LA FOI BAHA'IE
L'émergence d'une religion mondiale
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8. Administration et lois
Les
baha'is considèrent l'alliance spéciale de Baha'u'llah, grâce à laquelle un
futur ordre mondial et une civilisation mondiale verront naissance, comme l'une
des particularités de leur religion. Ils pensent que le noyau et le modèle de
ce futur et vaste système existent déjà dans les lois et l'ordre administratif
conçus par le fondateur de leur foi, mis en oeuvre et développés par 'Abdu'l-Baha
et Shoghi Effendi. C'est pour cette raison que les baha'is consacrent beaucoup
de temps et d'énergie à développer les institutions de leurs communautés. Ces
institutions de l'ordre administratif baha'i ne servent pas uniquement à résoudre
les problèmes et à prendre des décisions collectives à l'intérieur de la seule
communauté des croyants; elles sont aussi régulièrement entraînées et affinées
de manière que leurs potentiels administratifs d'ordre divin émergent progressivement,
tout comme les potentialités de l'être humain se développent au travers de l'instruction
et d'un effort continu.
Ceci explique la préoccupation que manifestent les baha'is pour tout ce qui
concerne les processus administratifs, fait remarqué par de nombreux observateurs.
Les baha'is pensent que Dieu a racheté à des fins divines l'une des activités
humaines de la civilisation moderne les plus corrompues et déformées. Ils croient
que le but de Dieu est de faire du service administratif une quête spirituelle
qui attirera des bénédictions non seulement sur ceux qui y contribuent directement,
mais aussi sur la société tout entière qui en dépend directement.
[Nota: 'Abdu'l-Baha a dit par exemple : Ces assemblées spirituelles sont
des lampes qui brillent, de célestes jardins d'où s'exhalent les parfums de
sainteté sur toutes les régions... D'elles, l'esprit de lumière s'écoule dans
toutes les directions. Elles sont vraiment les puissantes sources du progrès
de l'homme... Cité par Shoghi Effendi dans
Dieu passe près de nous,
p. 321.]
8.1. Les institutions de la foi baha'ie
Sous les directives des écrits du Gardien de la foi baha'ie et l'autorité du
rôle législatif et exécutif de la Maison Universelle de Justice, l'organisation
de la communauté baha'ie est structurée autour de deux principaux types d'institutions
:
- celles conçues pour prendre des décisions en tout ce qui concerne la vie et
les objectifs de la communauté; et
- celles qui fonctionnent pour protéger la communauté et contribuer de manière
particulière à la propagation de la foi.
Les institutions qui prennent des décisions sont essentiellement la Maison Universelle
de Justice, qui fonctionne à un niveau international, et les assemblées spirituelles
qui existent à la fois au niveau national et au niveau local.
Les institutions de protection/propagation proviennent des pouvoirs conférés
par l'alliance de Baha'u'llah aux Mains de la cause de Dieu, et étendus par
le Gardien puis par la Maison Universelle de Justice à des corps de Conseillers
et à des corps Auxiliaires. Ils conseillent, encouragent et stimulent à la fois
les assemblées spirituelles et les croyants. Ces deux branches de l'ordre administratif
vont être expliquées dans ce qui suit.
8.2. La Maison Universelle de Justice et les assemblées
spirituelles
Pour préparer le futur établissement d'une maison de justice dans chaque localité,
ainsi que Baha'u'llah l'a enjoint dans ses Écrits, 'Abdu'l-Baha a déclaré qu'aussitôt
que le nombre de baha'is adultes dans une localité atteint le chiffre de neuf
ou plus, une élection doit se dérouler pour créer une assemblée spirituelle
locale qui servira d'autorité à la communauté locale. Chaque assemblée spirituelle
se compose de neuf membres élus parmi les adultes de cette communauté locale.
Les assemblées spirituelles ont pour tâche de superviser toutes les activités
baha'ies locales telles que la propagation (ou enseignement) de la foi, la conduite
de programmes éducatifs, la prise en charge de toute publicité ou publication
locale, l'organisation de réunions de prières, l'utilisation des fonds baha'is,
l'administration de conseils aux croyants sur les exigences spécifiques des
lois et enseignements baha'is, ainsi qu'un certain nombre d'autres responsabilités
similaires.
[Nota: Pour une introduction à la nature et aux fonctions des assemblées
spirituelles baha'ies, voir Adib Taherzadeh,
Les dépositaires de la confiance divine ]
'Abdu'l-Baha s'occupa de la mise en place des premières assemblées spirituelles
en Perse et en Occident et les guida dans leurs premières entreprises. Une grande
partie de la vie de Shoghi Effendi en tant que Gardien de la communauté baha'ie
fut consacrée à cette même tâche. L'ensemble des principes administratifs soulignés
dans l'importante correspondance de ces deux Interprètes désignés a été publié
sous forme de livres et manuels qui sont utilisés dans tout le monde baha'i.
Les directives qu'ils contiennent couvrent un nombre impressionnant de sujets
et sont la garantie même que le développement de la communauté baha'ie pour
les siècles à venir se conformera précisément au schéma conçu par Baha'u'llah
et par ceux qu'il a désignés comme Interprètes dans son alliance.
[Nota: Pour plus de détails, voir les différentes compilations des écrits
de Shoghi Effendi sur l'administration baha'ie, telles que Principes de l'administration
baha'ie; Shoghi Effendi, Baha'i Administration, Selected Messages, 1922-32;
l'Assemblée spirituelle locale; l'Assemblée spirituelle nationale.
Sommaire des compilations baha'ies]
Des assemblées spirituelles ont également été créées à un niveau national (et
parfois régional). Leurs responsabilités sont semblables à celles des assemblées
spirituelles locales, quoique plus importantes par leur étendue et leur complexité.
Elles ont en plus la responsabilité de superviser le travail des assemblées
spirituelles locales et de déterminer les sujets qui incombent à la responsabilité
des institutions locales et ceux qui doivent être traités à un niveau régional
ou national.
Alors que l'élection des membres de chaque assemblée spirituelle locale se fait
directement par les membres de la communauté locale même, l'élection des membres
des assemblées spirituelles nationales se fait en deux étapes. Tous les membres
adultes de la communauté baha'ie d'une région donnée élisent un nombre spécifique
de délégués. Ce nombre dépend de la taille et de l'étendue de la communauté
baha'ie de cette région particulière du pays. Les délégués de tout le pays se
réunissent ensuite pour une convention nationale annuelle et élisent les neuf
membres de l'assemblée spirituelle nationale parmi tous les adultes de la communauté
baha'ie nationale, qu'ils soient ou non des délégués à la convention nationale.
Le processus électoral qui donne naissance à des assemblées spirituelles baha'ies
contient un certain nombre de caractéristiques intéressantes, voire peut-être
même uniques. Tout vote s'effectue par bulletin secret. Les enseignements baha'is
interdisent également toute forme de propagande électorale, y compris la nomination
de candidats. Tout électeur écrit une liste de neuf noms différents sur son
bulletin. Après le décompte des votes, sont déclarés élus les neuf individus
qui comptent le plus grand nombre de voix. Ce système évite de présenter et
de nommer des candidats, laissant ainsi à chaque électeur un maximum de liberté
quant à son choix et évitant cette attitude de recherche du pouvoir inhérente
à de nombreuses autres formes d'élection. Il est supposé que tout croyant adulte,
une fois qu'il a été choisi par le corps électoral, sera capable et prêt à assumer
ses responsabilités en tant que membre d'une assemblée spirituelle locale ou
nationale.
Les élections ont lieu chaque année vers la fin du mois d'avril et coïncident
avec le festival baha'i de Ridvan. Ces assemblées spirituelles élues servent
alors pendant une année entière, prenant effet immédiatement après les élections
et, dans tous les cas, aussitôt que possible.
La forme et l'esprit que prend ce processus sont sans doute parfaitement illustrés
par les paroles suivantes de Shoghi Effendi :
" Si nous tournons nos regards vers les hautes compétences des membres des assemblées
baha'ies telles qu'elles sont énumérées dans les tablettes de 'Abdu'l-Baha ,
nous ne pouvons qu'être envahis par un sentiment d'incapacité et de consternation,
et nous serions vraisemblablement découragés si nous n'étions réconfortés par
la pensée qu'en nous levant pour remplir noblement nos devoirs, toute imperfection
dans notre vie sera largement compensée par l'esprit triomphant de sa grâce
et de son pouvoir. Il incombe par conséquent aux délégués choisis de considérer
sans la moindre trace de passion ou de préjugé, et indépendamment de toute considération
matérielle, les noms seuls de ceux qui allient le mieux ces qualités nécessaires
de loyauté incontestée, de dévouement désintéressé, d'esprit bien formé, de
facultés reconnues et de mûre expérience. "
[Nota: Les Principes de l'administration baha'ie, (recueil), p. 69-70.
Sommaire des compilations baha'ies]
Un autre aspect important des élections baha'ies doit être souligné : comme
dans de nombreux autres domaines de ses enseignements (se référer par exemple
au débat sur l'égalité des sexes, chapitre 5), Baha'u'llah a donné une forme
pratique à un commandement spirituel. Il souligna que les races minoritaires
et les groupes ethniques avaient été fortement désavantagés par la discrimination
dans de nombreuses régions du monde. Les membres de ces minorités n'ont jamais
eu l'occasion de développer les qualités d'esprit qu'ils possèdent cependant
tout autant que les peuples plus fortunés. La communauté baha'ie doit délibérément
gérer ses affaires de telle manière que ces injustices et handicaps soient éliminés
dans la mesure du possible. Par conséquent, au cours d'un processus électoral,
chaque fois que pour une tâche particulière un électeur hésite entre les compétences
d'une personne représentant un groupe minoritaire et un autre individu, il doit
être enclin par sa conscience à voter pour la personne représentant le groupe
minoritaire. De même, s'il y a ballottage au cours d'une élection baha'ie et
que l'une des personnes en question représente une minorité, la préférence devrait
lui être donnée au tour suivant.
Les mêmes principes électoraux fondamentaux s'appliquent à l'élection des membres
de la Maison Universelle de Justice. Dans ce cas précis, les électeurs sont
les membres des assemblées spirituelles nationales du monde baha'i. À la différence
toutefois des assemblées spirituelles locales et nationales, la Maison Universelle
de Justice n'est élue que tous les cinq ans au cours d'une Convention internationale
qui se déroule à Haïfa en Israël, Centre mondial de la foi baha'ie.
[Nota: La première élection de la Maison Universelle de Justice a eu lieu
en avril 1963.
Messages de la Maison Universelle de Justice ]
8.3. Les Mains de la cause, les corps des Conseillers
et leurs délégués
Ce système de prise de décision en groupe est secondé par des corps consultatifs.
Durant leur vie, Baha'u'llah et 'Abdu'l-Baha nommèrent un certain nombre de
croyants éminents Mains de la cause, soit pour propager, soit pour protéger
la foi baha'ie. Le Testament de 'Abdu'l-Baha indiquait que ces fonctions devraient
se poursuivre tout au long de la dispensation baha'ie; c'est pourquoi Shoghi
Effendi nomma lui aussi des Mains de la cause, dont vingt-sept étaient toujours
en vie au moment de sa mort en novembre 1957.
" Ô amis ! Les Mains de la cause de Dieu doivent être désignées et nommées par
le Gardien de la cause de Dieu. Elles doivent toutes demeurer sous son ombre
et obéir à son commandement...
Les Mains de la cause ont pour devoir de diffuser les parfums divins, d'édifier
l'âme des hommes, d'encourager l'étude, d'améliorer le caractère des hommes
et d'être toujours et en toutes circonstances purifiées et détachées des choses
terrestres. Leur conduite, leur comportement, leurs actes et leurs paroles doivent
témoigner de leur crainte de Dieu. "
[Nota:
Le testament d'Abdu'l-Baha
, pp. 27-28; voir aussi Baha'i World Faith, p. 444.]
En l'absence d'un gardien de la foi après la mort de Shoghi Effendi, il n'y
eut plus de possibilité de nommer d'autres Mains de la cause. La Maison de Justice
cependant a tous pouvoirs, selon les termes explicites de l'alliance de Baha'u'llah,
pour créer toute institution jugée nécessaire selon les besoins du développement
de la communauté baha'ie. Étant donné que le Testament de 'Abdu'l-Baha demande
que les fonctions remplies par les Mains de la cause se poursuivent en tant
que partie intégrante de l'ordre administratif, la Maison Universelle de Justice
créa une institution spécialisée dans ce but, une institution entièrement distincte
du système élu des assemblées spirituelles. Cette institution est connue sous
le nom de corps des Conseillers et ses membres servent à un niveau continental.
[Nota: Voir une déclaration générale de la Maison Universelle de Justice
publiée dans Messages from the Universal House of Justice 1963-1986, n° 59.,
Messages de la Maison Universelle de Justice ]
Les Conseillers sont des croyants éminents qui sont nommés pour cinq ans, chaque
corps continental possède de sept à seize membres.
Les Mains de la cause, encouragées par Shoghi Effendi, avaient déjà nommé sur
chaque continent des groupes de délégués, désignés comme corps Auxiliaires par
le Gardien. Ces corps secondaires ont été rattachés au corps des Conseillers
par la Maison Universelle de Justice, et les servent de la même manière qu'ils
servaient auparavant les Mains de la cause. De plus, avec le rapide développement
de la foi baha'ie ces dernières années, la Maison Universelle de Justice a autorisé
chaque membre du corps Auxiliaire à nommer des assistants pour l'aider à poursuivre
son travail au niveau local. Ainsi, parallèlement au système des assemblées
spirituelles nationales et locales, il existe maintenant une branche de l'ordre
administratif destinée à remplir certaines fonctions bien précises à un niveau
continental, régional et local.
8.4. Les rapports entre les Conseillers et les assemblées
spirituelles
Il existe deux différences principales entre les institutions qui constituent
les deux branches de l'ordre administratif baha'i. Ces différences portent sur
la manière d'opérer et sur les pouvoirs spécifiques à chaque institution. Les
assemblées spirituelles sont des corps constitués qui prennent naissance au
travers d'élections effectuées par la communauté baha'ie dans son ensemble,
et pour fonctionner, elles utilisent la prise de décision à la majorité. Les
Conseillers et les membres du corps Auxiliaire sont nommés individuellement
et respectivement par la Maison Universelle de Justice et les corps des Conseillers,
et ils fonctionnent avant tout individuellement comme des serviteurs de la cause
de Baha'u'llah. Bien que les membres des assemblées spirituelles accomplissent
à l'occasion certaines tâches individuellement, en tant que membres élus par
exemple, et bien que la consultation existe entre les Conseillers et les membres
auxiliaires, les assemblées demeurent principalement des corps constitués, tandis
que les autres institutions représentent des équipes d'individus travaillant
en collaboration.
La seconde différence est relative à la nature de l'autorité conférée à chacune
de ces branches de l'administration baha'ie. Le pouvoir de prendre des décisions
quant à la vie de la communauté revient uniquement aux assemblées spirituelles,
et en dernier lieu à la Maison Universelle de Justice. Les Conseillers et les
membres du corps Auxiliaire conseillent les assemblées spirituelles, commentent
leurs plans et entreprennent tout ce qu'ils jugent nécessaire pour les stimuler,
mais leur rôle se limite à ces activités. La responsabilité dernière et l'autorité
quant à la prise de décision incombent aux assemblées spirituelles, car elles
sont les représentantes élues de la communauté baha'ie. C'est ceci qui, sans
doute plus que tout autre facteur, différencie le rôle des Mains, des Conseillers
et des membres du corps Auxiliaire dans la foi baha'ie, de celui d'un clergé
(ainsi qu'il est communément défini par les autres religions). Les Mains et
leurs successeurs, les Conseillers et les membres du corps Auxiliaire n'ont
ni autorité pour prendre des décisions, ni fonctions sacerdotales; ils n'ont
pas non plus le droit d'interpréter les Écrits saints.
[Nota: L'autorité et les directives proviennent des assemblées, tandis que
le pouvoir d'accomplir les différentes tâches revient essentiellement au corps
des croyants tout entier. La principale tâche des membres du corps Auxiliaire
est de susciter et de libérer ce pouvoir. Lettre de la Maison Universelle de
Justice datée du 1er octobre 1969, The Continental Boards of Counsellors, p.
37.
Messages de la Maison Universelle de Justice ]
De plus, les Conseillers ne servent que le temps de leur nomination et non toute
leur vie.
Leur rôle est cependant très significatif. Ils sont choisis parce qu'ils ont
fait preuve, en tant qu'individus, d'un degré élevé de maturité spirituelle
et d'aptitudes certaines à rendre de précieux services à la vie de la communauté.
Les écrits baha'is leur accordent un certain rang en tant que membres de la
communauté, et l'on attend des assemblées locales aussi bien que des individus
qu'ils profitent de l'aide que leur expérience peut apporter.
8.5. Le centre international d'Enseignement
En 1973, les Conseillers et les membres du corps Auxiliaire furent réunis sous
les directives d'une seule institution internationale installée au Centre mondial
de la foi baha'ie, à Haïfa, Israël.
[Nota: Voir The Continental Boards of Counsellors, pp. 45-48.]
Cette institution est connue sous le nom de centre international d'Enseignement.
Il est composé des Mains encore en vie et d'un certain nombre de conseillers
nommés à cette fin par la Maison Universelle de Justice. Dans le futur, après
le décès de toutes les Mains, le centre international d'Enseignement sera uniquement
composé de membres nommés par la Maison Universelle de Justice, et l'institution
de ce centre continuera à fonctionner sous la surveillance de la Maison de Justice.
Les principaux devoirs du centre international d'Enseignement sont de coordonner
les activités des différents corps de Conseillers, d'aider la Maison Universelle
de Justice à développer les plans d'ensemble qui permettent à la foi de s'étendre.
Il serait peut-être utile de souligner la distinction que font les Écrits baha'is
entre la station spirituelle des croyants en tant qu'individus et le rang qu'ils
peuvent avoir dans la communauté baha'ie. La Maison Universelle de Justice a
dit :
" La courtoisie, la révérence, la dignité, le respect du rang et des réalisations
d'autrui sont des vertus qui contribuent à l'harmonie et au bien-être de chaque
communauté, tandis que l'orgueil et la mise en avant de soi sont parmi les plus
mortels des péchés ... le but ultime de la vie de chaque âme devrait être de
parvenir à la perfection spirituelle - d'atteindre le bon plaisir de Dieu. Le
véritable rang spirituel de toute âme n'est connu que de Dieu. Ce qui est très
différent des rangs et positions que les hommes et femmes occupent dans les
différents secteurs de la société. "
[Nota: Voir The Continental Boards of Counsellors, p. 60.]
8.6. Vie communautaire et Fête des dix-neuf jours
À un niveau local, les activités de la communauté baha'ie se concentrent autour
d'une réunion périodique, de toute la communauté, appelée une fête. Les dates
de ces réunions sont les mêmes dans tout le monde baha'i, elles sont basées
sur le calendrier solaire baha'i dont l'auteur fut le Bab. Ce calendrier se
compose de dix-neuf mois de dix-neuf jours, ce qui fait au total 361 jours.
[Nota: Baha'i World, vol. 13, p. 751.]
Les quatre jours restants de l'année solaire (cinq les années bissextiles) sont
appelés jours intercalaires, ils sont consacrés à offrir des cadeaux, à l'hospitalité
et aux réjouissances.
[Nota: Les quatre ou cinq jours intercalaires sont insérés dans le calendrier
baha'i juste avant le dernier mois de l'année, le mois du jeûne, qui débute
le 2 mars de chaque année du calendrier grégorien. En dehors des 19 jours de
fête et des jours intercalaires, l'année baha'ie comporte un certain nombre
de jours saints, parmi lesquels quelques-uns sont fériés. La plupart de ces
jours saints commémorent un événement capital des premiers temps de l'histoire
de la foi, tel que la naissance du Bab ou de Baha'u'llah.]
La fête a lieu le premier jour de chaque mois baha'i, il y a donc dix-neuf fêtes
dans l'année baha'ie.
Les fêtes se composent de trois parties. La première est consacrée à la lecture
de prières et de textes propres à la méditation qui peuvent être extraits aussi
bien des livres saints baha'is que des Écrits saints des autres religions. La
seconde partie est administrative : tous les participants, jeunes et enfants
compris, se consultent sur les affaires de la communauté. L'assemblée spirituelle
locale fait un rapport sur les décisions prises ayant trait à la vie générale
de la communauté; le trésorier fait lui aussi son rapport; et on encourage les
membres de la communauté à faire des suggestions, poser des questions ou exprimer
leurs préoccupations en consultant les représentants de l'assemblée spirituelle
locale. L'assemblée spirituelle n'est pas tenue d'accepter les recommandations
formulées lors de la fête, mais elle doit les étudier et rendre compte à la
communauté de la décision prise dans chaque cas. La troisième partie de la fête
est sociale. Outre les rafraîchissements et les discussions amicales, elle peut
comprendre une partie musicale ou autre représentation d'ordre artistique, des
jeux et autres divertissements. Les trois parties sont nécessaires à la bonne
marche de la fête, et les baha'is sont encouragés à développer le caractère
spirituel non seulement de la partie consacrée à la prière, mais aussi des parties
consultatives et sociales.
Si, dans la plupart des communautés baha'ies, la fête a lieu dans des maisons
particulières ou dans de petits centres communautaires, c'est parce que ces
communautés ne sont pas suffisamment importantes pour investir dans des locaux
plus conséquents. Le schéma du développement communautaire conçu par Baha'u'llah
peut s'adapter à des communautés beaucoup plus importantes. Il est prévu que,
dans le futur, chaque village ou autre localité aura sa propre maison d'adoration.
(Mashriqu'l-Adhkar ou Point d'aurore de la mention de Dieu) Cette maison d'adoration
deviendra le centre de la vie communautaire baha'ie et l'on construira autour
d'elle différents bâtiments d'intérêt public.
[Nota: Voir aussi le chapitre
9.]
8.7. Loi baha'ie : la liberté spirituelle par la discipline
Toutes les institutions baha'ies dont nous avons parlé fonctionnent en accord
avec un système de lois révélées. La loi, nous dit Baha'u'llah, est à la base
de toute société humaine.
[Nota: Voir
Extraits des Ecrits de Baha'u'llah,
pp. 218-219; et p. 221.]
Sans elle, tout ordre est impossible, et sans ordre il n'existe aucun schéma
selon lequel les activités spirituelles, culturelles, technologiques et intellectuelles
qui dépendent des interactions humaines puissent se développer. Même la liberté
individuelle dépend de la loi. En abandonnant un certain degré de liberté personnelle
pour un système de lois accepté de tous, l'individu participe à la création
d'un environnement qui lui offre en retour des avantages bien plus grands en
terme de liberté que l'investissement personnel qu'il a nécessité.
C'est avant tout le côté animal de la nature humaine que la loi juste cherche
à discipliner. Ce sujet a déjà été abordé de manière assez détaillée. Il est
cependant bon de souligner à nouveau que les baha'is pensent que nos qualités
intrinsèques spirituelles, intellectuelles et morales ne peuvent être libérées
que lorsque notre nature physique a été disciplinée et purifiée comme un instrument
fiable. Lorsque ce sont les besoins du corps physique qui prédominent, notre
véritable nature reste prisonnière de notre nature physique, animale.
La source profonde de toute loi bénéfique au développement spirituel se trouve
dans les révélations successives des manifestations de Dieu.
[Nota: Voir 'Abdu'l-Baha ,
Le secret de la Civilisation Divine,
pp. 98-103.]
Les lois révélées par Moïse, Jésus ou Mohammed ne sont pas de simples réglementations
ou préceptes moraux. Parce que l'amour de la manifestation pour nous touche
nos coeurs, les lois qu'elle nous enseigne sont capables de remodeler la conscience
humaine. Les notions de bien et de mal varient en fonction de la révélation,
et c'est sur cette assise que la société elle-même élabore de nouveaux codes
de lois. " Ne croyez pas, déclare Baha'u'llah, que Nous vous avons révélé un
simple code de lois. Nous avons plutôt décacheté, avec les doigts de la force
et du pouvoir, le vin de choix. "
[Nota:
Extraits des Ecrits de Baha'u'llah,
p. 219.]
8.8. Le Kitab-i-Aqdas, le Livre des lois
À la lumière de ce point de vue sur l'importance de la loi divine, il n'est
pas étonnant que Shoghi Effendi fasse référence au Livre des lois de Baha'u'llah,
le Kitab-i-Aqdas (littéralement le Plus Saint Livre), en tant qu'acte " le plus
significatif de la vie de Baha'u'llah, la plus brillante conception sortie de
l'esprit de Baha'u'llah et la charte de son nouvel ordre mondial. "
[Nota: Shoghi Effendi,
Dieu passe près de nous,
p. 204.]
Le Kitab-i-Aqdas fixe les principales lois de la vie spirituelle de l'individu
et celles qui caractérisent son appartenance à la communauté baha'ie. C'est,
à tout point de vue, un document extraordinaire. Une étude approfondie du sujet
dépasse le cadre du présent ouvrage, mais les trois caractéristiques suivantes
en ressortent : son aspect détaillé et complet, son application progressive
et la manière dont il fut publié.
Les lois de Baha'u'llah portent sur un très grand nombre de préoccupations individuelles
et communautaires. Parmi les sujets traités, se trouvent la prière, le jeûne,
le mariage, le divorce, la succession, l'éducation, l'inhumation, le testament,
la chasse, le prélèvement de la dîme, les relations sexuelles, le soin du corps,
le travail et les habitudes alimentaires.
Baha'u'llah et 'Abdu'l-Baha ont tous deux souligné le fait que l'application
des lois du Kitab-i-Aqdas devait se faire progressivement, en même temps que
l'homme développait sa capacité à réagir aux responsabilités exigées par les
circonstances. L'apprentissage de certaines lois accélère le processus de maturation
spirituelle et rend possible l'application d'autres dispositions. Baha'u'llah
a expliqué ce principe progressif :
" Sachez avec certitude que, dans chaque dispensation, la lumière de la révélation
divine a été octroyée aux hommes en fonction de leur capacité spirituelle. Considérez
le soleil. Comme ses rayons sont faibles quand il paraît à l'horizon. Comme
sa chaleur et sa puissance augmentent à mesure qu'il approche de son zénith,
permettant ainsi à toutes choses créées de s'adapter à l'intensité croissante
de sa lumière... S'il manifestait brusquement les énergies qui sont latentes
en lui, nul doute que toutes choses créées en seraient endommagées... De même
si, dès le début de son apparition, le Soleil de vérité devait soudainement
manifester la pleine mesure de la puissance dont l'a doté la providence du Tout-Puissant,
la substance de l'intelligence humaine s'épuiserait et se consumerait; car le
coeur des hommes ne pourrait soutenir l'intensité de sa révélation, ni s'avérer
capables de refléter l'éclat de sa lumière. "
[Nota: Baha'u'llah, Synopsis et codification des lois et ordonnances du Kitab-i-Aqdas,
pp. 5-6.
Le Kitab-i-Aqdas ]
Guidés par cela, le Gardien et la Maison Universelle de Justice ont progressivement
introduit des clauses du Kitab-i-Aqdas au fur et à mesure que la communauté
baha'ie grandissait et mûrissait. De toute évidence, le processus sera très
long. Certaines lois, a souligné Shoghi Effendi, ont été formulées en prévision
d'un état de société appelé à sortir du chaos qui prévaut aujourd'hui.
[Nota: Cité dans Synopsis et codification, de Baha'u'llah, p. 8.
Le Kitab-i-Aqdas]
Le Kitab-i-Aqdas n'est un livre que nominalement. Plus précisément, c'est le
coeur d'un vaste ensemble littéraire dans lequel les lois de la foi baha'ie sont
énoncées et expliquées. Le volume original en arabe est un très petit ouvrage.
Baha'u'llah y a ajouté un nombre important d'écrits qui développent les déclarations
qui y sont faites, en commentant certaines questions soulevées par des érudits
persans baha'is du dix-neuvième siècle qui avaient lu son ouvrage. 'Abdu'l-Baha
a complété ces écrits annexes et donné de plus amples interprétations et commentaires
sur le contenu du Kitab-i-Aqdas, tout comme Baha'u'llah l'avait jugé nécessaire.
Tout ceci fut ensuite largement détaillé et interprété par Shoghi Effendi qui
remplissait son rôle de gardien de la communauté baha'ie.
Aussi les clauses spécifiques du Kitab-i-Aqdas ne peuvent-elles être déterminées
qu'en retraçant leur développement particulier au travers du processus entier
de codification. Shoghi Effendi a mentionné qu'une codification des lois et
ordonnances du Kitab-i-Aqdas serait réalisée et publiée ultérieurement. Lui-même
y travailla beaucoup, traduisant différents passages de l'original et laissant
une ébauche du Synopsis et Codification avec des notes complémentaires. En 1973,
pour le centenaire de la révélation du Kitab-i-Aqdas par Baha'u'llah, la Maison
Universelle de Justice publia les extraits recueillis, tels qu'ils avaient été
traduits par le Gardien, ainsi qu'un résumé complet des sujets traités dans
l'ouvrage original, sous le titre de Synopsis et codification des lois et ordonnances
du Kitab-i-Aqdas. Puis, en 1992, la Maison Universelle de Justice publia une
traduction anglaise considérablement annotée du texte entier du Kitab-i-Aqdas,
ainsi que les commentaires supplémentaires de Baha'u'llah et le Synopsis et
Codification publiés précedemment.
[Nota: Des opposants à la foi baha'ie, en particulier parmi le clergé musulman
et chrétien, ont tenté de suggérer qu'en n'ayant pas traduit et publié le texte
du Kitab-i-Aqdas, les dirigeants de la communauté baha'ie avaient privé les
membres de la communauté de l'occasion de suivre les injonctions de Baha'u'llah,
à savoir de se tourner vers le Plus Saint Livre. Cependant, comme nous l'avons
déjà exposé dans d'autres chapitres, Baha'u'llah s'est montré clair en insistant
sur le fait que le seul moyen pour ses disciples, de se tourner vers ses enseignements
et de les suivre, était de passer par les interprétations de son successeur
autorisé, 'Abdu'l-Baha . 'Abdu'l-Baha fut également formel en conférant à Shoghi
Effendi, et à lui uniquement, l'autorité d'interprétation. Tout au long de leurs
ministères respectifs, durant une période totale de soixante-cinq ans, 'Abdu'l-Baha
et Shoghi Effendi ont fourni une interprétation approfondie des enseignements
de Baha'u'llah dans le but de guider la communauté baha'ie. En fait, sans cette
interprétation, il est impossible d'imaginer comment les lois et principes soulignés
dans le Kitab-i-Aqdas auraient pu avoir l'effet si pénétrant et si répandu qu'il
a eu en quelques courtes décades.]
En 1994, la Maison Universelle de Justice publia en anglais le texte intégral
de l'Aqdas. La traduction française a été éditée par la Maison d'Éditions Baha'ies
en 1996.
8.9. Les lois spécifiques du Kitab-i-Aqdas
Une brève étude des domaines spécifiques de la conduite humaine pour lesquels
les clauses du Kitab-i-Aqdas ont déjà été appliquées par la communauté baha'ie
donnera les grandes lignes des directives de Baha'u'llah et illustrera les trois
caractéristiques qui viennent d'être mentionnées.
8.9.1. Prières et méditations
L'une des plus importantes lois prescrites par Baha'u'llah pour une discipline
individuelle est la prière et la méditation quotidiennes. Des compilations des
prières de Baha'u'llah et 'Abdu'l-Baha ont été publiées en plusieurs langues
et il existe, en anglais, un volume de trois cents pages composé uniquement
de textes de Baha'u'llah à méditer. Ces livres servent de base aux prières et
aux méditations des baha'is.
En dehors de cette injonction à la prière et à la méditation, Baha'u'llah a
aussi ordonné une prière quotidienne obligatoire à chaque baha'i ayant atteint
l'âge adulte.
[Nota: Le Kitab-i-Aqdas fixe l'âge de la maturité à quinze ans. C'est lorsqu'il
entre dans sa quinzième année que le croyant assume la pleine responsabilité
de sa propre vie spirituelle et de son développement.]
Cette prière obligatoire revêt trois formes différentes, et chacun est libre
de choisir chaque jour l'une ou l'autre de ces prières. La courte prière par
exemple se dit entre midi et le coucher du soleil :
" Je suis témoin, ô mon Dieu, que tu m'as créé pour te connaître et pour t'adorer.
J'atteste, en cet instant, mon impuissance et ta puissance, ma pauvreté et ta
richesse. Il n'est pas d'autre Dieu que toi, le Secours dans le péril, Celui
qui subsiste par Lui-même. "
[Nota: Livre de Prières, p. 86.
Livre de prières ]
8.9.2. Abstinence de boissons alcoolisées et de
drogue
Baha'u'llah a enseigné que l'usage d'alcool, de stupéfiants ou d'hallucinogènes
nuit aux facultés physiques et mentales, mettant par conséquent un frein au
développement spirituel. Il est donc interdit aux baha'is de les utiliser sous
quelque forme que ce soit. La seule exception à cette règle est d'ordre médical
: un médecin a le droit de prescrire alcool et drogues lorsqu'il n'y a aucun
autre mode de traitement connu possible. Il n'y a dans les enseignements baha'is
aucun autre interdit concernant la nourriture ou les boissons. Fumer du tabac
par exemple n'est pas interdit bien que fortement déconseillé, car nuisible
à la santé et souvent gênant en société.
[Nota: Voir aussi Baha'u'llah et 'Abdu'l-Baha , Baha'i World Faith, pp. 333-336,
pour la déclaration de 'Abdu'l-Baha à ce sujet.]
8.9.3. Jeûne
Comme cela a été le cas pour d'autres religions révélées, la foi baha'ie accorde
une grande importance à la pratique du jeûne en tant que discipline de l'âme.
Baha'u'llah a désigné une période de dix-neuf jours chaque année pendant laquelle
les adultes baha'is jeûnent chaque jour, du lever au coucher du soleil. Cette
période correspond au mois baha'i d'`Ala, (qui signifie Élévation) du 2 au 21
mars inclus. C'est le mois qui précède le Naw-Ruz baha'i, ou nouvel an, qui
a lieu le jour de l'équinoxe du printemps; et la période de jeûne est par conséquent
considérée comme une période de régénération et de préparation spirituelle aux
activités de l'an nouveau. Cependant, selon le Kitab-i-Aqdas, les femmes enceintes
ou qui allaitent, les personnes âgées, les malades, les voyageurs, les travailleurs
de force ainsi que les enfants en dessous de quinze ans sont exempts du jeûne.
[Nota: Pendant le jeûne, les baha'is se lèvent et mangent avant le lever
du soleil. Ils s'abstiennent ensuite chaque jour de toute nourriture ou boisson
jusqu'au coucher du soleil. Le jour commence souvent par la lecture de prières
en famille, et le temps habituellement consacré dans la journée à préparer les
repas et à manger est fréquemment utilisé pour prier et méditer.]
8.9.4. Refus de la calomnie
En sus des lois qui s'adressent individuellement au croyant, Baha'u'llah a établi
un certain nombre de lois et principes sociaux. Il condamne par exemple la critique
d'autrui et la médisance comme extrêmement préjudiciables à la santé spirituelle
:
" ... la médisance étouffe la flamme du coeur et éteint la vie de l'âme. "
[Nota:
Extraits des Ecrits de Baha'u'llah,
p. 174.]
La médisance s'entend comme une critique d'autrui adressée à une tierce personne,
que cette médisance soit ou non le résultat d'une intention maligne. Les membres
de la communauté baha'ie sont autorisés à s'inquiéter des actes d'autrui, de
manière confidentielle, au sein de leur assemblée spirituelle, mais ils doivent
se garder d'en discuter plus avant.
8.9.5. Le mariage
Le mariage est considéré par la loi baha'ie comme une institution sociale et
spirituelle. Elle concerne non seulement le couple et ses enfants, mais aussi
les parents, les grands-parents, les petits-enfants et autres parents proches.
En fait, elle touche (ou du moins devrait toucher, dans une société saine) toutes
les autres associations communautaires qui l'entourent. Baha'u'llah a amplement
mis l'accent sur l'éducation du couple, afin que chacun apprenne à connaître
les possibilités et les limites de l'autre, leur permettant ainsi d'éviter,
dans une certaine mesure, des erreurs futiles dans leurs relations. Un baha'i
qui désire se marier doit obtenir le consentement de ses parents naturels vivants,
ainsi que celui des parents du futur conjoint (que ces derniers soient baha'is
ou non). Contrairement à la tradition qui a longtemps prévalu en Orient, les
parents n'ont pas le droit de choisir le conjoint de leurs fils ou filles. Mais,
contrairement aussi à ce qui se passe actuellement en Occident, le couple n'est
pas libre, de lui-même et sans l'autorisation de ses parents, (qui peuvent être
directement concernés par les conséquences d'une telle décision) de prendre
une décision qui engage d'autres personnes.
[Nota: Consulter A Fortress for Well-Being, Baha'i Teachings on Marriage
pour une étude plus complète des enseignements baha'is relatifs au mariage.
Sommaire des compilations baha'ies ]
Les enseignements baha'is préconisent la chasteté avant le mariage, car l'instinct
sexuel est lié à la procréation et au renforcement des liens du mariage. Par
conséquent, la fidélité absolue entre les deux conjoints à l'intérieur du mariage
est une loi à laquelle les Écrits baha'is attachent également une grande importance.
Si le mariage n'est en aucun cas obligatoire pour les baha'is, il est fortement
recommandé en tant que forteresse de bien-être. Loin d'être considéré comme
une vertu particulière, le célibat est considéré dans les Écrits baha'is comme
une contrainte peu souhaitable.
[Nota: Dans son appel au clergé chrétien Baha'u'llah dit : Dis : Ô assemblée
de moines ! Ne vous retirez pas dans vos églises et dans vos cloîtres. Sortez-en
avec ma permission et préoccupez-vous de ce qui profitera à vos âmes et à celles
des hommes... Acceptez la vie conjugale, afin que quelqu'un après vous puisse
prendre votre place. Nous vous avons interdit la perversité, non pas la fidélité.
Resterez-vous attachés aux règles de conduite que vous avez vous-mêmes établies,
et rejetterez-vous les consignes de Dieu ? Craignez Dieu et ne faites pas partie
des insensés. S'il n'y avait pas l'homme, qui donc me mentionnerait sur ma terre,
et comment mes attributs et mon Nom auraient-ils pu être révélés ? Cité par
Shoghi Effendi dans
Le Jour promis est venu ,
256.]
La cérémonie même du mariage baha'i ne revêt aucune forme particulière et peut
être extrêmement simple. Le seul impératif est l'échange du serment : En vérité,
nous dépendons de la volonté de Dieu. La cérémonie doit être agréée par une
assemblée spirituelle après s'être assuré du consentement des parents et du
choix des témoins. Prières, méditations et musique choisies par les deux parties,
viennent souvent compléter l'événement.
8.9.6. Le divorce
Le divorce est autorisé dans la foi baha'ie, quoique fortement déconseillé.
Les difficultés habituelles rencontrées dans la vie de couple sont destinées
à purifier les caractères des conjoints et à renforcer leur union en tant que
cellule de base de la société elle-même. Les enseignements baha'is reconnaissent
néanmoins que des problèmes insolubles peuvent se développer dans des relations
conjugales où il s'avère que les deux conjoints ne s'entendent pas du tout.
Si, par conséquent, des différends se développaient entre mari et femme baha'is
au point qu'ils envisagent sérieusement le divorce, les lois baha'ies possèdent
une institution appelée année de patience : les deux parties vivent séparées
pendant une année entière, ce qui leur permet de rechercher des conseils et
d'entreprendre des efforts pour surmonter les difficultés qui ont conduit à
cet échec. L'une ou l'autre partie peut porter le problème devant l'assemblée
spirituelle locale qui rencontre alors les deux conjoints séparément et détermine
s'il y a ou non désir de tentative de réconciliation. Si cette possibilité ne
transparaît pas, l'assemblée spirituelle fixera la date de commencement de l'année
de patience, date à partir de laquelle chacune des parties s'établira dans une
résidence séparée.
Au cours de cette année d'attente, l'assemblée spirituelle essaiera, souvent
avec une aide professionnelle, d'aider le couple à surmonter ses difficultés.
Un divorce baha'i ne peut être obtenu qu'après l'écoulement complet de l'année
d'attente.
Dans un certain sens, on pourrait considérer cette institution comme une sorte
d'hôpital du mariage où les relations conjugales déficientes sont soignées et
par le biais duquel les pressions immédiates sont temporairement supprimées
et le processus de guérison entamé jusqu'à ce que les forces saines de l'union
puissent se réaffirmer.
8.9.7. Non-ingérence dans les affaires politiques
Il est une autre loi sur laquelle Baha'u'llah a insisté : il a explicitement
demandé à ses disciples de s'abstenir de toute ingérence en matière de politique.
À première vue, on pourrait s'attendre à ce que les membres de la communauté
baha'ie soient activement engagés dans un vaste champ d'activités politiques
pour faire progresser leurs idéaux universels. Or, c'est l'inverse qui se produit.
Il est permis à un baha'i de voter pour un candidat qu'il aura jugé, selon sa
propre conscience, capable de rendre de précieux services à la société dans
laquelle il vit. Les baha'is peuvent aussi accepter une charge gouvernementale
apolitique. Mais ils ne peuvent s'identifier à ou faire campagne pour un quelconque
parti politique ou mouvement partisan.
[Nota: Il existe dans les Écrits baha'is un certain nombre de déclarations
concernant l'obéissance aux gouvernements et l'abstention de tout engagement
politique. Voir par exemple : La Maison Universelle de Justice,
Messages de la Maison Universelle de Justice
1963 - 1986, n° 55, 77 et 173 .]
Ceci s'explique par la croyance baha'ie fondamentale que le principal défi lancé
aujourd'hui à tous les peuples et nations est la réalisation de l'unité de l'humanité.
Le véritable progrès social, enseigne Baha'u'llah, suit la réalisation de cette
nouvelle étape dans le développement de la civilisation humaine : Le bien-être
de l'humanité, sa paix et sa sécurité ne pourront être obtenus aussi longtemps
que son unité ne sera pas fermement établie.
[Nota: Cité par Shoghi Effendi dans
L'Ordre mondial de Baha'u'llah,
p. 197.]
Baha'u'llah explique que l'action politique, par nature partisane et source
de division, ne peut détenir les réponses à des problèmes qui sont universels
par leur essence même. Tout instrument politique, a-t-il souligné, est limité
et spécifique, qu'il soit national, racial, culturel ou idéologique.
Le principe baha'i de la non-ingérence dans les affaires politiques n'empêche
pas les baha'is de prendre des positions publiques sur des questions sociales
et morales lorsque ces questions ne font pas partie d'un quelconque débat politique
partisan. En fait, les baha'is sont, depuis plusieurs années, au premier plan
en ce qui concerne différentes questions sociales telles que l'égalité raciale
et la non-discrimination.
Le principe de non-ingérence dans les affaires politiques, que ce soit en croyance
ou en pratique, est étroitement lié à l'enseignement baha'i de loyauté envers
le gouvernement. Baha'u'llah a demandé à ses disciples d'obéir au gouvernement
en place à une époque donnée, et de s'abstenir formellement de toute tentative
visant à le renverser ou à le miner. Si le gouvernement d'une nation venait
à changer, la communauté baha'ie doit, avec ce même esprit de fidélité, accorder
sa loyauté à la nouvelle administration, en se conformant toujours au principe
de non-ingérence dans les affaires politiques.
[Nota: Dans chaque pays où ils résident, les membres de ce peuple doivent
se comporter envers le gouvernement de ce pays avec loyauté, honnêteté et fidélité.
Baha'u'llah,
Les Tablettes de Baha'u'llah,
révélées après le Kitab-i-Aqdas, p. 22.]
8.9.8. Une nécessité fondamentale de la vie communautaire
baha'ie : la consultation
À la base de toutes les lois et structures communautaires de la foi baha'ie
se trouve un processus de prise de décision en groupe appelé consultation.La
consultation baha'ie consiste principalement en un échange d'opinions franc
mais amical entre les membres d'un groupe dont le but est de déterminer la vérité
d'un sujet et d'établir un consensus de groupe véritable. Il n'est pas exagéré
de dire que pratiquement chaque membre de la communauté baha'ie est un élève
dans ce processus qu'est la consultation. Shoghi Effendi a dit à ce sujet :
" Le principe de la consultation, qui constitue une des lois de base de l'administration,
devrait être appliqué à toutes les activités baha'ies qui touchent les intérêts
collectifs de la foi; car c'est en coopérant et en échangeant continuellement
des idées et des opinions que la cause est la plus à même de sauvegarder et
de protéger ses intérêts. L'initiative individuelle, la compétence et les ressources
personnelles, bien qu'indispensables, sont tout à fait incapables d'accomplir
une tâche aussi immense, à moins que les expériences collectives et la sagesse
du groupe ne les soutiennent et ne les enrichissent. "
[Nota: Consultation : A compilation, Extracts from the Writings and Utterances
of Baha'u'llah, 'Abdu'l-Baha , Shoghi Effendi and the Universel House of Justice,
p. 15.
Sommaire des compilations baha'ies ]
Un accent similaire a été placé sur ce principe dans la vie familiale baha'ie,
et particulièrement dans les relations entre mari et femme. Selon les circonstances,
même pour des problèmes purement personnels, les baha'is sont encouragés à se
consulter. La Maison Universelle de Justice nous met toutefois en garde :
" Il ne faut pas oublier que toute consultation a pour objet d'arriver à la
solution d'un problème et diffère profondément d'une autre méthode qui consiste
à mettre l'âme à nu, très populaire de nos jours dans certains cercles et ressemblant
en quelque sorte à une confession interdite dans la foi... " Il est interdit
de confesser à qui que ce soit ... nos péchés et nos défauts, ou de se confesser
en public comme le font certaines sectes religieuses. Néanmoins, nous sommes
tout à fait libres d'avouer spontanément notre erreur sur un sujet quelconque,
ou de mentionner les défauts de notre caractère, ou de demander pardon à une
autre personne. "
[Nota: Consultation : A compilation, pp. 22-23.
Sommaire des compilations baha'ies ]
L'un des résumés les plus connus du schéma baha'i de la consultation se trouve
dans un passage des écrits de 'Abdu'l-Baha devenu un document de réflexion pour
les assemblées spirituelles locales et nationales :
" La condition première est un amour et une entente totale entre les membres
de l'assemblée. Ils doivent être absolument libres de toute discorde, et manifester
entre eux l'unité de Dieu, car ils sont les vagues d'une seule mer, les gouttes
d'une seule rivière, les étoiles d'un seul ciel ... ils doivent, lorsqu'ils
se réunissent, tourner leurs visages vers le royaume d'en haut et demander l'aide
du royaume de gloire. Pour exprimer leurs opinions, ils doivent alors procéder
avec une dévotion, une courtoisie, une dignité, une attention, une modération
extrêmes. Ils doivent, pour chaque sujet, rechercher la vérité et ne pas insister
sur leur propre opinion, car l'obstination et l'insistance à maintenir une opinion
personnelle ne peuvent conduire finalement qu'à la discorde et aux querelles,
et à cacher la vérité. Ces membres honorables doivent, en toute liberté, exprimer
leurs propres pensées, et il n'est en aucun cas acceptable que l'un d'entre
eux déprécie la pensée d'un autre; non, il doit avec modération établir la vérité,
et si des différences d'opinions surgissent, la majorité des voix doit prévaloir,
et tous doivent obéir et se soumettre à la majorité. De même, que ce soit pendant
ou après la réunion, il n'est pas permis à l'un des membres estimables de s'opposer
à toute décision prise précédemment ou de la critiquer, même si cette décision
n'est pas bonne, car une telle critique empêcherait son application... S'ils
s'efforcent de remplir ces conditions, la grâce de l'Esprit saint leur sera
accordée, et cette assemblée deviendra le centre des bénédictions divines; les
armées de la confirmation divine viendront à leur aide et, jour après jour,
ils recevront une nouvelle effusion de l'Esprit. "
[Nota: Shoghi Effendi Baha'i administration, p. 22-23.
Sommaire des compilations baha'ies ]
Une autre caractéristique intéressante de la consultation des assemblées spirituelles
baha'ies est leur objectif délibéré de parvenir à une unanimité d'opinion. La
prise de décision à la majorité est, par conséquent, considérée comme l'exigence
minimum d'une consultation administrative baha'ie :
" L'idéal de la consultation baha'ie est d'arriver à une décision unanime. Si
ceci n'est pas possible, il faut voter... Dès qu'une décision est prise, elle
devient la décision de toute l'assemblée, et non pas simplement celle des membres
qui faisaient partie de la majorité. "
[Nota: Consultation : A compilation, p. 21.
Sommaire des compilations baha'ies ]
8.9.9. Conclusions
Les lois dont nous avons parlé précédemment, ainsi que d'autres lois fondamentales
et procédures dominantes dans la foi baha'ie, représentent une sorte de trame
de force qui sous-tend la nouvelle religion. De manière superficielle, on pourrait
s'attendre à trouver une préférence pour l'imprécision et, peut-être, un manque
de réalisme parmi les membres d'une foi dont le but est l'unification de l'humanité
et la création d'une nouvelle société universelle basée sur la justice. Le message
baha'i est sûrement un message visionnaire, et les membres de la communauté
baha'ie sont certainement gagnés à cette vision. D'un autre côté, ils ne pensent
pas que ce but puisse être atteint sans d'énormes sacrifices, aussi bien de
la part des individus que des sociétés dans leur totalité.
Ils pensent que la réalisation d'un ordre mondial et d'une civilisation mondiale
implique la création d'un nouveau mode de vie qui orientera la nature humaine
selon les vastes desseins de Dieu. Cette discipline doit affecter aussi bien
les événements les plus ordinaires de la vie que les préoccupations plus générales
de la société. L'institution du mariage doit retrouver sa place de fondation
sur laquelle peut s'épanouir la civilisation. La vie de l'individu doit se spiritualiser
par l'intermédiaire de disciplines telles que la prière, la méditation et le
service à autrui. Des habitudes sociales telles que la médisance, qui frappe
les racines mêmes des relations humaines, doivent être éliminées, les peuples
doivent abandonner la fascination qu'ils éprouvent pour des quêtes aussi vaines
que la politique partisane et se tourner vers l'apprentissage de la coopération
et l'art de la véritable consultation. De nouvelles structures sociales nécessitant
une plus grande participation individuelle doivent être mises en place. C'est
ce manquement contemporain à la soumission à ces disciplines nécessaires (et
inévitables) et à la mise en oeuvre de ces nouvelles structures que les baha'is
considèrent comme une reddition à la pensée avide et un abandon confiant à des
solutions magiques aux problèmes critiques du monde. Selon Baha'u'llah :
" Ceux que Dieu a dotés de discernement reconnaîtront aisément que les préceptes
qu'Il a établis constituent les moyens suprêmes pour maintenir l'ordre dans
le monde et assurer la sécurité des peuples. Celui qui s'en détourne est compté
parmi les êtres abjects et insensés. En vérité, Nous vous avons commandé de
ne pas céder aux impulsions de vos passions mauvaises, de vos désirs corrompus,
et de ne pas dépasser les limites fixées par la Plume du Très-Haut, car elles
sont le souffle de vie pour toutes choses créées...
Ô vous peuples du monde ! Sachez avec certitude que mes commandements sont les
lampes de mon affectueuse providence parmi mes serviteurs, les clefs de ma miséricorde
pour mes créatures... Si un homme goûtait à la douceur des paroles que les lèvres
du Très-Miséricordieux ont voulu prononcer, il renoncerait complètement à tous
les trésors de la terre, s'il les possédait, pour pouvoir défendre la vérité
ne fut-ce que d'un seul, de ses commandements qui irradient du levant de sa
généreuse sollicitude et de sa tendre bonté. "
[Nota:
Extraits des Ecrits de Baha'u'llah
, p. 218.]