Le courage d'aimer
Shoghi Ghadimi

8. Vivre et aimer ne font qu'un
Chapitre précédent Chapitre précédent Retour au sommaire Chapitre suivant Chapitre suivant


8.5. Le langage à tenir aux enfants

Un psychologue contemporain dit:

"Pour la croissance de l'enfant il faut deux aliments, l'amour et l'encouragement.

Si c'est aujourd'hui seulement que la science parle de l'amour et de l'encouragement en tant qu'aliment vital pour l'enfant, chez les Baha'is c'est depuis plus de 100 ans que toute l'éducation de l'enfant est basée sur l'amour et l'encouragement.

Partant de là, comme l'enfant aime beaucoup les histoires et les images, et qu'il apprend le mieux par l'analogie, dans les écoles Baha'ies, pour l'éducation morale de l'enfant on a principalement recours aux histoires et aux images.

Ce soir, je vais vous raconter quelques-unes de ces histoires qui se sont gravées dans mon esprit depuis que j'ai reçu mon éducation à l'école Baha'ie.

Ceux qui s'intéressent au langage à tenir aux enfants, trouveront peut-être ces histoires intéressantes et pourront s'en inspirer dans l'éducation de leur enfant.

A l'école Baha'ie, on commence avant tout à apprendre à l'enfant à AIMER. Et on ne se contente pas du terme AMOUR DU PROCHAIN, mais on insiste sur l'AMOUR DE TOUT LE MONDE et de TOUT CE QUI EST DANS LE MONDE. Car l'enfant doit apprendre à aimer non seulement les êtres humains, mais toute la création et, plus particulièrement, les plantes et les animaux.

A noter que c'est seulement aujourd'hui que les savants écologistes réclament cet amour.

Afin de justifier un tel amour, on commence à tenir à l'enfant des propos tels que ceux-ci.

Quand tu aimes quelqu'un, tu aimes tout ce qui lui fait plaisir, n'est-ce pas? Puisque tu aimes ta maman et que ta maman aime les fleurs, si elle demande d'arroser les pots de fleurs, tu le fais volontiers. De même tu aimes ton papa, et puisque ton papa aime son chien, tu aimes aussi son chien et tu le nourris volontiers, n'est-ce pas?

Mais les plantes et les animaux n'ont pas été créés seulement pour faire plaisir à ceux que nous aimons, ils sont en plus nécessaires à leur vie. Par conséquent, puisque nous devons aimer tout le monde, nous devons aimer tout ce qui est dans le monde, et plus particulièrement les plantes et les animaux.

Ceci dit on procède à l'étude du monde végétal pour dire combien les plantes nous sont nécessaires.

Les plantes nous nourrissent. Le pain que nous mangeons tous les jours vient des plantes. C'est du blé qu'on broie, pour en faire de la farine destinée à être cuite afin de donner du pain.

En passant on rappelle aux enfants qu`Abdu'l-Baha a dit: "Dans le bon pain il y a tout ce qu'il faut pour nourrir l'homme". S'il dit bon pain, il entend le pain complet. Par conséquent, il est recommandé aux Baha'is de se nourrir du pain complet.

Puis on parle de la nécessité des plantes pour l'instruction, en citant l'exemple du papier dont la substance provient des plantes.

On cite le cas des fleurs qui en plus de leur beauté nous fournissent les parfums. En passant, on rappelle aux enfants que Baha'u'llah a vivement!, recommandé à ses disciples de se servir des parfums.

Les plantes nous viennent en aide en cas de maladie pour la combattre efficacement. Et à ce propos, on rappelle aux enfants que Baha'u'llah dit: "Réduisez l'usage des médicaments et si vous trouvez qu'une herbe simple suffit, n'ayez pas recours à des drogues compliquées".

Avec tant de services que le monde végétal nous rend, on ne peut que l'aimer.

Et Baha'u'llah était le premier à donner l'exemple de cet amour pour le monde végétal. Déjà, quand il n'était qu'un enfant, il passait la majeure partie de son temps en plein air dans la nature.

`Abdu'l-Baha aimait tellement les fleurs qu'il donnait l'impression de leur parler quand il plongeait son visage dans les fleurs d'une plante.

Après le monde végétal on passe au monde animal.

On cite comme exemple le lait que nous donnent les vaches, les oeufs que nous donnent les poules, le miel que nous fabriquent les abeilles et bien d'autres services que nous rendent les animaux, en général. Et l'on illustre ces services par des histoires d'animaux. Je vais vous en raconter une en exemple.

En face de l'une des gares de Tokyo, les habitants ont fait ériger une statue à un chien, en mémoire de sa fidélité exemplaire. Chaque jour ce chien accompagnait son maître, professeur de l'Université, à la gare, et venait l'attendre au retour. Un jour le professeur ne revint pas: il était mort en donnant son cours. Le chien continua pendant dix ans à venir l'attendre tous les jours.

Par de telles histoires et par des raisonnements on inspire dans le coeur de l'enfant l'amour pour le monde animal.

Par la même occasion on rappelle à l'enfant cette parole d`Abdu'l-Baha qui dit que si on fait souffrir un animal, c'est comme si on faisait souffrir un homme avec cette différence que l'animal ne sait pas parler pour demander pitié.

Après le monde animal, vient le monde humain. Et l'on aborde alors l'amour du prochain.

Le maître à l'école Baha'ie combine l'amour et l'encouragement, en ce sens qu'il souligne que pour tout être humain, "le prochain " en premier lieu c'est l'enfant. Et ceci pour la simple raison que l'enfant à le coeur pur, et, par conséquent, a toutes les qualités pour être aimé. L'enfant se voit ainsi aimé et encouragé.

Et afin de renforcer son impression et de le convaincre qu'il ne s'agit pas d'une flatterie, mais d'un éloge justifié, on lui raconte plusieurs histoires illustrant la pureté de son coeur.

Je vais vous en raconter quelques-unes.

"Maman - dit le petit - je veux jouer avec Jojo".

"Non - lui répond sa mère - on ne joue pas avec les enfants qui ne sont pas bons. On joue avec les enfants qui sont bons".

"Est-ce que moi je suis bon?"

"Bien sûr".

"Alors Jojo peut jouer avec moi?"

La conclusion qu'on en tire pour l'enfant c'est que, par sa nature, il est sociable, il a besoin d'être avec ses semblables, il doit rester sociable, car le charme de la vie Baha'ie ne peut être ressenti seul, mais avec les autres. Comme le baiser qui ne se conçoit pas seul.

Une autre conclusion encore plus importante qu'on peut tirer de cette même histoire c'est que pour l'enfant, tous sont bons, l'enfant ne divise pas ses semblables en deux groupes: les bons et les mauvais, et en grandissant, il doit garder cette façon de penser pour l'appliquer à toute l'humanité, sans jamais diviser celle-ci en deux familles, les bons et les mauvais. C'est d'ailleurs le principe le plus important de la foi Baha'ie, principe qui dit qu'il n'y a qu'une famille, la famille humaine, et que ceux que certains appellent " les mauvais " doivent être considérés comme des malades ayant besoin d'être guéris.

Une autre histoire montre la pureté du coeur de l'enfant:

"Maman - dit le petit - j'aimerais bien que Charlotte vienne dîner à la maison.

"Mais voyons, tu m'as dit hier que Charlotte n'a pas été gentille avec toi, que tu ne l'aimes plus".

"Mais c'était hier, maman".

La conclusion qu'on en tire pour l'enfant c'est que s'il se fâche suite à un acte injuste à ses yeux, c'est une réaction spontanée de défense, mais il faut oublier l'acte injuste et ne pas garder rancune, ce qui est le fait de l'enfant, étant donné la pureté de son coeur.

Voici une troisième histoire illustrant la pureté du coeur de l'enfant:

Jacques était né dans une famille riche. Pour le Nouvel An ses parents lui achètent un beau costume, et tout heureux il le met pour aller à l'école. Mais il y voit son ami Jojo habillé pauvrement, et il en devient triste.

En rentrant à la maison, il dit à sa mère de lui acheter la prochaine fois un costume bon marché.

"Pourquoi, on est assez riche pour t'en acheter deux et de même qualité".

"Alors achetez-en deux, un pour moi et l'autre pour Jojo".

La conclusion qu'on en tire pour l'enfant c'est qu'il a un coeur tendre, et qu'il ne peut pas voir ses semblables tristes et malheureux, et qu'il cherche à partager sa joie et son bonheur avec ses semblables.

Et pour qu'il ne change pas avec l'âge on lui cite cette image qui se grave dans son esprit: En répandant du parfum sur son ami on en ressent l'effet soi-même. De même en donnant de la joie on en ressent soi-même.

C'est par de telles histoires illustrant la pureté du coeur de l'enfant qu'on l'encourage et qu'on explique la raison pour laquelle les prophètes aimaient tant les enfants et exhortaient leurs adeptes à les aimer.

On cite, par exemple, l'attitude de Jésus à l'égard des enfants.

L'amour de Jésus pour les enfants était tel qu'il avoue un jour à ses disciples que, chaque fois qu'il voyait quelqu'un chérissant un enfant, il avait l'impression que c'était lui-même qui était chéri. (Mat. 18/37).

Une autre fois Jésus dit que la vérité est cachée aux sages et aux intellectuels, et elle est révélée aux enfants. (Mat. 11/25).

A ce propos on raconte aux enfants cette histoire:

"Qu'est-ce qu'il faut pour demander pardon à Dieu?"

"Il faut se croire pécheur" répond Jojo.

Et c'est vrai, dit-on aux enfants, il ne faut jamais se croire un saint, il faut toujours croire qu'on a des défauts (et on en a toujours). De cette façon on ne devient pas orgueilleux, on reste humble. Et ce sont les humbles qui sont aimés et non pas les orgueilleux.

Pour que cette idée de l'attraction par l'humilité se grave dans l'esprit des enfants on leur raconte qu'un jour un enfant a demandé à `Abdu'l-Baha pourquoi toutes les rivières sont attirées par l'océan. Et il a répondu en disant que c'est parce que l'océan se tient plus bas que les rivières.

L'éducation Baha'ie étant essentiellement religieuse, dans les écoles Baha'ies on attache une grande importance à la prière.

On présente la prière comme un langage d'amour et un moyen pour demander à Dieu ce qui est bien pour nous.

On dit aux enfants:

Quand vous aimez quelqu'un vous aimez lui parler. Et bien vous aimez Dieu qui vous a tout donné. Vous voulez donc Lui parler.

Cette conversation avec Dieu c'est la prière.

Concernant la prière en tant que moyen pour demander à Dieu ce qui est bien pour nous, on leur raconte encore quelques histoires d'enfant, toujours pour les encourager dans leur foi en la prière.

A titre d'exemple je vais vous en raconter deux:

Comme il n'avait pas plu pendant longtemps, les habitants d'une ville se mirent à prier. Mais aucune prière ne fut exaucée, et la sécheresse continua. Alors on demande à une petite fille de faire une prière. C'est ce qu'elle fit et il a plu abondamment. On s'est demandé alors quelle avait été l'attitude de la fillette pour que sa prière soit exaucée. Et l'on s'est aperçu qu'elle était sortie avec un parapluie. Tellement elle avait la foi en la prière ! Et cette foi doit être tellement profonde que si ce qu'on demande à Dieu n'est pas exaucé, qu'on reste sûr que ce n'était pas bien pour nous, et que, par conséquent, le " Non " de Dieu en réponse à notre requête est le " Oui " pour notre bien. Ce qui est si bien illustré par cette histoire:

"Maman - dit une fillette à sa mère - on nous a appris que Dieu ne laisse pas les prières sans réponse".

"Mais pas toutes les prières" dit la mère.

"Si, toutes les prières - répond l'enfant - et je demanderai à Dieu de me donner des yeux tout blancs. Tu verras la réponse de Dieu demain".

La pauvre maman n'a pas fermé les yeux toute la nuit, tellement elle a souffert pour sa fille. Le lendemain elle entre dans la chambre de sa fille, et elle la trouve devant le miroir examinant ses yeux.

"Tu vois que ce n'est pas pour toutes les prières qu'il y a une réponse " lui dit-elle.

"Mais si, maman, j'ai la réponse de Dieu".

"Et qu'est-ce que c'est?"

"C'est NON. Sais-tu pourquoi, maman? " Et elle montra à sa mère le dessin qu'elle a fait d'une fillette avec des yeux tout blancs.

"Regarde comme c'est laid " dit-elle. Dieu n'a pas voulu que je sois laide. Pour m'en assurer j'ai regardé encore une fois dans le miroir afin de voir si, après ma prière, Dieu n'a pas changé mes yeux. C'est toujours NON. Et maintenant je dois faire une autre prière pour dire merci à Dieu".

C'est cette foi qu'on demande aux enfants Baha'is de garder pour toujours afin qu'ils restent optimistes en toutes circonstances, courageux devant les épreuves inévitables de la vie, confiants en eux-mêmes et en leurs semblables et, par conséquent, bien disposés à collaborer avec tous aussi bien dans l'intérêt général que dans leur propre intérêt.

Voilà, chers amis, la méthode d'éducation Baha'ie, méthode qui utilise le langage d'amour et d'encouragement.

A vous de juger si en appliquant cette méthode dans l'éducation de nos enfants, nous les rendons plus heureux et, par la même occasion, nous leur garantissons un avenir meilleur que celui que leur promet le monde d'aujourd'hui.

Chapitre précédent Chapitre précédent Retour au sommaire Chapitre suivant Chapitre suivant