La
dispensation de Baha'u'llah
Shoghi Effendi
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2 : Le Bab Amis chèrement aimés! Il est indubitable que la revendication de la double station prescrite pour
le Bab par le Tout-Puissant, constitue le caractère le plus distinctif
de la Dispensation Baha'ie. Le Bab lui-même a très hardiment
affirmé cette revendication, Baha'u'llah l'a certifiée avec
insistance, et le Testament d"Abdu'l-Baha lui a finalement apporté
la sanction de son témoignage. C'est encore une preuve de son unicité,
une formidable accession à la force, au pouvoir mystérieux et
à l'autorité dont ce cycle sacré a été
investi. A dire vrai, en principe, la grandeur du Bab réside, non pas
dans le fait d'avoir été le Précurseur choisi d'une si
transcendante Révélation, mais plutôt dans celui d'avoir
été investi des pouvoirs inhérents à l'initiateur
d'une Dispensation religieuse distincte, et d'avoir élevé le
sceptre de Prophète indépendant plus haut que ne l'avait fait
aucun des Messagers venus avant lui.
La courte durée de Sa Dispensation, le champ restreint où Ses
loisirs et Ses ordonnances ont été destinées à
faire sentir leur action, ne fournissent aucun critérium qui permette
de juger de Son origine divine et de mesurer la puissance de Son Message.
Baha'u'llah lui-même en donne l'explication suivante: “ Le très
court laps de temps qui seul sépare cette grande et merveilleuse Révélation
de Ma propre Manifestation antérieure, est un secret qu'aucun homme
ne peut éclaircir et un mystère tel qu'aucune intelligence ne
peut le pénétrer. Sa durée avait été prescrite
d'avance, et personne ne pourra en découvrir la raison, si ce n'est
par la connaissance de Mon Livre Caché.” Baha'u'llah explique
encore dans le Kitab-i-Badi, une de ses oeuvres qui réfute les arguments
des gens du Bayan: “Voyez, comme de suite après le terme de la
neuvième année de cette merveilleuse, de cette sainte et miséricordieuse
Dispensation, on avait immolé le nombre requis d'âmes pures intégralement
consacrées et sanctifiées.”
Les faits merveilleux qui marquèrent la venue du Fondateur de la Dispensation
Babie, les circonstances dramatiques de Sa vie féconde en événements,
la miraculeuse tragédie de Son martyre, le caractère magique
de l'influence qu'Il a exercée sur les plus éminents et puissants
de Ses compatriotes, à l'ensemble desquels chaque chapitre de l'émouvant
récit de Nabil octroie son témoignage, sont autant de faits
mémorables qui en eux-mêmes devraient être tenus pour des
preuves suffisantes de la validité de Sa prétention à
une Station aussi élevée parmi les Prophètes.
Bien que les annales transmises à la postérité par Son
éminent biographe soient pleines de traits pittoresques, ce brillant
récit doit pâlir à coté du chaleureux tribut offert
au Bab par la plume de Baha'u'llah. Ce tribut, le Bab lui-même l'a vigoureusement
soutenu par la claire assertion de Sa revendication, assertion dont les témoignages
écrits d"Abdu'l-Baha ont puissamment renforcé le caractère
et éclairci la signification.
Où, si ce n'est dans le Kitab-i-Iqan, l'étudiant de la Dispensation
Babie peut-il trouver ces affirmations catégoriques qui attestent sans
erreur possible un pouvoir et un esprit qu'aucun homme ne peut révéler,
s'il n'est pas une Manifestation de Dieu. “Une pareille chose pourrait-elle”,
s'écrie Baha'u'llah, “être rendue évidente sinon
par le pouvoir d'une Révélation Divine et par la Puissance de
l'invincible volonté de Dieu? Par la justice de Dieu ! Si un être
humain quelconque concevait dans son coeur une aussi grande Révélation,
la seule pensée d'une telle déclaration le jetterait dans la
confusion. Si les coeurs de tous les hommes se pressaient dans son cur,
il hésiterait encore à s'aventurer dans une aussi redoutable
entreprise.” “Il n'a été donné à aucun oeil”,
affirme-t-il dans un autre passage, “de contempler une aussi grande
effusion de générosité, Il n'est pas non plus d'oreille
qui ait ouï une telle révélation de Bonté miséricordieuse...
Chacun des Prophètes “dotés de constance”, dont l'élévation
et la gloire brillent comme le soleil, furent honorés d'un Livre que
tout le monde a vu, et dont les versets ont été dûment
précisés. Tandis que ceux qu'a déversés cette
Nuée de divine clémence ont été si abondants que
personne n'a pu les dénombrer... Comment peuvent-ils amoindrir cette
Révélation ? Aucun Age a-t-il jamais assisté à
des événements aussi mémorables ?”
Commentant le caractère et l'influence des héros et des martyrs
que l'esprit du Bab avait si magiquement transfigurés, Baha'u'llah
révèle ce qui suit: “Si ces disciples ne sont pas les
vrais champions de Dieu, qui d'autre pourrait prétendre à cette
qualité ? Si ces disciples, avec leurs merveilleux témoignages
et leurs uvres miraculeuses, n'étaient pas authentiques, qui
donc serait digne de revendiquer pour soi la vérité?... Le monde
a-t-il depuis les jours d'Adam assisté à un tel bouleversement,
à une si violente commotion?... Il me semble que seule leur force d'âme
a révélé ce qu'est la patience, et que la fidélité
elle-même n'a été engendrée que par leurs actes.”
Désireux de faire ressortir la sublimité du rang prédominant
du Bab par rapport à ceux des Prophètes du passé, Baha'u'llah
affirme dans cette même épître : “Point n'est d'entendement
capable de saisir la nature de Sa Révélation, point n'est de
savoir qui puisse concevoir la pleine mesure de Sa Foi.” Il cite ensuite,
pour renforcer son argument, ces paroles prophétiques: “La science
est constituée par vingt-sept lettres. Les Prophètes n'ont,
en tout, révélé que deux d'entre elles. Ainsi jusqu'à
présent les hommes n'ont connaissance que de ces deux seules lettres.
Mais quand le Qa'im se lèvera, il rendra manifeste les vingt-cinq lettres
restant." "Voyez", ajoute-t-Il, “combien est grand et sur, élevé
son rang. Ce rang surpasse celui de tous les Prophètes et Sa Révélation
dépasse l'intelligence et la compréhension de leurs élus”.
Il ajoute encore : “Sa Révélation a dû être
ignorée des Prophètes de Dieu, de Ses saints et de Ses élus,
à moins que, se conformant à un impénétrable décret
de Dieu, ils ne l'aient pas fait connaître.”
De tous les tributs que l'infaillible plume de Baha'u'llah a bien voulu offrir
au Bab, Son “Bien-Aimé”, le plus mémorable et le plus touchant
est ce court, mais éloquent passage qui rehausse si puissamment la
valeur des derniers paragraphes de cette même épître. Il
écrit, faisant allusion aux douloureuses épreuves et aux dangers
qui L'assaillaient dans la ville de Baghdad: “Nous demeurons au sein
de ces périls, prêt au sacrifice, entièrement résigné
à Sa Volonté: peut-être par la grâce et la miséricorde
de Dieu, sera-t-il permis à cette Lettre révélée
et manifeste (Baha'u'llah) d'offrir Sa vie en holocauste sur
la voie du Premier Point, le Verbe le plus exalté (le Bab).
Par Celui dont le commencement a fait parler l'Esprit, sans cet élan
de Notre âme, nous n'aurions pas séjourné un instant de
plus dans cette Cité. ”
Amis chèrement aimés! Un éloge aussi retentissant, une
assertion aussi hardie émanée de la plume de Baha'u'llah en
un ouvrage d'une telle importance, trouvent pleinement leur écho dans
le langage que la Source de la Révélation Babie a choisie pour
formuler les revendications qu'Il a avancées: “Je suis le Temple
Mystique”, c'est ainsi que le Bab proclame Sa station dans le Qayyumu'l-Asma,
“que la Main de la Toute-Puissance a élevé. Je suis la
Lampe que le Doigt de Dieu a allumée dans sa niche et fait briller
d'une splendeur éternelle. Je suis la Flamme de cette Lumière
céleste qui brillait sur le Sinaï au Point bienheureux, et qui
demeure cachée au centre du Buisson Ardent.” “O Qurratu'l'Ayn !”.
S'adressant à Sa propre Personne dans le même commentaire, Il
s'écrie: “je ne reconnais en Toi nul autre que la “Grande Annonciation”
Annonciation proclamée par le Concours du ciel. Par ce nom, J'en porte
témoignage, ceux qui entourent le Trône de Gloire T'ont connu
de toute éternité.” Il continue en ajoutant: “Avec
chacun des Prophètes, que dans le passé nous avons envoyés
ici-bas, nous avons établi un Covenant distinct concernant le “Souvenir
de Dieu” et Son Jour. Grâce au pouvoir de la vérité, ce
“Souvenir de Dieu” et son Jour sont manifestes dans le royaume de Gloire sous
les yeux des anges qui gravitent autour du Trône de miséricorde.”
“Si tel était Notre désir”, affirme-t-il, “il
serait en Notre pouvoir, par la vertu d'une seule lettre de Notre Révélation,
d'obliger le monde et tout ce qu'il renferme à reconnaître, en
moins d'un clin d'oeil, la vérité de Notre Cause. ”
De la prison forteresse de Mah-ku, Il apostrophe Muhammad Shah en ces termes:
“je suis le Premier Point qui a engendré toutes choses créées...
Je suis le Visage de Dieu dont la splendeur ne peut jamais être ternie,
le rayonnement de Dieu qui ne peut s'affaiblir... Dieu a daigné mettre
toutes les clefs du paradis dans ma main droite, et toutes celles de l'enfer
dans ma main gauche... Je suis un des piliers qui soutiennent le Premier Verbe
de Dieu. Quiconque M'a reconnu, connaît tout ce qui est vrai et juste,
il atteint aussi tout ce qui est bon et bienséant...pour créer
ma substance, Dieu ne s'est pas servi de la même argile que pour les
autres. Il M'a accordé ce que la sagesse humaine ne pourra jamais comprendre,
et que les fidèles ne pourront jamais découvrir.” Le
Bab, désireux de magnifier les virtualités illimitées
latentes dans Sa Dispensation, affirme de façon caractéristique
: “Si une petite fourmi voulait aujourd'hui posséder un pouvoir
tel qu'il la rendrait capable d'élucider les passages les plus abstrus
et les plus troublants du Qur'an, son désir serait d'autant plus assurément
exaucé que le mystère de la force éternelle vibre dans
le tréfonds de l'être de tout ce qui a été créé."
'Abdu'l-Baha commente ainsi cette saisissante affirmation : "Si une
aussi faible créature peut être douée d'une capacité
si subtile, de quelle efficacité infiniment supérieure doit
être le pouvoir émané de la grâce des généreuses
effusions de Baha'u'llah.”
A ces assertions pleines d'autorité, à ces déclarations
solennelles de Baha'u'llah et du Bab s'ajoute le propre témoignage
irréfutable d'Abdu'l-Baha, l'lnterprète désigné
des paroles de Baha'u'llah et du Bab. Tant dans Ses Tablettes que dans Son
Testament Il corrobore, non point par implication mais en langage clair et
catégorique, l'absolue véracité des assertions auxquelles
je me suis référé.
Dans une Tablette adressée à un Baha'i de Mazindiran, 'Abdu'l-Baha
rectifie l'interprétation erronée d'une de Ses assertions relative
au lever du Soleil de Vérité dans ce siècle. En termes
brefs mais concluants, Il énonce ce qui dans tous les temps doit être
notre vraie conception de la connexion existant entre les deux Manifestations
qui sont parties intégrantes de la Dispensation Baha'ie. “En
faisant cette déclaration”, explique-t-il, “je ne pensais
qu'au Bab et à Baha'u'llah à l'exclusion de tout autre. Mon
intention était de rendre clairs les caractères respectifs de
leurs Révélations. Celle du Bab peut être comparée
à la station du soleil qui correspond au premier signe du zodiaque
- le signe du Bélier - dans lequel le soleil pénètre
à l'Équinoxe d'Hiver. La station de la Révélation
de Baha'u'llah, d'autre part, est représentée par le signe du
Lion, position la plus élevée du soleil à la mi-été.
Ceci signifie que cette sainte Dispensation est illuminée par l'éclat
du Soleil de Vérité brillant à son point culminant avec
la plénitude de sa splendeur, de sa chaleur et de sa gloire.”
Dans une autre Tablette 'Abdu'l-Baha affirme plus spécifiquement :
“Le Bab, l'Exalté, est l'Aurore de la Vérité, la
splendeur dont la lumière éclatante brille sur toutes les régions.
Il est aussi l'Avant-Coureur de la Suréminente Lumière,
l'Astre d'Abha. La Beauté Bénie est Celle qui a été
promise par les livres sacrés du passé, la révélation
de la Source de lumière qui brillait sur le Mont Sinaï, dont le
feu flamboyait au centre du Buisson Ardent. Nous sommes, tous sans exception,
les serviteurs de leur seuil, et chacun de nous se tient à leur porte
comme un humble garde.” Encore plus énergique est l'avertissement suivant:
“Toutes preuves ou prophéties, toutes sortes de témoignages
basés tant sur la raison que sur les textes des écritures ou
encore sur les traditions, doivent être considérées comme
centrées en la personne de Baha'u'llah et en celle du Bab. C'est en
elles que l'on doit en trouver l'accomplissement intégral.”
Et finalement, dans Son Testament, le dépôt de Ses derniers
voeux et de Ses suprêmes instructions, en un passage conçu pour
jeter pleine clarté sur les principes directeurs de la croyance Baha'ie,
'Abdu'l-Baha appose le sceau de Son témoignage sur la station double
et exaltée du Bab en disant: “Voici la base fondamentale de la
croyance des gens de Baha (puisse ma vie leur être offerte en holocauste)
: Sa Sainteté l'Exalté (le Bab) est la Manifestation
de la concorde et de l'unité de Dieu ainsi que le Précurseur
de l'Ancienne Beauté (Baha'u'llah). Sa sainteté,
la Beauté d'Abha (Baha'u'llah) (puisse ma vie être
offerte en sacrifice à ses fidèles amis) est la suprême
Manifestation de Dieu et l'Aurore de Sa plus divine Essence.” “Tous les autres”,
ajoute-t-il significativement, “sont Ses serviteurs n'agissant
que par Son ordre.”
Parmi Les vérités fondamentales que le Message de Baha'u'llah
proclame avec insistance et que ses adeptes doivent soutenir de façon
absolue, se trouve l'affirmation suivante: Le Bab, initiateur de la Dispensation
Babie, est entièrement qualifié pour prendre rang parmi les
Manifestations de Dieu capables de se suffire à elles-mêmes.
Il a été investi d'une autorité et d'un pouvoir souverains
Lui permettant d'exercer les droits et prérogatives d'un Prophète
indépendant. Il ne doit pas être considéré seulement
comme le Précurseur inspiré de la Révélation Baha'ie.
Ainsi qu'il en a Lui-même témoigné dans le Bayan Persan,
en sa personne a été réalisé le dessein de tous
les Prophètes du passé, et j'estime qu'il est de mon devoir
de démontrer cette vérité avec force et pertinence. Nous
manquerions sûrement à ce que nous devons à la Foi que
nous professons et nous violerions un de ses principes aussi sacré
que fondamental si, par nos dires ou notre conduite, nous hésitions
à reconnaître les inductions de ce principe radical de la croyance
Baha'ie, ou bien encore si nous nous refusions à soutenir sans réserve
son intégrité et a démontrer sa vérité.
Vraiment, ce qui m'a surtout engagé à entreprendre la tâche
de traduire et d'éditer l'immortel récit de Nabil, c'est mon
désir de mettre les adeptes de la Foi en Occident à même
de mieux comprendre et de saisir promptement les formidables inductions de
Sa station élevée et de les porter à L'admirer et à
L'aimer plus ardemment.