faire viens me voir»]:
fais parvenir l'ordre de ton Dieu à tous les hommes, par une route agréable, aux ordres qui sont descendus dans le Béyân [nota : On ne peut, me semble-t-il être plus net : c'est bien une charge que le Bâb impose ici à son correspondant, et cette charge est sa succession.]. De façon agréable mentionne ceux qui croient à moi et à mes paroles, afin qu'ils ne fassent pas de divergences dans l'ordre de Dieu et ne s'éloignent pas de la route de Dieu.

Et si Dieu a manifesté dans tes jours [nota : Durant ta vie] quelqu'un comme toi, c'est lui qui sera l'Héritier de Dieu après toi; et si quelqu'un de ce genre ne se manifeste pas, alors sois convaincu que Dieu n'a pas voulu se faire connaître aux hommes. [nota : Cette lettre me paraît absolument du Bâb et je ne crois pas qu'elle soit un faux. Je dois dire cependant que j'en dois la communication à un vieil Ézéli, qui fait surtout métier de Kateb. Ce vieillard m'apportait régulièrement une fois par mois son travail de quatre semaines dont je prenais immédiatement livraison. Il n'a attiré en aucune façon mon attention sur cette lettre cependant si importante et qui se trouve dans mon exemplaire de la Sourate Tauhid entre la réponse à Molla Ahmed Abdal (de Makou) et la lettre à Séyyèd Rahim. D'ailleurs, les Béhahi seraient mal venus à en discuter l'authenticité car elle vient très nettement à l'appui de leur thèse.] Donc, laisse l’ordre à Dieu qui est Ton Seigneur et Celui de tous les hommes.

Ordonne que l’ordre appartient désormais aux CHOUHÉDAS [nota : Les témoins : ceux qui ont assisté, qui assistent aux événements, parmi les croyants], c'est-à-dire à ceux qui craignent Dieu dans les ordres de Dieu et n'outrepassent pas les limites de Dieu.

Celui [nota : Séyyèd liousseïn Kateb] qui est auprès de Ton Seigneur, nous lui avons appris les joyaux de la science : instruis-toi auprès de lui, et en vérité c'est nous qui t'instruirons. [nota : Il semble bien, malgré la phrase de tout à l'heure, que cette lettre soit une lettre d'adieux, car enfin pourquoi dirait-il à son correspondant de s'adresser à son secrétaire, s'il ne savait qu'il allait disparaître.]

Respecte le donc de la part de ton Dieu, de la façon que tu le peux faire.

En vérité ! les portes du Béyân ont été prédestinées au nombre de toutes choses : mais nous, nous n'avons pas manifesté ce nombre, si ce n'est onze unités d'entre elles : et pour chaque unité, il a été fixé dix-neuf portes.

Et ces onze Unités [nota : Onze unités, ce qui représente la totalité du Béyân arabe que nous possédons] sont une mention de la part de Dieu, le Savant, le Très Haut. Et c'est une mention de bienveillance et de bonté à l'égard des croyants. Sinon, toutes les créatures viennent de Dieu et retournent à Dieu.

Et toi, certes ! Certes ! ORDONNE AUX HOMMES L'ATTENTE DE CELUI QUE DIEU DOIT MANIFESTER ET LA FOI EN LUI, CAR CELUI QUE DIEU DOIT MANIFESTER VIENDRA CERTES, CERTES, VERS CETTE CRÉATURE, DANS L'AUTRE JOUR DU JUGEMENT DERNIER, AVEC UNE ROYAUTÉ CLAIRE ET ÉVIDENTE.

Et nous tous, nous sommes ses esclaves, et tous nous nous prosternons devant Lui : Il fera ce qu'Il voudra, avec la permission de son Dieu. Et Lui n'est responsable d'aucun de ses actes, mais toutes les créatures sont responsables de tous leurs actes.

Si dans tes jours à toi Dieu manifeste sa grandeur [nota : Je crois qu'il faut comprendre ici autre chose que le sens apparent. «Sa» ne peut plus se rapporter aux phrases précédentes et par suite à celui que Dieu doit manifester, car, quand ce personnage sera manifesté c'est à lui qu'appartient l'ordre. Donc si «Dieu manifeste sa grandeur» veut dire sa grandeur à lui, Dieu. C'est-à-dire s'il pousse la Révélation du Béyân, s'il répand ce livre parmi les hommes, si par lui cette religion s'élève en ce monde.], alors manifeste les huit routes avec la permission de Dieu, et tu es de ceux qui sont grands.
[nota :Qu'est-ce que ces huit routes? S'agit-il les huit unités restant du Béyân ? C'est possible, mais alors il n'est pas fait mention des neuf portes et des deux unités que le Béyân arabe possède de plus que le Béyân persan. Je crois cependant que c'est là le sens et qu'il faut comprendre ainsi : «Achève l'oeuvre que j'ai commencé, j'ai fait connaître onze unités, fais paraître les huit autres». Le Béyân persan dont j'ai publié la traduction dans mon second volume de Séyyèd Ali Mohammed, est le Béyân laissé par le Bâb. J'en ai obtenu une copie entièrement écrite de la main de Soubh Ezel, qui m'a fait dire par son fils Rizvan Effendi, que si j'en désirais la suite, qui formait un volume aussi gros que celui qui m'était remis, il se tenait à ma disposition. Quittant Chypre à ce moment, je me vis dans l'obligation de refuser. Plus tard, parmi les Béyân que j'ai achetés, s'en est trouvé un, issu de la main du vieil Ézéli dont j'ai déjà parlé dans une note précédente : ce Béyân contient au complet le commentaire de la neuvième Unité. Ce commentaire est dû à Soubh Ezel. Maintenant Soubh Ezel s'est-il contenté de commenter purement et simplement les neuf portes de la neuvième Unité, et les deux unités dix et onze, et est-ce cet ouvrage qui formait un volume aussi gros que le restant du Béyân, ou bien a-t-il «fait descendre du ciel» le texte arabe des versets des huit autres Unités ainsi que leur commentaire en persan?]

Et nous, nous avons promis en vérité que toi tu dois prendre l’ARCH [nota : L'arch, ici, veut dire le corps : autrement dit, tu dois recueillir mon cadavre] de Ton Seigneur quand l'ordre en descendra de Dieu, et nous, nous sommes certains que l'ordre descendra.

Et ce que Dieu promet, il ne s’y dérobe pas.

Et c'est Dieu le plus loyal de tous ceux qui sont loyaux.

Et si Dieu n'a pas manifesté sa grandeur dans tes jours, agis alors conformément à ce qui est descendu, et jamais ne change un mot aux versets de Dieu.

C’est là l'ordre de Dieu dans le Livre sublime : ordonne aux hommes conformément à ce qui est descendu et ne change jamais les ordres de Dieu afin que les hommes ne fassent pas de divergences dans la religion de Dieu.

Il se peut que jusqu'à l'autre jugement les hommes soient élevés dans une unique route. [nota : Il semble que vraiment le Bâb ait pressenti les dissensions futures]
Et mentionne dans ton livre ce que nous avons mentionné. En vérité ! c'est nous qui mentionnons.

Sept Unités [nota : Pourquoi sept? de quelles sept unités s'agit-il ?] des oeuvres de Dieu te seront envoyées à toi. Et nous, nous partageons ces sept unités de la façon suivante :

L'une de ces unités, prends-la pour toi-même; l'autre, envoie-la à ceux qui sont dans la terre de Fa [nota : Fars]; l'autre, à ceux qui sont dans celle de Aïne [nota : Arabistan]; l'autre, à ceux qui sont dans la terre de Kha [nota : Khorassan]; l'autre, à ceux qui sont dans la terre de Elif [nota : Azerbaïdjan] ; l'autre, à ceux qui sont dans la terre de Mime [nota : Mazandéran]; l'autre, à ceux qui sont dans la terre de Kaf [nota : Kourdistan]. Envoie-les [nota : Ces unités] dans ces villes vers ceux qui croient à Dieu. Bientôt nous t'enverrons les versets qui appartiennent à la première Unité dans le Livre sublime.

Ce qui est digne que Dieu le scelle, scelle le toi, et les exemplaires de ces versets, propage-les. Et ce qui te parviendra de nous, ordonne en conformité. [nota : Comparez le Christ à Pierre]

Garde-toi toi-même de la malignité des ennemis. Garde-toi toi-même, et garde les versets qui sont descendus dans le Béyân. GARDE LES VERSETS QUI DESCENDRONT DE TOI [nota : Quels versets? ceux du Béyân que doit écrire Soubh Ezel ? ], CAR CES VERSETS DOIVENT SUBSISTER JUSQU'AU JOUR DU JUGEMENT et que tous les croyants en tirent du profit.

L'Unité qui est affectée à la terre du Fâ [nota : Fars] fais-la parvenir à Ali, et dis-lui qu'il donne à chacun de nos amis un verset : que cela soit une mention de la part de Dieu le Très Haut, le Savant. [nota : Chaque Unité doit contenir 19 versets, cela fait donc 19 amis]

L'Unité qui est affectée à la terre de «Aïne» fais-la parvenir au nom de Nébil [nota : Nébil est égal en nombre à Mohammed et est mis ici à la place de ce nom], ce Nébil que Dieu a aidé par les choses qu'il lui a données au jour du jugement. Et, pour lui, il y a un très grand rang auprès de Dieu.

Nous, nous avons enlevé l’ordre du cinquième [nota : Nous libérons de l'obligation de payer le cinquième du revenu aux Séyyèds, ceux qui, ayant cru en moi, sont venus à mon secours, et m'ont envoyé leur superflu] de ceux qui, dans le Béyân, m'ont fait parvenir à moi les limites de ce cinquième, et nous l'avons retiré aussi de leurs enfants. Et c'est là un bienfait de notre part, car nous sommes le Maître du bienfait.

L'Unité qui est affectée à Kha [nota : Khoraçan] fais-la parvenir au nom de Saddaq Sadiq; [nota : Probablement Asdaq]

Celle qui est affectée à Elif [nota : Azerbaïdjan], fais-la parvenir au nom de Rahim;

Celle qui est affectée au Mim [nota : Mazandéran] à quiconque parmi ceux qui sont auprès de toi, est convaincu dans la religion ;

Celle qui est affectée ait Kaf [nota : Kourdistan], ait nom de Djévad.

Il n'est as licite pour aucun des croyants d'être possesseurs de ces versets, si ce n'est de l'un de ces versets : et tous doivent être dans l'allégresse de ce verset.
[nota : Je pense qu'il s'agit ici d'autographes du Bâb. Il se pourrait que ces autographes fussent des versets du Béyân, ou de tout autre ouvrage sacré, et que cette distribution entre cent trente-trois personnes ait un caractère symbolique]

Quant aux versets de Dieu, ainsi que les TABLETTES qui sont descendues, garde-les, et ne les donne qu'aux esclaves purs de Dieu, car ni les créatures des cieux, ni celles de la terre, ni celles qui sont entre le ciel et la terre ne peuvent égaler l'une de ces TABLETTES, si quelqu'un le sait.

Réfugie-toi en Dieu contre tous les méchants jusqu'à ce que Dieu manifeste Celui qui mettra dans l'allégresse tous les croyants et leur enlèvera leurs tristesses et leurs peines.

Dis: C'est ce Dieu le Vainqueur au-dessus de sa créature, c'est Lui, Celui qui subsiste par lui-même.

Si tu trouves l'un des croyants convaincu dans la religion, donne-lui un de ces AYAQILS [nota : On sait que le Bâb a écrit un livre de Ayaqils ou talismans (voir Béyân). il est possible que ces Unités à distribuer entre 7 Provinces soient de ces talismans] afin qu'il t'aide dans la religion de Dieu, de la façon qu'il sera en son pouvoir.

Nous, nous avons fixé Celui qui distribue les tablettes, Celui qui écrit les versets de Dieu [nota : Séyyèd Housséïn Kateb (?)] afin qu'il fasse parvenir les meilleures de ces lettres à Vahid A'ala [nota : Soubhe-Ezel (?)] et que l'une de celles-là il la garde pour lui-même. Qu'il [nota : Il, doit se rapporter, je pense à Soubh Ezel] donne à chacun des croyants à Dieu qui s'attend à un bienfait et qui a droit, ce à quoi il a droit.
[nota : Je suis obligé de me borner et ne puis dire ici tout ce que j'aurais à dire. Je tiens à la disposition des personnes que ces questions intéressent d'autres documents que je ne puis citer. Si l'on veut bien se reporter à la page 379 du premier tome de Séyyèd Ali Mohammed dit le Bâb on verra que c'est certainement à cette lettre que Soubh Ezel faisait allusion quand il me racontait l'histoire que j'ai rapportée.
Ce serait A Séyyèd Housseïn - celui qui feignit de se rétracter lors de l'exécution du Bâb, qui fit parvenir ces dernières volontés au Khalife du Réformateur. Mirza Yahya ajoutant qu'en dehors de ses ordres pour son enterrement le Bâb lui faisait parvenir sa nomination de successeur. Or, il me paraît évident que cette nomination est comprise dans cette lettre. Je ne la lui demandai pas à l'époque et par conséquent ne reçus aucune communication à ce sujet parce que je croyais que cette nomination était constituée par la pièce qu'a publiée M. Browne.]

Pour en revenir à ce que nous disions au début de cette préface, je pense que la citation qui va suivre démontrera de façon péremptoire combien nous avions raison en supposant que le Béyân Arabe ayant été publié tout d'abord, l'enseignement du Bâb devait rester incompris de la masse des Persans. Cela explique nettement aussi les mouvements intérieurs de la secte, les discussions passionnées, la réunion du concile de Bedecht, comme encore les calomnies dont les malheureux sectaires ont été les victimes.

Cette citation est extraite des Sahifé Adliyé :
[nota : Cet ouvrage débute par une Khotbé, qu'il est inutile de traduire; mais qui semble indiquer que le Béyân arabe était rédigé dès avant le départ pour le Pèlerinage, le Béyân persan ne l'ayant été, pour la plus grande partie, du moins, qu'à Makou.]
Et ensuite «L'esclave qui a besoin de Dieu, Celui qui a saisi très fortement la corde du Très Haut explique qu'après le retour du pèlerinage, quand déjà le Témoignage était devenu complet par la manifestation de la science sur le monde entier, par des livres évidents [nota : Ces livres évidents sont Le commentaire de la Sourate de Joseph, le Kétab beïn al Haremein, probablement le Béyân arabe, et le Kétab Rouh qui fut révélé au retour, pendant le voyage en mer], par des traités solides, c'est alors que descendirent [nota : Arrivèrent] sur lui des quantités d'écrits (venants) de tous côtés, des gens de science et d'explication, venant ainsi le trouver au milieu de l’Océan de sa tristesse et de sa solitude.» [nota : Ceci doit être une allusion à son emprisonnement chez lui, à Chiraz, ordonné par Housseïn Khan Nizamed Dowlèh]

«Dans la plupart de ces écrits on démontrait l'impuissance dans laquelle se trouvaient ceux qui n'étaient pas gens de science, à comprendre les versets écrits en arabe.»

«Or comme le destin n'avait pas encore établi leur réponse dans le Béyân persan de la religion évidente, il leur était ordonné de se tourner vers le premier qui a été instruit [nota : Molla Housseïn Bouchrouyéhi] dans le premier livre, jusqu'à ce que le lever du soleil du Moubahélé [nota : Moubahélé, acte pour un prophète de convoquer ses amis et ses ennemis, d'inviter ces derniers à réclamer un miracle de Dieu pour prouver la vérité de leur dire, et d'en réclamer soi-même un à l'appui de ses prétentions.], des horizons des épaisses ténèbres, sur les lettres S et B (lettres persanes) dans l'année bénie 1262, avec la permission de Dieu, ait été enregistrée.»

[nota : Mon texte porte MOSTATER ce qui voudrait dire : voilé, caché. Cela ne peut offrir aucun sens. Si on lit ce mot avec un TA alors apparaît le mot «enregistrer» qui lui, dans cette phrase signifie quelque chose. Que veut dire ici le Bâb ? Que sont ces lettres S et B? S est la seconde lettre de la formule Bisni lilah, elle représente le premier croyant, en l'espèce le Mohammed d'autrefois, devenu le Molla Housseïn Bouchrouyéhi actuel. Le B qui n'existe qu'une seule fois dans la formule, voudrait dire le Bâb (?) lui-même; mais alors pourquoi est-il placé le second?
Quant à vouloir retirer de ces deux lettres l'indice d'une collaboration de Bâb avec Molla Housseïn, cela n'est pas possible. D'ailleurs, dès le retour du pèlerinage, Bâboul Bâb quitte son maître pour aller évangéliser les provinces et ne le revoit qu'une ou deux fois : pendant le voyage du Bâb de Téhéran à Makou, suivent la tradition, après son premier séjour à Mechhèd d'après le Vaqayé Mimiyé et la tradition. Et encore ces deux visites peuvent-elles, probablement se confondre en une seule.
Il vaut mieux croire que le Bâb fait ici allusion à un événement qui nous échappe : peut-être au commencement de la rédaction du Béyân en persan.
Quoiqu'il en soit tout ce passage nous démontre que le livre de chevet du Bâb - le Béyân - a d'abord été écrit en arabe; que les réclamations, plurent de tous côtés et les demandes d'explications et que ce ne fut que par la suite que fut faite la rédaction en persan.]

«Et c'est au moment de cette louange sublime, de ce don immense [nota : Si ma supposition est vraie que le Bâb fasse allusion au début de la rédaction en persan du Béyân, il faut ainsi comprendre ce passage : «C'est au moment où je m'occupais de cette oeuvre qui est une glorification du Créateur en même temps qu'un bienfait pour la créature…»] que la planète Jupiter se leva de l'horizon des invisibilités dans la lettre très noble du grand personnage la plus aimée des créatures.
[nota : Le Bâb dit, au début de cet ouvrage, que nombreuses furent les lettres qui lui parvinrent, lui demandant des explications. Comme le destin n'avait pas encore permis qu'il les donnât, il invita les demandeurs à s'adresser au premier qui fût instruit dans le premier livre, c'est-à-dire Molla Housseïn Bouchrouyéhi cependant qu'il s'occupait à rédiger les règles de sa doctrine dans le Béyân persan pour les mettre à la portée du public. C'est sur ces entrefaites que la plus aimée des créatures, très certainement encore Molla ilousseïn, lui écrivit une lettre dans laquelle il insistait sur la nécessité qu'il y avait à se mettre à la portée de tous. Il est bien entendu que quand je dis que le Bâb s'occupait à rédiger... j'emploie le langage vulgaire, c'est : révéler qu'il faut lire.]

Et cette lettre était pleine des manifestations de l'impuissance et de l'insistance, et remplie d'humilité. Gloire à Dieu ! nous lui devons notre reconnaissance [nota : Peut-être à cause de l'arrivée de cette lettre], car il est digne de louanges et d'adoration à cause de cela que la réponse à une personne est un instrument vivifiant pour la vérité de la vie de tous les humbles et de tous les esclaves purs de Dieu.»

«Donc, Dieu le permettant, dans la langue des Persans, cette langue qui est humaine, avec ces versets persans dont la vérité est arabe, de la mer de mon impuissance et de mon tourment, suivant la quantité qui rejaillit de moi, à cause de la vérité qui est en moi, la vie est donnée dans la vérité des choses qui doivent être connues dans la vérité des principes et de leurs conséquences. De telle sorte que tous les gens de ce monde, tant les savants que les ignorants, par la sortie de l'Aurore de l'Eternité, à cause de son esclave, du premier rayon du soleil qui est la Vérité Mohammédique, tous les gens du monde, dis-je, dans le rang de l'acquiescement, par la Puissance du Créateur unique, soient enfin convaincus. Dès lors, au sujet de l'écrivain de ces lignes on ne doit plus laisser couler de sa langue tant intime qu'apparente autre chose que l'ordre de son adoration absolue ; et les hommes ne doivent plus rester, sous aucun rapport, dans l’ignorance du bienfait divin ni des effulgences du soleil éternel.»

«Sachez, ô hommes ! Purifiez-vous vous-mêmes, quand le soleil est levé, que le jour éclate, et que, sur l'ordre de Dieu, la nuit disparaît. L'ordre de Dieu est descendu du Ciel. La terre et ses habitants sont nouvellement créés et ils ont fixé leurs demeures sur la surface de l'eau [nota : De la vie]. Le tambour de Dieu s'est fait entendre dans la terre de la Manifestation, et les ténèbres profondes se sont éclaircies : le Paon aveugle s'est mis à chanter quand le Cancer s'est couché à l'horizon et des branches de l'arbre paradisiaque du Touba, le Coq de l'Arche a fait résonner sa chanson. Alors ont été récompensés ceux qui agissaient suivant la parole de Dieu, alors ont été châtiés les méchants. C'est ainsi que doivent agir ceux qui agissent, et se reposeront dans ce livre ceux qui s'y doivent reposer.»


* PORTE 2. - Dans l'explication de la Balance de Dieu Très-Haut :

«Sache, ô interrogateur sur le point des principes et de leurs conséquences, que le Seigneur de la Grandeur (Dieu) n'a donné de devoir à personne sans lui donner le Pouvoir et la Puissance (de l'accomplir). Le principe et les conséquences de la religion, dans chaque monde, dans chaque temps, tournent autour de la volonté de Dieu. La création de chaque chose, sache-la comme la création de ton être même. Du moment où elle est semence elle est mentionnée jusqu'au moment où il n'y a pas de fin pour toi dans la science de Dieu.»

«Vois avec certitude. que ton rang premier est la préface de ton rang second. Peut-être le but en essence de la création de la semence est-il le grumeau de sang caillé (qui se forme dans la matrice) et ainsi de suite jusque sans fin, suivant les rangs fixés par le Seigneur de la Grandeur.»

«La preuve de ceci est la manifestation de ceux qui sont soumis aux lois de Dieu (les hommes) et qui sont les lieux où rayonne la Puissance.»

«Maintenant que tu as pu contempler la semence de la vérité dans toutes choses convaincs-toi qu'il en est de même pour la religion.»

«La semence de la religion aux jours d'Adam était dans la création nouvelle, et les gens de cette époque étaient, en vérité, dans le rang de semence de la Vérité.»

«Il en est de même et pour la religion et pour ceux qui croient en elle. Grâce à la Puissance de Dieu, ils ont progressé jusqu'au jour de la Vérité Mahommédique, que le salut soit sur lui et sur sa famille! Alors, le rang de la religion et de ceux qui croyaient en elle était «nous avons fait fleurir la chair su r eux, ensuite nous l'avons produit AU CRAND JOUR comme une autre création. Donc, combien Dieu est grand, le plus habile des créateurs.»
[nota : Le texte complet du verset 14 de la Sourate XXIII (Qoran) est : Ensuite nous avons fait de la goutte de sperme un grumeau de sang, puis du grumeau de sang, un morceau de chair; puis nous avons fait ce morceau de chair os, et les os nous les avons revêtus de chair, ensuite nous l'avons produit au grand jour comme une autre création. Béni soit Dieu, le plus habile dès créateurs.
Donc, la religion d'Adam est la semence et celle de Mohammed est le moment où cette semence, après ses diverses transformations, est produite au grand jour, sous la forme humaine.]

C'est pour cette raison qu'a lien l'abrogation des lois religieuses et des religions, car si, en vérité le devoir qui incombait (aux hommes) au jour de la semence était le même que celui qui leur incombe au jour de la «viande» ce serait injustice absolue.»

«Or, après que le devoir s'est attaché à la créature parfaite, du moment qu'il n'a pas été fixé pour lui de changement, la loi religieuse bénie n'a plus à en subir.
[nota : Cette phrase est bien musulmane d'aspect mais le Bâb ne dit pas encore tout ce qu'il a à dire. Pour suivre sa comparaison de tout à l'heure qu'il laisse en suspens, la semence est devenue homme et a été produite au grand jour : cela doit suffire pour les ignorants, et ceux-ci doivent croire que Mahommed est le sceau des Prophètes. Mais l'esprit clairvoyant comprendra que c'est l'enfant, le bébé qui a été produit au grand jour; il lui reste, à travers l'évolution des âges à devenir jeune homme, homme fait, homme mûr, vieillard. Chacun de ces états aura besoin d'un enseignement nouveau : et, si l'on admet la théorie de notre auteur sur la succession des Prophètes précédents il faut bien l'admettre encore pour ceux qui suivront.]

Il se peut donc que ce qui est licite chez Mohammed reste licite jusqu'au jugement dernier et ce qui est illicite restera illicite jusqu'à la même époque.» [nota : Le Bâb ne se compromet pas ici. En réalité le jugement dernier de Mohammed est la manifestation du Bâb, comme celui de Jésus était l'apparition de Mohammed]

«Après que la semence de la religion et de ses croyants sont arrivés au degré de créature humaine, le Dieu du monde, leur impose comme devoir les ordres de la religion évidente. Tant que l'Unité de religion n'est pas arrivée à la maturité, Dieu confie la garde de cette religion et de ses fidèles à. quatorze personnes bénies.
[nota : Retenir ce chiffre de quatorze. Si peu que la science européenne connaisse du Bâbisme, au moins sait-elle que le nombre de l'Unité est dix neuf; peut-être serait-elle tentée de voir ici une contradiction : il n'en est rien. Nous verrons que dans. la manifestation de Jésus, comme dans celle de Mohammed, les portes ont été au nombre de quatorze. Les douze apôtres, Marie et Jésus font quatorze; les douze imams, Fatemèh et Mahommed font le même chiffre. En dehors de l'Unité Divine, il nous reste quatre personnages qui sont la représentation des quatre Puissances, la Vie, la Mort, la Naissance et la Nourriture. Ces quatre personnages ont existé chez les chiites; ce sont les quatre navabs (Voir Séyyèd Ali Mohammed dit le Bâb).]

Puis, quand les fidèles de la religion sont arrivés à la première année de la maturité, il commande la disparition de son témoignage [nota : Les Évangiles] et il ordonne à ses créatures d'obéir à son témoignage [nota : Le Qoran]. Tant qu'enfin, au prix de bien des difficultés l'être arrive au degré de la science et de l'opinion ferme en matière religieuse.»

«Pendant l'espace de mille années des divergences (d'opinions) se sont fait jour au milieu de la secte chiite qui, elle, est dans la vérité. De telle sorte que tous en vertu de la crainte qu'ils éprouvent de Dieu, en vertu de l'ordre de la religion de faire tous ses efforts les plus sincères dans les actes vrais et bons, n'aient plus besoin, dans leurs actes, d'obéir à autrui. Ainsi tous sont dignes du jour du lever de la Lune évidente à l'Orient suivant les termes clairs de l’Émir des Croyants, sur lui soit le salut. Dans ces jours-là ceux qui n'agissent pas sincèrement dans les épreuves que Dieu fait descendre, il les éloigne de la religion évidente, de sorte que ceux qui lie sont pas gens d'Unité - cette Unité étant le but essentiel des contingences - sortent du cercle de ceux qui en bénéficient.»


* Exemple divin :

«Si quelqu'un a agi suivant la religion de A. le Prophète - le salut soit sur lui et sa famille - dans le summum de la sincérité, si ce quelqu'un a affirmé la lieutenance des gens de pudeur (les imams) - sur eux soit le salut - mais se détourne de l'ordre de Houssein ben Rouh, - que la miséricorde de Dieu s'étende sur lui - qui était l'un des fondés de pouvoirs [nota : Voir Séyyèd Ali Mohammed dit le Bâb] des jours de la petite disparition, il n'y a pas de doute que les oeuvres de ce quelqu'un soient complètement vaines ; car le fruit de tous ces actes est d'obéir à Dieu, c'est-à-dire de l'affirmer. Les actes de personne, dans aucun temps, ne servent de rien s'il n'obéit à la Volonté de l'ordre de Dieu à l'époque où il agit.» [nota : Voir Béyân, Unité 1ère Porte 1er]

«Maintenant que tu connais un atome de la Vérité, sache que l'ordre de Dieu, en tout état, est plus évident que le soleil. Personne n'a d'arguments contre le Dieu du monde, le très élevé, Celui dont la grandeur est sublime.»

«Donc, après que, durant les jours de la disparition les divergences furent arrivées au plus haut degré et que les hommes se fussent rapprochés de la compréhension de l'Unité, il devient obligatoire, pour la miséricorde du Dieu du monde, de choisir dans son témoignage un esclave (qu'il doue) d'un témoignage complet, et qu'il le manifeste; et ce, afin de changer les routes des divergences en point de l'Unité.»

«De même que les principes de la religion et les fidèles de ce temps ont progressé du monde des corps, de même les signes de Dieu, du rang de la limite ont progressé jusqu'à l'infini [nota : Du rang matériel jusqu'à l'immatériel. Voir le Traité des Sept Preuves]. Il est donc obligatoire que le témoignage de cet esclave soit au-dessus du monde des intelligences qui ne sont que les degrés de la connaissance et de la nudité.» «De ce fait qu'ici l'affirmation était difficile pour la plupart des hommes, ces rangs sublimes il les a fait descendre jusqu'au rang matériel de la parole, mais dans un rang tel que personne n'a la puissance d'en produire de semblables.»

«Et il ne leur a pas fixé de limites (à ces paroles) afin que sur toutes les créatures elles soient un témoignage aussi éclatant que le soleil du firmament.»

«Combien étrange est l'industrie du Seigneur de la Grandeur! Combien est parfaite sa puissance! Du sein même des divergences de la religion, il choisit un esclave au milieu des persans et lui ouvre la langue dans le langage des versets, d'une telle façon que jamais quelqu'un auparavant n'en a apporté de semblables!»

«Tout ce qu'il veut, à tout instant il le dit sans une hésitation, il l'écrit sans un arrêt de sa plume. Et par la force même de la ressemblance de ce qu'il écrit avec les versets de Dieu, personne ne peut en affirmer la différence.»

«Et ceux-ci (ces versets) ne sont pas comme les versets du Qoran : peut-être sont-ce des versets qui sont un témoignage sur tous les gens de la terre : et semblables à eux, en forme et en signification est la figure qui paraît dans le cinquième miroir.»

«Tous les versets que Dieu a fait couler de ma langue, leur sens, un mot d'entre leurs mots, en face d'un mot du Livre de Dieu (Qoran) en face des paroles de gens de pudeur (les imams) est le néant absolu.»
«Ce qui a pu être vu jusqu'à présent du Livre de la Justice, 14000 versets, cela suffit comme témoignage pour tous les gens de la terre, car, par une bienveillance de Dieu, ils coulent de la nature seule des trésors de l'invisibilité.»

«Qu'y a-t-il donc d'extraordinaire pour les hommes? Après la descente du Livre de Dieu (le Qoran) au milieu même des gens d'éloquence et de faconde, personne ne voulut croire durant dix années : d'aucuns disaient : ce sont fables des anciens; d'autres : ceci ressemble aux paroles des persans; d'autres enfin : ce sont racontars des anciens, tant qu'en fin de compte ils constatèrent leur impuissance et finirent par croire.»

«O interrogateur! Le traité des oeuvres de l'année se compose de quatorze portes : ses versets sont au nombre de 214! Montre les donc à tous les oulémas arabes ou persans. Par la Vérité de Dieu 1 dont la volonté est la Volonté, si tous les hommes de la terre se réunissaient ils ne pourraient apporter une porte semblable à l'une de ces portes.»

«C'est ainsi que du jour du lever de cet ordre, jusqu'à cet instant, par la Vérité de Dieu qui connaît toutes choses, je n'ai pas vu un seul verset apporté par qui que ce soit. De quelqu'un qui niait tous les versets j'ai demandé un hadis, il ne pu le produire, et c'est là chose impossible et inaccessible.»
Si quelqu'un arrange des mots, ce sont des mots qu'il a pillés de droite et de gauche, non pas qu'il puisse parler du sein même de la nature de Dieu. Ce qu'il peut apporter ce ne sont que paroles des gens de l'enfer.»

«Quelqu'un se peut-il mettre en opposition avec cet ordre, et avoir comme l'auteur de ce livre la puissance de ne parler, s'il veut le faire, durant toute sa vie, qu'en versets, en tout état de cause, sans qu'aucune impuissance se puisse manifester de lui ?»

«Si le témoignage de l'imam, sur lui soit le salut, est qu'il faut qu'il possède tous les signes (qu'on lui demande) cela est vrai. Mais il est un signe auprès duquel tous les autres signes sont néant, et n'en donnât-il pas d'autres que celui-là que son témoignage est complet.»

«Oui, certes : si son témoignage avait été autre chose que des versets, il eut été obligatoire pour lui de donner à chacun tout ce qu'il demanderait. Mais du moment que son témoignage est supérieur à tous les témoignages matériels, il n'y est plus obligé, et soli témoignage est parfait pour tous, ainsi qu'il est descendu: «Sache qu'en vérité, un verset des versets que nous venons maintenant de faire descendre sur toi dans ce livre est, dans l'ordre de Dieu, égal aux versets de tous les Prophètes et à tous les témoignages que les hommes te demandent.»
«Si quelqu'un vient à dire : «Ce témoignage (ces versets) est une industrie qui vient de lui» celui qui parlerait ainsi est réprouvé. C'est ainsi qu'il en est ordonné dans le Qoran, mot pour mot.»

«Qu'un menteur vienne à dire : «dans certains endroits des versets il y a des choses contraires aux règles des gens de cette langue (arabe)»; ceci est une imposture. Toits les versets, comme ceux du Qoran ont coulé suivant la formule des règles divines. Dire le contraire est mensonge de démons ou manque de science de la part des scribes.» [nota : C'est dire que les fautes que l'on relèvera ou n'en sont pas ou proviennent du copiste]

«Si tous les oulémas veulent, soit dans le livre de la Justice, soit dans le traité entre les deux Harems [nota : Kétab beïn el Harémeïn], trouver un mot fautif ou deux mots sans liaison, ou contraires aux règles du Livre de Dieu, et des gens de cette langue, ils ne le pourront pas.»

«Peut-être un seul verset conforme aux règles des gens de la langue confirme (ma) prétention et suffit comme preuve à tous les hommes.»

«Dis aux hommes : Mourez dans votre colère, entrez dans le feu à cause de votre action d'associer; soyez comme les pierres de l'enfer qui ont été cuites par la violence de la chaleur.» [nota : Qoran III, 115]

«Ce verset suffit pour les gens de doute et d'ignorance, tant que dure la Puissance de Dieu».

«Sache que le Dieu du monde a élu quelqu'un pour conserver la religion de son témoignage; les témoignages certains, les arguments tranchants, il les lui a mis dans la main : il l'a fait grandir parmi les persans et, pour ses oeuvres de Vérité, celui-ci n'a pris de leçons auprès de personne. Peut-ê1re est-il absolument ignorant comme l’enfant qui vient de naître, relativement à de pareilles oeuvres.»

«Peut-être, jusqu'à présent, n'a-t-on jamais vu personne qui ait grandi parmi les persans et à qui il soit possible de parler avec des paroles telles que les éloquents et les diserts les philosophes et les savants affirment leur impuissance et leur ignorance même de leur sens apparent. Cependant les 29 lettres de l'alphabet étaient et sont dans la main des savants, et cependant, parler de cette façon nouvelle n'a jamais été dans la puissance de personne, car cela n'est pas possible.»

«Quand un savant prend la plume à la main et veut écrire un verset de sa propre nature, sans faire d'emprunts au livre de Dieu, alors apparaît la sublimité et la difficulté de l'oeuvre : en vérité cela n'est possible à personne, excepté à celui que Dieu veut. De là que la Puissance Parfaite de Dieu est complète, il a donné au maître de cet être, en dehors de ce signe sublime, de ce grand argument, d'étranges rangs divins, de telle sorte que toute personne douée de souille puisse se convaincre que des versets de ce genre ne sont possibles à personne en dehors de la permission de Dieu. C'est ainsi que, par exemple, en l'espace de douze heures, il écrit un traité solide sans arrêt de la plume. Quel témoignage est donc plus sublime que celui-là que l'homme soit arrivé au rang de la vérité des oraisons ce qui est le rang d'intimité avec le Bien-Aimé.»

«C'est ainsi que S. A. Sadeq, que le salut soit sur lui! dans son Misbah ouch Chériè, l'a clairement expliqué. Or, jusqu'à aujourd'hui ce rang ne s'est manifesté d'aucun des philosophes, d'aucun des savants, sous sa forme parfaite. Si cela s'était produit, ces paroles eussent subsisté. Or, personne autre que les gens de pudeur, sur eux soit le salut ! n'a pu prétendre à ce rang. C'est ainsi que l'auteur du Livre Haqq oul Yaghin donne, comme le plus grand miracle des gens de Dieu (imams) leurs propres paroles.»

«Au sujet du traité intitulé Sahifé Sedjadiyè tous les oulémas ont dit qu'il était «les psaumes» des gens de la maison. On est même allé jusqu'à écrire que ce livre était, en tout, semblable à un livre révélé. Comme on affirme au sujet de ces Sahifé Sedjadiyè la lieutenance divine! et l'on hésite au sujet de ces quelques traités (les miens) qui ont progressé jusque sans fin du monde de la limite, et au sujet de ce qui s'y trouve! Je nie réfugie en Dieu contre les pensées démoniaques. En vérité ce démon est pour les hommes un ennemi évident.»

«Si un homme doué de science regarde en vérité, il saura combien il est difficultueux d'amener en un clin d'oeil dans le monde des mots - qui est le monde des corps - ces rangs qui sont au-dessus du monde de l'intelligence; que de plus il en contemple l'ordonnance - soit apparente, soit intime - et alors il comprendra combien cette chose est sublime.»

«Par la vérité du Dieu qui a fait descendre le Qoran sur S. A. le Prophète, que la bénédiction divine soit sur lui et sa famille, une communication avec Dieu, éloquente et cadencée, est en réalité plus grande que toutes les sciences, plus haute que toute obéissance, particulièrement quand les rangs sublimes se manifestent en des paroles nouvelles.»

«Quiconque regardera vraiment les oeuvres écrites de l'auteur de ce livre saura que le sens et les mots il les a amenés dans ce monde de contingences, du monde des choses invisibles. Aucun phénomène semblable ne se peut constater dans les paroles des imams. Ne va pas t'imaginer que je dise que ces traités sont plus complets et plus hauts. [nota : On saisit ici sur le vif le Procédé constant du Bâb. Il affirme brutalement, puis craignant d'avoir scandalisé il revint sur ses paroles mais seulement pour ceux qu'il aurait scandalisés. Les autres n'ont qu'à s'en tenir à l'affirmation]
Il n'en est pas ainsi par la vérité du Dieu qui a manifesté les gens de Dieu dans sa lieutenance absolue. Mon existence et mes qualités, les paroles qui sortent de ma langue et de ma plume et qui sortiront encore, avec la permission de Dieu, ne peuvent être comparés à un mot des paroles des gens de pudeur (imams) Eux séjournent dans le monde de la Volonté de Dieu [nota : Ils sont la Volonté de Dieu] et les autres qu'eux ne sont mentionnés qu'à l'ombre de leurs oeuvres à eux. Comment la main peut-elle parvenir à atteindre ce degré.»

«Dieu est bien au dessus des qualités qu'on lui attribue.»

«Deuxièmement : des rangs élevés du maître de cet ordre (le Bâb) sont des Khotbès qui sont sorties de sa main avec les plus hautes paroles des gens d'éloquence et d'explication, plus faciles (à comprendre) que toutes choses. Si vraiment tout le témoignage du maître de ce rang n'était qu'une Khotbè, du genre de celles qui ont été manifestées (par lui) cela eut suffi comme preuve à tous.»

«Tous voient et savent cependant que les oulémas, après un profond examen des livres, après de nombreuses réflexions, arrivent, avec des difficultés inouïes à écrire une Khotbè : en fin de compte, quand on met leur oeuvre en comparaison avec ces grandes Khotbès, alors tous disent: «Quelle différence!» Dieu ordonne en vérité entre tous.»

«Si les oulémas ne s'étaient pas détournés de cet ordre (le bâbisme) aucune violence n'eût été exercée sur personne. Or, ce qui arrive, la faute en retombe entièrement sur eux (les oulémas) et ce, jusqu'au jour dit jugement suivant.»

«Troisièmement. Des rangs vrais est encore la manifestation de la science du maître de ces rangs, qui a expliqué en de brèves paroles les rangs invisibles et sublimes, de sorte que des personnes d'entre les oulémas de pareilles explications ne sont issues. Tout ce qu'il a écrit il l'a confirmé par la preuve philosophique qui est la plus grande des preuves.»

«Chacun des maîtres d'intelligence qui a vu le commentaire de la sourate de la Vache, les traités, les réponses aux demandes des gens de science s'est convaincu de tout ce qui y est dit. Les matières que les oulémas ont mentionnées dans des questions nombreuses se sont manifestées dans des paroles nouvelles de façon complète et brève, du maître de ces versets : et tous les gens de science ont affirmé que ceci est un bienfait et un don éternel de Dieu très haut.»

«Ce fait que dans quelques rangs, par des variations de mots, dans d'autres, par le contraire des règles adoptées par les gens de science (il diffère d'eux), c'est afin que les hommes se convainquent que le Maître de ce rang n'a pas saisi les versets et les sciences par la route de l'acquisition : c'est par la lumière de Dieu que sa poitrine a été illuminée des sciences divines.»

«Qu'on fasse donc retourner les variations à la nouveauté et le contraire des règles, aux règles divines. Des paroles de ce genre sont descendues en grand nombre dans le Qoran. Par exemple le mot Kélémé est féminin: Dieu l'a fait descendre sous la forme masculine dans cette parole.»

«(Un jour les anges dirent à Marie) Dieu t'annonce la bonne nouvelle de la parole, que cette parole, le nom de lui est Messie.» [nota : Qoran III, 40]

«Au lieu du féminin. Il dit l'une des «grands» dans sa parole «En vérité, c'est elle une des grands (2) qui font peur aux hommes.» [nota : Qoran LXXIV-38]

«Il permet à chacun d'accepter les règles divines, car ceux qui n'ont pas accepté Dieu sont des méchants et des ignorants.»

«Et comme il a fait descendre contrairement aux règles de tous les gens de Dieu cette parole : «En vérité ces deux-là sont des magiciens.» De façon à ce que tous soient convaincus que l'instrument de la création des mots est l'ordre de Dieu et non autre chose.»

«De même que les mondes ont progressé, peut être bientôt se lèvera un jour où on lira les versets de Dieu contrairement aux règles et à l'accentuation usitées parmi les peuples de la langue. O mon Dieu! hâte l'allégresse des gens de Dieu par ton bienfait : en vérité, tu es le maître de la bienveillance éternelle.»

«Maintenant que tu connais les significations vraies de ce monde (du Qoran) sache que aujourd'hui dans la branche des Esna Achéri [nota : Les chiites, voir Séyyèd Ali Mohammed dit le Bâb], les divergences sont arrivées à leur comble. Quelques-uns, connus sous le nom de Ouçoulis se croient en la possession de la vérité parce qu'ils ont la science du ZENN [nota : Opinion, Provenant d'une étude attentive d'un fait, et produite par le raisonnement. – Analogie] au sujet duquel ils s'accordent tous; d'autres connus sous le nom d'Akhbari se croient dans la vérité parce qu'ils n'acceptent pas le témoignage de l'intelligence brillante [nota : Ils ont comme preuve : le livre, la tradition, le consentement universel]; d'autres connus sous le nom du feu Chéikh Ahmed [nota : Ahçahi], fils de Zéin-eddin - que Dieu bénisse la poussière de son tombeau - se croient en possession de la vérité absolue et pure. Ils n'ont cependant pas compris le dixième des paroles de cet illustre unitaire! D'autres sont connus sous le nom de soufis, et ils croient posséder le sens intime du Chériat alors qu'ils sont dans l'ignorance tant de son sens apparent que de soit sens intime, et en sont tombés loin, bien loin ! Peut-être peut-on dire d'eux que ces gens qui n'ont aucune intelligence ont choisi la route complète des ténèbres et du doute.»

«Il n'y a aucun doute que dans chacune de ces quatre religions il n'y ait des divergences à l'infini; de telle sorte qu'elles s'accusent mutuellement d'impiété. Et cependant, en dehors encore de ces quatre branches célèbres quelques-uns se considèrent comme les chefs d'une secte spéciale, comme les SADRIOUN [nota : Qui relèvent de Molla Sadra. Ce dernier était Méchchahi, tendant un peu vers les Echraqi dont le chef est Chéïkh Chéhab oud dine Sohraverdi. Que devient l'affirmation de M. de Gobineau déclarant Molla Sadra chef de l'Ecole dont dépendait le Bâb ?] et les autres. Chacun se croit dans la vérité et considère les autres comme dans le mensonge absolu. Comme le poète arabe a bien parlé quand il a dit :
Chaque amant prétend à l'union avec Leila
Et Leila nie qu'elle ait avec aucun commerce d'amour
Ce n'est que quand les larmes coulent le long des joues
Qu'on petit savoir qui pleure et qui en fait semblant.

«Il n'y a pas de doute que la Vérité absolue, au milieu de toutes ces divergences de la secte Esna Achéri, se trouve dans l'une d'entre elles. [nota : Il n'y a qu'à relire attentivement la liste de tout à l'heure pour savoir où vont les préférences du Bâb]
Cependant, en vérité, les gens qui sont en dehors, s'ils agissent pour l'amour de Dieu seront accueillis par Dieu.»

«L'ordre s'arrêtant ici (c'est-à-dire les divergences arrivant à leur comble) l'imam caché que Dieu hâte l'allégresse de son retour - a élu un esclave d'entre ses esclaves il l'a choisi au milieu des persans et des grands pour la garde de sa religion. Il lui a octroyé la science de l'Unité et la sagesse véritable qui est le meilleur de tous les biens. Or, comme à chaque époque, les gens de cette époque s'enorgueillissent de ce qui, chez eux, est le plus grand des signes, un personnage était suscité au milieu d'eux, orné de la sublimité de ce signe, de façon à ce que les gens d'intelligence n'hésitent pas à le reconnaître.» [nota : C'est le même raisonnement que dans le traité des Sept Preuves]

«Il n'y a pas de doute qu'à cette époque ci la gloire des oulémas consiste à connaître les points du Qoran et des hadis, et la gloire des savants à connaître les subtilités élevées du sens intime. C’est pourquoi il est obligatoire que I'esclave qui est choisi au milieu de la foule soit suscité avec le plus grand de ces signes, c'est-à-dire avec la science de l'intime et l'éloquence manifeste de l'intime de façon à ce que le témoignage soit parfait et complet pour tous les oulémas et tous ceux qui savent.»

«Chaque homme intelligent qui regarde dans les versets et les paroles verra cela de façon plus manifeste que le soleil en plein midi. Chaque personne versée dans la langue arabe et douée de vue, qui regardera l'éloquence des versets, verra, du côté des gens dit Béyân, cette chose dans la vérité certaine.»

«Aujourd'hui, après le lever de la lune du côté de l'Orient, il est ordonné dans le hadis de l'Émir des croyants - le salut soit sur lui - de lui obéir; il est obligatoire pour tous de lui obéir, de l'aimer, de suivre ses ordres.»

«Et c'est là la religion pure de Dieu Unique. Quiconque y veut croire, c'est pour lui-même qu'il y croit: quiconque veut dire: «c'est un mensonge» c'est à son détriment qu'il lance cette accusation.»

«Le témoignage de Dieu est complet sur l'universalité des êtres. Comprenez donc, ô hommes 1 si quelqu'un me connaît, il me connaît, si quelqu'un ne me connaît pas, je me ferai à l'instant connaître à lui. Si quelqu'un m'aime, en vérité il aime Dieu et son Prophète, et si quelqu'un m'ignore, certes il ignore Dieu, le Prophète et les amis de Dieu! et cette gloire me suffit.»

«Le témoignage de Dieu suffit pour la vérité de ma parole.»

«La manifestation de ces versets, de ces oraisons, de ces sciences religieuses provient de ce songe où j'ai vu la tête pure du Seigneur des Confesseurs séparée de son corps béni, en même temps que les têtes des autres confesseurs (tués à Kerbéla). Je bus sept gorgées de soit sang à cause de la perfection de son amour. C'est à la bénédiction du sang de cette altesse que je dois que ma poitrine ait été pleine de ces versets et de ces éjaculations lumineuses.»

«Gloire à Dieu qui m'a fait boire le sang de son témoin, et a fixé ce sang comme vérité de mon coeur; gloire à Lui qui, pour cette raison a fait sur moi, d'après son ordre, s'abattre le malheur.»

«Nous venons de Dieu et nous retournons à Lui.»

«Et c'est ainsi qu'agissent ceux qui agissent.» [nota : Les esclaves purs de Dieu]

Retour à la bibliothèque    Texte du Bayan arabe Chapitre suivant