Le courage d'aimer
Shoghi Ghadimi

1. La Foi et l'Amour
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1.5. L'Amour est l'enfant de la Liberté

Une vieille chanson française dit: "L'Amour est l'enfant de la Liberté". Qu'on interprète cette parole comme on veut si on réfléchit bien, elle traduit une idée très profonde dont l'étude fait l'objet du présent exposé. Cette idée pourrait se résumer en deux mots: c'est par la vraie liberté que l'homme arrive au véritable amour du prochain.

Mais qu'est la vraie liberté, qu'est l'amour vrai? Concernant la définition de la liberté la première question qui se pose est celle-ci: pour qui est-elle? Car la liberté pour un animal ne signifie pas la même chose que pour l'homme. Pour un oiseau, par exemple, la liberté consiste à faire son nid là où il veut, à descendre sur n'importe quelle prairie, à se nourrir des produits de n'importe quel champ. Peut on concevoir une telle liberté pour l'homme? Peut on permettre à l'homme de bâtir sa maison là où il veut, d'entrer dans n'importe quel domaine privé, de s'emparer des produits de n'importe quel champ cultivé? Indiscutablement, cela satisferait l'égoïsme de l'homme. Mais alors ce serait un désordre infernal et personne ne voudrait d'une telle liberté. La vraie liberté est donc dans l'ordre et l'ordre est établi par l'observance des lois, lois qui empêchent l'égoïsme de l'homme de se manifester; autrement dit: lois qui libèrent l'homme de son égoïsme pour le porter à penser aux autres, pour l'intéresser aux autres.

Citons un autre exemple: Pour une bête de la jungle, la liberté consiste à sacrifier les autres à son profit, à se servir des autres pour survivre. Peut-on concevoir une telle liberté pour l'homme? Peut-on permettre à l'homme de sacrifier les autres pour lui-même, de les asservir pour les exploiter? Indiscutablement cela aurait satisfait l'instinct de domination des forts au détriment des plus faibles.

Mais ce serait une fois de plus un désordre infernal et personne ne voudrait d'une telle liberté.

La vraie liberté est donc dans l'ordre et l'ordre n'est établi que par l'observance des lois, lois qui empêchent le bas instinct d'asservissement des autres de se manifester; autrement dit, lois qui libèrent l'homme de son bas instinct d'asservir les autres pour ramener à servir les autres.

Or, S'intéresser à son prochain, servir son prochain, sont là des signes de ce qu'on appelle L'AMOUR du PROCHAIN, cet amour du prochain pour lequel l'homme est fait. Il en a, par conséquent, la faculté, tout comme le miroir, qui est fait pour refléter, en a la faculté. Seulement, si la poussière le recouvre, il ne peut plus manifester cette faculté. Il en est de même en ce qui concerne l'homme. Ses bas instincts sont comparables à la poussière. Les LOIS permettent à l'homme de se dépoussiérer, de se LIBÉRER de la poussière pour refléter sa faculté principale qui est l'AMOUR. Nous voyons donc que l'amour du prochain est la conséquence de la LIBÉRATION de l'homme de ses bas instincts, de sa liberté face à ces bas instincts, ce que la chanson française traduit en disant:

"L'AMOUR est l'enfant de la LIBERTÉ".

Ceci dit, voyons quelle est cette LOI qui libère l'homme de ses bas instincts pour l'amener à manifester sa faculté principale qui est l'AMOUR.

Ce n'est pas en philosophant que nous allons découvrir cette LOI. Nous allons simplement recourir à ce que l'expérience a démontré. Or, une expérience longue de plus de six mille ans nous montre que cette LOI a toujours été apportée par un homme génial appelé Prophète (ou "Mutant" par les historiens matérialistes. Et c'est cette loi qui a permis aux hommes de se libérer de leurs bas instincts, instinct d'égoïsme, instinct d'asservir les autres. Et, une fois libérés de ces bas instincts, de devenir ce qu'ils sont en réalité, par leur création même: c'est-à-dire s'intéresser à leurs semblables, servir leurs semblables, ce que les savants matérialistes appellent s'HUMANISER, et ce que, depuis des milliers d'années, on a pris l'habitude d'appeler SE SPIRITUALISER. Remarquons que les deux termes signifient la même chose car l'homme étant un être essentiellement spirituel, s'humaniser ou devenir homme veut dire devenir un être spirituel, se spiritualiser.

L'histoire fournit de nombreux témoignages de cette vérité. Citons-en deux à titre d'exemple.

Il y a 2000 ans, l'Occident était peuplé de tribus barbares et partiellement de quelques peuples civilisés tels que ceux de Rome et de Grèce. Les uns comme les autres étaient souvent en guerre et, en temps de paix, ce qui comptait pour les uns comme pour les autres, c'était le plaisir des sens; autrement dit, ils étaient tous prisonniers de leurs bas instincts, instinct guerrier, volupté, etc. Et aucune force ne pouvait les en affranchir. Mystérieusement, Jésus parvint à les en affranchir, leur permettant ainsi de devenir ce qu'ils étaient en tant qu'hommes, en tant qu'êtres aimants et, par conséquent, de s'entendre et de s'unir.

C'est ainsi que les tribus constamment en guerre s'unirent pour former les nations européennes actuelles. Ce rejet des bas instincts, cette liberté, résultent de la LOI de Jésus, et fut donc la cause de l'entente et de l'amour. Et c'est un témoignage éloquent de ce que l'Amour est l'enfant de la Liberté!

Bien entendu, tant qu'ils jouissaient de cette liberté tout allait bien. Mais le jour où ils redevinrent prisonniers de leurs bas instincts, les dissensions et les guerres recommencèrent.

Un autre témoignage fourni par l'histoire, c'est celui de l'Islam. Nous allons nous y arrêter un peu plus car en Occident, on n'est généralement pas bien renseigné sur l'Islam.

A l'époque de l'apparition de Muhammad, les Arabes étaient au dernier degré de la sauvagerie. Ainsi, par exemple, il y avait parmi eux des tribus pour lesquelles avoir une fille était une honte. De sorte que les femmes étaient souvent menacées de mort au cas où elles mettraient au monde une fille, et que c'était devenu une coutume d'enterrer les nouveau-nés si c'étaient des filles. Un homme pouvait avoir jusqu'à mille femmes, celles-ci en cas de défaite de leur tribu, devenaient des esclaves destinées à être vendues.
Les moyens de vie des tribus arabes consistaient dans le pillage et le vol: de sorte que, par l'exercice de leur "profession" même, les tribus arabes étaient constamment en guerre, se massacraient, pillaient les biens et capturaient les femmes et les enfants. Situation qu'on résume en disant que les Arabes étaient prisonniers des instincts les plus bas, qu'ils n'étaient plus des hommes.

Muhammad les a libérés de ces bas instincts: ils devinrent des hommes, ils s'humanisèrent et, au lieu de se détester, ils s'aimèrent, ils s'unirent pour former une grande nation.

C'est un second témoignage de ce que l'Amour est l'enfant de la Liberté, et qu'on arrive à cette liberté par l'observance des Lois révélées par les hommes géniaux tels que Moïse, Jésus, Muhammad, Bouddha, etc.

Si cela a été prouvé par des milliers d'années d'expérience, pourquoi alors l'homme d'aujourd'hui ne veut-il pas obéir à ces LOIS, et ceci au moment précis où il a tant besoin de se libérer de ses bas instincts afin de s'entendre, de s'unir avec ses semblables? C'est qu'il estime qu'aujourd'hui il est entré dans le stade de sa maturité, qu'il n'est plus l'enfant d'il y a 2000 ans, - ce qui est vrai -, et qu'il n'a pas besoin qu'on lui donne cette liberté, qu'il a cette liberté, ce qui reste à vérifier.

En effet, voyons si l'homme d'aujourd'hui a la liberté de s'affranchir de ses instincts. Il parait que non, car jamais l'homme n'a été aussi injuste, aussi égoïste, aussi insensible aux souffrances d'autrui. Dans le passé, s'il offensait son prochain, il en souffrait, aujourd'hui il n'en souffre plus. A ce propos, permettez-moi de vous raconter une petite histoire.

Un bonhomme entre dans un bar et demande une boisson. Il en boit la moitié et l'autre il la jette au visage du barman.

- Qu'est-ce qu'il vous prend? s'étonne le barman.

- C'est un geste impulsif, répond-il, auquel je ne peux pas résister et j'en souffre.

- Allez donc consulter un spécialiste.

Un mois après le bonhomme revient, demande une boisson. Il en boit la moitié et l'autre il la jette au visage du barman.

- Et alors, vous n'avez pas consulté un spécialiste, demande le barman.

- Si, dit-il, et quel succès, je ne souffre plus, je ne souffre plus.

Vraiment, jamais l'homme n'a été aussi égoïste qu'aujourd'hui C'est la raison profonde de toutes les discussions au sein d'un même pays, d'une même religion, d'une même classe, d'un même parti, d'une même famille. L'homme d'aujourd'hui devient de plus en plus prisonnier de ses bas instincts et il n'a pas de liberté pour s'en débarrasser.

Même si nous prenons le mot liberté dans son sens le plus commun, nous voyons que l'homme d'aujourd'hui n'a pas de liberté !

L'homme d'aujourd'hui est-il libre de dire ce qu'il pense? S'il est sous le régime dictatorial, il préfère se taire. Dans un de ces pays, cette anecdote se raconte très fréquemment:

Un citoyen s'installe dans le fauteuil du barbier. Celui-ci lui savonne la barbe puis demande tout en aiguisant soigneusement son rasoir:

- Qu'est-ce que vous pensez de notre Président? Croyez-vous qu'il restera au pouvoir.?

- Écoutez, je préfère me taire.

- Enfin, vous avez bien une opinion à ce sujet?

- Certainement, la même que la vôtre.

- Comment, vous connaissez la mienne?

- Aucune importance puisque c'est vous qui tenez le rasoir.

Quant au régime démocratique, on le définit ainsi:

La démocratie est un régime sous lequel on a la liberté de dire qu'on n'a pas de liberté.

Et c'est vrai. La Presse et la Radio ne nous disent-elles pas constamment que nous sommes privés de libertés les plus élémentaires? et nous en sommes inconscients. On nous nourrit de nourriture dénaturée, dévitalisée par l'adjonction des conservants, des solvants et des colorants.

Nous sommes donc privés de la liberté de nous nourrir d'une nourriture naturelle et saine et nous en sommes inconscients. Nous sommes condamnés à boire de l'eau polluée par les industries chimiques et les déchets radioactifs. Nous sommes donc privés de la liberté de boire de l'eau naturelle, pure, et nous en sommes inconscients.

L'air que nous respirons est de plus en plus pollué, car, d'un côté, on en augmente la dose d'anhydride carbonique par une circulation motorisée de plus en plus intense et dépassant les besoins normaux et, de l'autre côté, on détruit la végétation qui précisément absorbe ce gaz carbonique pour dégager, en échange, de l'oxygène. Nous sommes donc privés de la liberté de respirer l'air pur, nous sommes en présence d'une asphyxie certaine et nous en sommes inconscients. L'éminent savant Jean Dorst estime qu'à cette allure, l'humanité n'aura pas plus de trois siècles à vivre. Seuls, précise-t-il, les pygmées des forêts africaines et les Indiens de l'Amazonie ont la chance de sortir indemnes de cette aventure à la Seule condition que nous ne les contaminions pas (voir Télémoustique, No 2290).

L'homme d'aujourd'hui est-il libre d'avoir son travail, c'est-à-dire le travail pour lequel il est fait et que, par conséquent, il aime? Non seulement il ne peut pas exercer ce travail, mais souvent môme il ne peut pas obtenir de travail afin de se nourrir.

Et en tout cela on accuse les dirigeants.

- "Nous sommes dirigés par une belle clique dont la moitié n'est capable de rien, se plaignait un bonhomme."

- "Il reste tout de même l'autre moitié" lui a-t-on fait remarquer.

- "L'autre moitié est capable de tout."

Ce n'est pas ainsi que pensent les Baha'is. Ils estiment que les responsables sont tous ceux qui dans la situation actuelle adoptent l'une des deux positions:

1) Profiter égoïstement de la vie puisqu'il n'y a rien à faire "les carottes étant cultes".

2) Se retirer pour ne penser qu'à son salut personnel en attendant la vie future dans la demeure des bienheureux.

Les Baha'is désapprouvent aussi bien les uns que les autres. Les uns comme les autres portent la responsabilité de la situation troublée de notre époque. Sans doute, les premiers sont plus responsables que les seconds. Mais les seconds ne sont pas dégagés de responsabilité. Tous sont comparables aux gouttes d'un même étang dont l'eau est trouble. Et je dis bien "comparables aux gouttes d'un même étang" car aujourd'hui les hommes sont tellement liés les uns aux autres, tellement interdépendants les uns des autres que personne ne peut s'isoler pour mener une existence indépendante. Aucune goutte ne peut s'isoler pour se soustraire à l'influence du milieu où elle se trouve, pour se purifier toute seule sans se préoccuper du milieu où elle se trouve.

C' est professer une foi mutilée que de penser à sa purification seulement, à son salut personnel, sans se soucier du salut général. Selon les enseignements baha'is, chacun a un double devoir:

1) Purification ou spiritualisation personnelle.

2) Purification ou spiritualisation de la communauté.

Ce qu'on entend par la purification ou spiritualisation personnelle, on le connaît; mais ce qui demande à être expliqué c'est la spiritualisation de la communauté. On peut reconnaître une communauté spiritualisée par plusieurs signes. Nous en citons ici trois:

1. Une communauté est spiritualisée si elle reflète les sentiments nobles de l'individu; ce qui n'est malheureusement pas le cas de nos jours, ni sur le plan matériel et sur le plan spirituel. En effet, comme nous l'avons dit, l'individu veut l'air pur, l'eau pure, la nourriture pure et il ne les a pas. L'individu veut la paix et il ne l'a pas, il ne veut pas la peur et il est condamné à avoir peur. En bref, l'individu n'a de liberté ni sur le plan matériel ni sur le plan spirituel. Or une communauté spiritualisée est une communauté où l'individu jouit pleinement de toutes les libertés.

2. Une communauté est spiritualisée si, non seulement elle traduit à l'échelon social les sentiments nobles de l'individu, mais en Plus, elle encourage la manifestation de ces sentiments et, par voie de conséquence, contribue à ce que tous reprennent courage pour se libérer des bas instincts. De ce point de vue, une communauté spiritualisée accorde à l'homme la LIBERTÉ dans le sens le plus large de ce mot. Ce qui une fois de plus n'est pas le cas de nos jours, où la communauté n'encourage pas les porteurs de qualités spirituelles tels que Martin Luther King ou Albert Schweitzer, mais propose à l'admiration les hommes qui sont TOUT, sauf porteurs des qualités spirituelles.

3. Une communauté est spiritualisée si elle résout ses problèmes non seulement par lé raisonnement, mais également par l'inspiration: comme l'individu résout ses problèmes non seulement par le raisonnement mais également par inspiration. Archimède se souciant uniquement du problème qui lui avait été soumis par le roi, parvint à le résoudre par inspiration et il découvrit ainsi une loi qui rendit beaucoup de services à la science. De même, une communauté spiritualisée qui n'a d'autre souci que celui de résoudre les problèmes communautaires peut être inspirée.

Ce qui une fois de plus n'est malheureusement pas le cas de nos jours, où l'on croit de moins en moins à l'inspiration.

Ceci dit voyons comment on peut arriver à spiritualiser une communauté. Et c'est là l'un des rôles principaux du stade actuel de l'évolution spirituelle de l'humanité, stade représenté par la FOI BAHA'IE. Si les stades précédents où les religions du passé avaient pour mission la spiritualisation de l'individu, ce que Jésus appelle la résurrection de l'individu, la FOI BAHA'IE a en plus pour mission la spiritualisation de l'humanité ce que Baha'u'llah dans sa lettre au Pape Pie IX appelle la résurrection de l'humanité.

Et que fait la Foi Baha'ie pour spiritualiser la communauté? Qu'est-ce qu'il y a de nouveau dans la Foi Baha'ie, qui permet la spiritualisation de la communauté et, par voie de conséquence, octroie la liberté à l'homme, cette liberté dont l'enfant est l'amour?

A ce point de vue, ce qu'il y a de nouveau, de particulier dans la Foi Baha'ie, c'est cette vie sociale spirituelle organisée, connue sous le nom de l'Administration Baha'ie.

Expliquons en bref comment cette Administration contribue à la spiritualisation de la communauté.

Nous avons dit que le premier signe d'une communauté spiritualisée est le fait qu'elle traduit à l'échelon social les sentiments nobles de l'individu. Pour cela, il faut avant tout que l'individu exprime ses sentiments. D'où la nécessité des réunions où tous expriment leurs idées et leurs sentiments tout en apprenant à TRAVAILLER ENSEMBLE, nécessité sur laquelle les Écrits baha'is insistent beaucoup.

Indiscutablement une communauté spiritualisée ne peut être formée que par des individus spirituels mais cela ne suffit pas car il y a bien des individus spirituels qui sont incapables de travailler en groupe. Et ceux qui parviennent à travailler en groupe sont ceux qui, pratiquement, s'en tiennent à l'esprit de L'UNITÉ DANS LA DIVERSITÉ

Je m'explique! Vous pouvez dire que par vos connaissances scientifiques vous n'êtes pas comme Einstein, ou que par vos richesses vous n'êtes pas comme Rockefeller; mais vous ne pouvez pas dire qu'en tant qu'HOMME, par votre DIGNITÉ HUMAINE vous n'êtes pas comme Einstein ou Rockefeller. Donc il y a UNITÉ.

Et il est nécessaire que tous prennent conscience de ce sentiment d'UNITÉ; ce. qui ne peut pas se faire d'une manière instantanée, et ne peut être atteint que par tout un processus impliquant un entraînement persévérant. Il faut donc que les Einstein et les gens de peu d'instruction, que les Rockefeller et les pauvres apprennent à se rencontrer dans un esprit d'unité et d'égalité. D'où la nécessité des réunions mensuelles sans classe.

Voilà pourquoi ces réunions mensuelles sans classe sont à la base de la vie sociale spirituelle organisée des Baha'i.

Mais ce n'est pas encore tout car cette unité n'est pas une unité dans l'uniformité mais une unité dans la diversité. Je m'explique. Les enseignements baha'is disent que chaque être humain tout en ne faisant qu'UN avec ses semblables est essentiellement différent d'eux par ses particularités du point de vue de la façon de penser, de la manière de chercher et de voir la vérité. Donc il y a diversité.

Et c'est cette diversité qui permet de voir la vérité sous tous ses aspects, si toutefois chacun expose sa façon de voir et qu'il est écouté par tous. En effet, la vérité est comparable à une pierre précieuse à plusieurs facettes, chacun en voit une, qui peut être l'opposée de celle que je vois.

Si donc je veux voir la vérité sous tous ses aspects, il faut:

1° que je présente la facette que je vois, autrement dit il faut que je dise ce que je pense;

2° que je me représente la facette opposée vue par un autre, autrement dit que j'écoute et que je respecte l'opinion opposée d'un autre, dans un esprit de détachement du "moi". Ces deux qualités à savoir l'honnêteté et la franchise dans l'expression de ses idées et le détachement du "moi" clans la recherche de la vérité, caractérisent l'esprit de L'UNITÉ dans la DIVERSITÉ.

C'est avec cet esprit que les Baha'is tiennent leurs réunions sans classe, qui constituent la fondation même d'une communauté spiritualisée.

Avec ces deux qualités, chacun dit franchement comment il voit le problème, et écoute attentivement et sincèrement ce que l'autre dit: peu importe s'il y a choc des opinions. Bien au contraire, c'est par le choc des opinions que l'étincelle de vérité jaillit, cette vérité qui exprime l'avis de la majorité, et qui va être traduite à l'échelon social, manifestant ainsi l'un des signes d'une communauté spiritualisée.

Ceci dit, voyons comment les opinions et les désirs des individus exprimés à ces réunions sans classe sont traduits à l'échelon social. Pendant toute une année de rencontres mensuelles régulières tenues dans un esprit d'unité dans la diversité, on apprend à se connaître et, plus particulièrement, à connaître ceux qui sont faits pour traduire à l'échelon social les sentiments et les désirs des membres de la communauté.

A la fin de l'année, en toute liberté, sans candidature, sans propagande, au scrutin secret, on procède à l'élection de ces personnes qui forment ce qu'on appelle la MAISON de JUSTICE.

Pourquoi "justice"? Etant donné que c'est cette institution qui a le devoir de décider et de traduire à l'échelon social les différentes suggestions émanant des réunions sans classe, elle ne doit pas être guidée par l'amour qu'elle a pour telle ou telle personne mais par l'amour qu'elle a pour toute la communauté. Or, c'est la justice qui est la plus belle expression de l'amour pour toute la communauté. Voilà pourquoi dans les Écrits sacrés Baha'is, nous lisons:

"Ce que j'aime avant tout c'est la justice".

Nous avons dit que le second signe d'une communauté spiritualisée, c'est qu'elle encourage ceux qui fournissent le meilleur exemple par leurs qualités spirituelles, et non pas ceux qui ont le génie de satisfaire habilement les convoitises de la chair avec les films "enfants non admis" ou les boites de nuit. Une communauté spiritualisée ne devrait même pas admettre de telles activités, si préjudiciables à la moralité de la communauté. Là encore c'est la justice qui s'impose. Car la sympathie pour les "talents" de ces hommes "géniaux" pourrait faire pencher les dirigeants vers le pardon, mais l'amour de la communauté implique l'application de la justice et non le pardon. Voilà pourquoi les Institutions ne s'appellent pas "Maison de Pardon" mais "Maison de Justice".

Comme troisième signe d'une communauté spiritualisée, nous avons mentionné le fait qu'elle est inspirée. Et l'inspiration vient quand on concentre son esprit sur ce qui profite à tout le monde, quand on médite.

Voilà pourquoi toutes les réunions baha'ies commencent et finissent par l'expression de ce désir ardent adressé à Dieu, afin de Lui demander Son assistance: ce qui s'appelle PRIÈRE.

Nous pouvons résumer ce qui a été exposé en disant:

Pour arriver à voir réaliser pleinement sa liberté aussi bien sur le plan social que sur le plan personnel, il faut fournir un double effort:

1° Effort pour sa spiritualisation personnelle,

2° Effort pour la spiritualisation de la communauté.

A la base de ce deuxième effort se trouve l'engagement de se rencontrer mensuellement et régulièrement avec les gens de toutes races, classes, origine religieuse, aux réunions où la participation implique qu'on soit préalablement LIBÉRÉS des préjugés tels que :

1° Aux yeux de Dieu, tous Ses enfants ne sont pas égaux: il y en a qu'Il aime, d'autres qu'Il rejette;

2° Ma religion est supérieure aux autres;

3° Mon prophète est plus grand que les autres;

4° Ma patrie est plus grande que les autres;

5° L'homme blanc est supérieur à l'homme noir;

6° L'homme est supérieur à la femme;

7° La religion n'a pas besoin d'être intelligible;

8° Le Travail n'a rien à voir avec la Religion.

Libéré de ces préjugés et de bien d'autres et, par conséquent, appliquant les principes tels que l'Unité du Genre Humain, Unité Religieuse, Unité des Prophètes, Citoyenneté Mondiale, Égalité Raciale, Égalité des Sexes, Intelligibilité de la Religion, Valeur religieuse du Travail, ..., appliquant de tels principes, on voit qu'on est devenu SOI-MÊME.

On est devenu Homme en tant qu'être aimant, on s'aperçoit combien il est vrai que l'Amour est l'enfant de la Liberté.

Ces réunions mensuelles sans classe, où se rencontrent les gens libérés des préjugés, les gens LIBRES, s'appellent chez les Baha'is FÊTES.

Et c'est à ces FÊTES que les Baha'is vous invitent.

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